Trop de sang et des sales mines pour la plus longue bande d'annonce de l'histoire du cinéma.

Je ne sais vraiment pas trop quoi penser du film. Pendant la séance j'étais assez réticent et même copieusement agacé mais plus les heures passent, plus mon jugement s'améliore. Par conséquent je diviserai cette critique en deux parties, une première consacrée à mon expérience à chaud, et une seconde à ce que je pense ce matin (le lendemain).

La première scène du film, la célèbre bataille de Marathon qui mettra fin à la première guerre médique, donne le ton : le révisionnisme côtoiera l'esthétisme. Révisionniste car après recherche, si Thémistocle (le héros du film) a bien unifié les grecques dans la ligue panhellénique et a commandé la flotte grecque à Salamine, il n'est pas le héros de la bataille de Marathon (il n'y aurait même pas participé), où c'est Miltiade le Jeune qui s'est illustré. Darius le père de Xerxès n'est pas mort non plus d'une flèche durant la bataille mais chez lui de maladie (en revanche j'ai été surpris qu'Artémise ait vraiment existé). Ce ne sont que des détails vous me direz mais ça ne fait pas de mal de s'instruire. Là il est évidemment question de remodeler l'histoire pour doper le dramatique et l'épique (la vengeance de Xerxès contre l'assassin de son père, Thémistocle). Esthétique enfin car cette première scène est vraiment très bien foutue et même carrément belle. Je ne sais pas si c'est la 3D (celui de Snyder ne l'avait pas) ou simplement un progrès technologie mais la chorégraphie de ces combats, magnifiée par les ralentis (si tu n'aimes pas les ralentis passe ton chemin), sonne très crédible (malgré les physiques outranciers des bonhommes). Après cette première scène j'ai commencé à croire que mon instinct ne m'avait peut-être pas lâché sur ce coup là. Le problème c'est que derrière j'ai été de déception en déception. Le cours d'histoire en voix off dure trois plombes, l'esthétique devient de plus en plus outrancière (sur certaines scènes, notamment une où Thémistocle vient démonter notre Eva Green nationale sur l'eau et sur fond de pleine lune et de voie lactée, on se croirait sur une autre planète) et tellement grossière qu'on a du mal à se repérer pendant les batailles navales (essayez de discerner les bateaux sur la mer sans vous décoller la rétine) et surtout le film n'est qu'une succession de scènes déliées ne misant que sur le choc visuel (ça saoule rapidement et la progression du film est très compliquée à appréhender), mais traversées des fois par quelques fulgurances.

Puis avec les heures qui passaient, je changeais mon fusil d'épaule et décidais de défendre le film si moyen soit-il. On peut trouver, comme moi et malgré le fait que j'avais les yeux explosés (j'ai fait une garde la veille, donc mes yeux étaient déjà fatigue toutefois), le jusqu'au-boutisme visuel assez fascinant. De tous les films qui sont sortis depuis le premier volet de Snyder, celui-là est sans doute celui qui a poussé la barre le plus haut dans la démesure esthétique, ou le plus bas c'est selon l'avis, mais en tout cas qui l'a porté à son paroxysme. La question que je me pose alors est "est-ce de l'opportunisme?" ou "est-ce une volonté de la production?". Comme j'ai dit que je défendrai le film, je pencherais pour la seconde. Par rapport au premier qui flirtait avec les tons sépias, La naissance d'un empire lorgne d'avantage sur le bleu-gris. Beaucoup plus sombre que le premier donc, c'est probablement ce qui m'a décalqué la vue, son degré d'achèvement au niveau des chorégraphies, des giclées d'hémoglobine, des explosions et des combats lui est supérieur (je précise que j'aime et préfère celui de Snyder, bien plus lisible et qui ressemble plus à un film que cette suite). Cette radicalité on la retrouve aussi dans la structure narrative puisque le film est temporellement imbriqué au premier : le début du film se passe en même temps que la bataille des Thermopyles et la fin quelques jours après la mort de Léonidas et de ses 300 guerriers spartiates. Mine de rien c'est une ligne plutôt rare au cinéma qu'on retrouve d'avantage dans les séries où on n'hésite pas à raconter un même événement de plusieurs points de vues. Ça y est le mot est lâché, ce second opus ressemble d'avantage à un long et épique épisode de série qu'à un long-métrage. J'irai plus même loin en disant que sa structure décousue rappelle encore plus celle d'une bande d'annonce que celle d'une série. En fait 300 : la naissance d'un empire n'est rien de plus et rien de moins qu'une bande d'annonce de cent deux minutes, la plus grande de l'histoire du cinéma. Et une fois qu'on a compris ça, on savoure le film à sa juste valeur.
blig
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le 1 mars 2014

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blig

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