"L'éternité c'est long...surtout vers la fin" rappelait Woody Alen (ou Kafka selon d'autres sources). C'est ce que l'on se dit aussi au regard de l'infinie patience du fantôme de A Ghost Story, prisonnier à jamais d'une histoire pas complètement terminée.
Comme tout fantôme qui se respect(r)e, celui-ci est aussi invisible que silencieux, passe-muraille autant qu'imperméable au temps qui passe et d'un long drap blanc vêtu.
Mais à la différence des revenants qui hantent la plupart des films, celui-ci n'a rien d'une terreur.
Aucune animosité à l'encontre des vivants, aucune volonté de terroriser les nouveaux occupants de son ancienne maison, tout juste quelques signes d'agacement histoire de montrer qu'on peut quand même compter sur lui pour faire voler les assiettes et claquer les portes. Non, notre fantôme est plutôt du genre taiseux et mélancolique. Injustement privé d'une belle histoire, il se refuse à la mort. Mais n'étant plus vivant pour autant, le voici condamné à attendre la clé - en l’occurrence un secret caché dans la maison - qui lui permettra enfin de partir vraiment, de faire en quelque sorte le deuil de sa vie.
Portant en lui ce double fardeau - de l'injustice et de la solitude - il campe un personnage particulièrement attachant. Avec ses deux trous noirs en guise de visage et son inaptitude à faire autre chose qu'attendre, il est paradoxalement très expressif et réussit à faire naitre à son égard une réelle empathie.
D'autant que ce fantôme est d'une certaine manière un double de nous-même : lui le spectre, nous les spectateurs, chacun témoin silencieux de la vie qui se poursuit inexorablement dans la maison et sur l'écran. Le fantôme refaisant son histoire (Ghost Story) depuis les débuts là où nous pouvons nous-même rembobiner le film est une des lectures possibles de cet intrigant scénario.
Quant à la mise en scène, elle opère par longs plans fixes qu'accompagne une bande originale absolument somptueuse. Ce rythme très lent et ce manque d'action en refroidiront assurément certains mais pour peu que vous soyez sensibles aux films d'atmosphère et au thème de la mélancolie non seulement vous ne serez pas déçus mais ce film reviendra vous hanter plus tard... comme un gentil fantôme.


Personnages/interprétation : 9/10
Histoire/scénario : 7/10
Réalisation/musique ++ /photo : 8/10


8/10 <3

Theloma
8
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le 29 déc. 2018

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Theloma

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