A True Mob Story
6.5
A True Mob Story

Film de Wong Jing (1998)

Lorsque j’avais vu A True Mob Story pour la première fois il y a vingt ans, j’avais adoré. J’étais content de voir que Wong Jing était capable de faire autre chose que des bouffonneries (bien que certaines soient excellentes), j’étais content que les triades soient dépeintes sans glorification (là où beaucoup de films en vantent presque les mérites), et puis je n’étais pas très objectif puisqu’il y avait Gigi Leung (Full Throttle, 60 Millions Dollar Man) et que la demoiselle me plaisait bien. Vingt ans plus tard, Wong Jing a fait depuis plein de films sérieux, plein de nouveaux films de triades ont vu le jour et Gigi Leung ne me fait plus du tout le même effet qu’avant. Autant vous dire que, le deuxième visionnage de A True Mob Story aura été plus compliqué bien que le film se laisse malgré tout regarder.


A True Mob Story serait en quelques sortes la biographie un poil romancée de la vie de Charles Heung, acteur à ses heures perdues, un des principaux actionnaires (à l’époque) des boites de production China Star et Wins Entertainment, également membre d’une grosse triade, la Sun Yee On. Quand on lit que le réalisateur / producteur Wong Jing aurait lui-même des connexions dans le monde des triades et que ces dernières n’ont attendu personne pour investir dans le cinéma (soit dans des films, soit dans la production de copies pirates), pas étonnant de le voir adapter un bout de la vie de ce Charles Heung. Pas étonnant également de retrouver au casting un certain Michael Chan, bien connu des amateurs de peloches HK, et lui aussi proche des triades (le film The Club de Kirk Wong serait une biographie de sa vie), tout comme Frankie Ng, également ancien membre des triades. Bref, tout cela pour dire que les triades sont au centre de A True Mob Story, sans glorification donc comme pouvaient le faire certains films de cette époque (Young and Dangerous pour ne citer que lui), avec pour point central le personnage de Wai, interprété par un Andy Lau qui était déjà omniprésent à l’époque. Wai, c’est un peu le chien fou des triades locales, prêt à exécuter tout ce que son boss Prince, joué par Mark Cheng (Invisible Target, Gunmen) lui demande. Un jour, il envoie à l’hôpital et en prison le dur à cuire Crazy Ball, interprété par Ben Ng (Red to Kill, Millenium Dragon), et se retrouve lui-même en prison. Après sa sortie, cinq ans après, il réintègre sa triade, mais la vie y est difficile. Il lui est difficile de gagner de l’argent même en cogérant une usine de VCD piratés, les petits jobs de son boss l’envoient régulièrement au tribunal, son fils a un comportement difficile depuis la mort de sa mère, et pour couronner le tout, Crazy Ball cherche à se venger de l’affront que Wai lui a fait subir, et un flic, joué par Alex Fong (Overheard, la trilogie Angel), cherche à démanteler leurs trafics. Wai trouvera un peu de réconfort aux côtés de son avocate Sandy (Gigi Leung), et de celle qu’il connait depuis toujours, Ruby Kwan, jouée par Suki Kwan (Blood Rules, High Risk), qui s’occupe de son fils lors de ses absences. A True Mob Story met donc en scène une tranche de vie du personnage de Wai, alternant scènes dramatiques, combats entre membres des triades, moments intimistes, moments romantiques, et règlements de comptes.


A True Mob Story va souffler le chaud et le froid. Déjà, en termes de mise en scène, Wong Jing va tantôt faire preuve d’un réel sens de l’image, tantôt nous pondre des effets numériques absolument dégueulasses (la femme de Wai qui se fait renverser). On va avoir des scènes d’une grande puissance (le flic infiltré qui laisse Wai s’échapper) et d’autres qui vont verser dans la mièvrerie la plus totale (certains moments entre Andy Lau et Gigi Leung). Certaines très bonnes idées vont être immédiatement désacralisées par des clichés grossiers. Les scènes d’action où les membres des triades s’affrontent sont sèches, brute et bien violentes ; les scènes plus intimistes, dramatiques, ne fonctionnent pas toujours, surtout lorsqu’elles tombent dans une mièvrerie de bas étage (la scène finale larmoyante sur fond de canto pop). Même chose pour le casting avec des personnages plutôt travaillés, interprétés par des acteurs solides (Michael Chan, Suki Kwan), et d’autres moins recherchés et joués par des acteurs dont le jeu sonne faux (Gigi Leung, Andy Lau même parfois). Le scénario arrive quelques fois à nous surprendre, comme lorsqu’il nous présente la vie des triades pas facile, avec des personnages qui n’arrivent pas à sortir de leur statut de petite frappe, qui n’ont même pas de quoi se payer un avocat ; et se vautre d’autres fois dans des rebondissements téléphonés au possible (le témoin surprise du tribunal lors de la scène de fin). Ne vous méprenez pas, A True Mob Story reste malgré tout plaisant et, malgré ses quasi 2h au compteur, permet de passer un moment sans ennui et plutôt agréable. Mais il est l’exemple même de tout ce que Wong Jing est capable de faire bien et de tout ce qu’il est capable de rater en un seul et même film. Si vous avez envie de voir un meilleur film de triades du réalisateur, penchez-vous plutôt sur des bobines telles que Chasing the Dragon (2017), certes imparfait lui aussi mais bien plus homogène.


A True Mob Story n’est pas la grande réussite de Wong Jing de mes souvenirs. Possédant autant de qualités que de défauts, on passe malgré tout un agréable moment en compagnie de toutes ces têtes du cinéma de Hong Kong.


Critique originale avec images et anecdotes : DarkSideReviews.com

cherycok
6
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le 14 sept. 2021

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