Douze milles hommes vont me tomber dessus (Legers spoilers)

Considéré par les critiques comme un chef d’œuvre du 7ème art, mon approche de 12 Hommes en Colère partait donc avec la meilleure volonté du monde, impatient, que j'étais à découvrir ce joyaux. Malheureusement, la déception est de taille.

Sidney Lumet met en scène un huit-clos, une salle, une seule, où un jury de 12 hommes vont devoir décider si ils doivent envoyer ou non un accusé sur la chaise d’électrique. Un jeune homme de 18 ans est accusé d'avoir assassiner son père à coup de couteau. Deux témoins l'ont vu, il a grandit dans un quartier pauvre, son père le battait et l'avait encore frappé juste avant son assassinat. Lors de l'interrogatoire, le soir-même, son alibi ne tenait pas, personne ne peut prouver qu'il n'était pas là. Il a acheté le couteau qui a servi à tuer son père quelques heures avant la mort de ce-dernier.
Autant dire que les preuves sont là. Les jurés se réunissent pour décider de son sort. Ils doivent être unanimes.
Mais, un des jurés n'a pas la même définition que les autres de ce que signifie « coupable ». Il ne s'agit pas de dire que l'accusé est innocent. Il n'en sait rien. Mais il a des doutes de sa culpabilité. Il remet cela en cause.
12 Hommes en colère n'est pas un film où la vérité se dévoile. C'est un huit-clos où les protagonistes, sans aucun indices venus de l'extérieur vont voir qu'aucune preuve n'est parfaite. Le but n'est pas d'innocenter le jeune homme, mais de dévoiler que rien ne prouve formellement qu'il est bel et bien un assassin. Tel un Socrate new-yorké, Henry Fonda fait naître chez ses pairs le doute et la certitude de ne pas savoir. Ils le pensaient coupable, ils savent désormais qu'ils ne savent pas.

Pour autant, le film ne m'a pas plu outre mesure. Pourquoi ? Parce que l'image ne me parle pas toujours, certains cadrages sont sympathiques, mais pas tous. Certains plans m'ont même déplu. La musique ne m'a pas touché et finalement, le travail sur l'image ne m'a vraiment pas touché. J'ai trouvé qu'en terme « technique » le film n'avait pas grand chose à offrir si ce n'est ce format si spécifique. Un film sans action véritable, sans révélation, sans rien, en sommes. Un film où tout sort de l'esprit du héro.
Le problème c'est que ce qu'il y a derrière ne m'a pas forcément tant convaincu que ça. Le jeu d'acteur, sans être mauvais (loin de là) n'est pas si dantesque que ça. J'oserais même dire que par son personnage, Henry Fonda est peut être celui qui exprime le moins ses capacités. Son personnage semblant trop lisse, trop sage en somme.
Je regrette vraiment ce manque de prise de risque esthétique, de parti pris, de volonté de changer la donner là-dessus. Je trouve ça dommageable.

Le film, évidemment, parle beaucoup d'hommes. Malheureusement le message ne m'a pas foncièrement touché tant que ça. Tout simplement parce que ça a été pompé de toute part. On sent la profondeur du message et surement l'aspect novateur. Mais, au final, ces hommes qui se voient inclus dans le procès, qui pensaient en être extérieurs et se retrouvent dedans, et bien, ça ne m'a pas tant touché que ça.
Ce film c'est la preuve que le doute existe, c'est aussi une question sur les limites du système américain. Car, au final, peu importe réellement que le coupable soit envoyé sur la chaise électrique ou non. Ce qui compte c'est la vérité. Et la vérité n'est pas obtenue. Jamais.
On pourrait même se demander si la vérité intéresse les personnages. En effet, une des preuves (cruciales) se retrouvent être remise en cause à cause du port de lunette. Or, la question est « la personne est elle presbyte ou myope ? » et on a pas de réponse. On ne l'étudie même pas cette question.
Finalement, on pourrait voir dans ce film une critique du manque réel de recherche de vérité, que le doute existe toujours parce que la justice ne va pas au bout de ses objectifs. Mais, peut on parler d'une réelle critique de la justice ? C'est dur à concevoir. La justice est faite par les hommes, elle est forcément imparfaite. Les limites sont inhérentes à la justice.
Ce film est donc un film sur le doute, un film sur le fait de douter. Et un film sur l'aveuglement également, qui prouve qu'on ne doit pas se laisser dominer par la haine, les préjugés. On doit analyser méticuleusement les faits. Non pas forcément au tribunal, mais tout le temps, sans quoi nos jugements seront corrompus.

Finalement, derrière l'absence technique qui m'attriste, malgré le manque de bonne répliques et le fait de ne pas avoir un travail sur l'image aussi puissant que je l'aurais voulu. Malgré le manque d'intérêt de bande-son. Ce film ne m'a pas convaincu outre mesure. Il est plaisant, bien sur, sur certains terrains. La thématique du doute est bien menéee, c'est totalement vrai. Les acteurs jouent bien. Mais j'ai l'impression qu'une partie du film, une fois mise sous réflexion, perd de son charme, tout simplement parce que la justice n'est, finalement, pas si traité que cela au cours du film.
mavhoc
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le 16 août 2014

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