Dans la peau de Philip K. Dick, un film exigeant et techniquement unique

A Scanner Darkly est l'oeuvre la plus autobiographique de Philip K. Dick, dédiée par lui à tous ses amis morts de la consommation outrancière d'amphétamines, dont le personnage principal, comme l'auteur, a manqué sa vie sentimentale par le passé et qui partage son quotidien sordide avec les camés du même quartier "d'orange county".

L'intrigue principale, si solide, crédible et complexe soit elle, n'est que le prétexte de notre immersion dans le quotidien cauchemardesque, paraoïaque et schizophrène des consommateurs des gellules de substance M. Les dialogues des invraisemblables personnages du film vous paraîtront soit absurdes soit insupportables, selon le degré d'empathie qu'aura généré en vous l'usage de la rotoscopie par le réalisateur Richard Linklater.

La réalisation justifie à elle seule le visionnage du film, tant elle est impressionnante et unique en son genre. Toute la pellicule filmée a été redessinée : des personnages jusqu'aux décors, tout en s'autorisant d'insérer des bulles à la manière d'une bande dessinée.

Nombreuses oeuvres de Philip K. Dick ont été portées à l'écran avec le vocabulaire du film d'action (Total Recall, Payback...). Si certaines ont su conservé le caractère visionnaire de l'auteur (Blade Runner, Minority Report...), elles se sont systématiquement exonérées des tourments pathologiques qu'il insufflait au fil des pages de ses livres.

A Scanner Darkly est l'exception de fidélité qui nous permet de ressentir, par-delà les superlatifs habituels, ce que la vie pouvait être pour Philip K. Dick, visionnaire terrassé par son propre esprit.