Première réalisation et premier scénario de l'acteur (comique) Jonah Hill, 90's revient avec nostalgie sur une décennie où les écrans n'accaparaient pas toute l'attention de la jeunesse. Le matériau est brut, juste, authentique et ne s'immisce pas dans le pathos ou le film social. Ici, le point de vue adopté est celui d'un ado de 13 ans, maltraité par son grand frère, sur-protégé par sa mère, qui va faire la découverte des valeurs de l'amitié, de l'indépendance et de ses propres désirs. Par le biais du skate, il va intégrer un groupe de jeunes qui passe leur journée sur leur planche à roulettes. Suite à cette rencontre, des ailes lui poussent. Son sentiment d'infériorité envers son frère se développe en soif d'aventures turbulentes qui le pousse à s'extraire du cocon familial. Jonah Hill relate un récit d'apprentissage sans fioritures, parfois sans dialogues, et fait écho à une époque qui éveille une certaine mélancolie.
Bien sûr, la mise en scène y est pour quelque chose. Déjà pour la reconstitution avec bon nombres de références à cette décennie lointaine (marques, styles vestimentaires, musiques,...) mais surtout le format étonnant qu'a choisi le réalisateur pour nous immerger encore plus. En effet, le grain de l'image est marqué et rappelle celles des vieux magnétoscopes avec notamment un effet "fish eye" typique. On sent qu'il retrace un milieu qu'il a côtoyé, et même s'il n'y a pas de coup d'éclat, 90's est parfaitement maitrisé et retranscrit. Son point fort est qu'il reste singulier car il ne compte pas sur les clichés pour nous faire passer un message. Sa narration fluide et réaliste n'impose aucune émotions mais invoque, presque malgré lui, nos souvenirs de notre sortie d'enfance vers l'émancipation adolescente.
Constitué majoritairement d'acteurs novices, les personnages sont drôles, sauvages et originaux. Sunny Suljic, petit héros qui devient grand, passe majestueusement et brutalement de l'insouciance à une assurance plus risquée. Son ascension se veut drôle malgré elle mais aussi soudainement violente. C'est là que se formule tout l'enjeu du film. Seule la mère, jouée par Katherine Waterston, semble programmée pour une seule et même émotion : l'incompréhension colérique.
Jonah Hill signe un très bon premier film, original et évocateur de toute une période ! Mais je ne suis pas sûr de m'en rappeler dans quelques mois pour être honnête... Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il est anecdotique mais son côté simple ne le démarque pas forcément.

alsacienparisien
7

Créée

le 28 avr. 2019

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