Sam Mendes s'engage dans un travail périlleux, celui de nous plonger dans une première guerre mondiale pétante au coeur de la campagne française, et promet une immersion inédite au travers de la technique du plan séquence, censé illustrer une fuite en avant calibrée et risquée.
Malheureusement pour 1917, il n'en est rien, et la technicité pronera hélas sur un scénario et un déroulé trop timide ...
La mission est simple : traverser des kilomètres d'une zone de guerre pour annuler une attaque cruciale tournée en guet-apens par les troupes nazies. Deux jeunes soldats devront remplir cette mission, l'un d'eux motivé aveuglément par l'espoir infime de sauver son frère de l'embuscade.
L'inexpérience de ces soldats est un défaut majeur du déroulé narratif. Car toutes les situations en seront justifiées et amplifiées pour faire vivre un vrai calvaire (maladroit ?) aux protagonistes.
Sauver la peau d'un ennemi qui s'en prendra à vous peut fonctionner une fois, mais justifier des péripéties par des maladresses sur l'intégralité du métrage à coup de naiveté humaine en plein coeur d'un conflit qui dure depuis 3 ans, cela fait perdre en crédibilité, en enjeu, et donc en ressenti émotionnel.
La ou un Matt Damon et un Tom Hanks transcendaient le dénouement du Soldat Ryan, la rencontre finale de 1917 n'est qu'une étape de plus dans le quotidien d'un soldat quelconque, et d'une mission pas si périlleuse pour justifier d'en suivre les moindre étapes.
La ou un Dunkirk sublimait la délivrance d'une flopée de bateaux civils à la rescousse d'une armée en péril, l'annulation de l'attaque nous laisse ici de marbre, le réalisateur préférant s'apesantir sur la technicité d'une envolée de soldats hors des tranchées plutot que sur la dynamique héroique d'un soldat motivé par sa mission ...
La faiblesse des décors est également inhérante au manque d'immersion du film.
En effet, malgré des tranchées plutot bien reconstituées, le reste n'est que plaines désolées sans aucune attache historique ou matérielle qui permettrait de nous projeter au coeur d'un conflit.
En témoigne la traversée d'un champ de batailles plutot quelconque, qui jalousera inévitablement un Soldat Ryan qui s'était montré exemplaire à ce sujet, une ferme reculée qu'un Cheval de guerre avait magnifiée, et globalement un environnement trés éloigné du réalisme d'un Band Of Brothers. Sam Mendes restera timide tout le long du métrage, sans doute pris au piège par la technicité de son procédé narratif.
Seule brillera la scène de nuit dans les ruines, véritable spectacle son & lumière dont seul Thomas Newman et Roger Deakins (oscarisé pour l'occasion) ont le secret.
Nolan (Dunkirk) avait fait de son film un thriller au suspense intemporel, Mallick (La Ligne Rouge) un récit métaphysique et poétique, Spielberg (Ryan / Band of Brothers / The Pacific) une vision réaliste et patriotique ...
Sam Mendes présente ici un manuel technique de cinéma pour mettre trop facilement de coté l'horreur physique et psychologique d'un tel événement.