Réaliser un space opera "réaliste" de nos jours, je vous jure que ce ne doit pas être facile. Quel en sera l'angle d'approche ? Si vous essayez d'y mettre des sentiments, de parler de l'amour qui explose, telle une supernovae, dans le vide et la solitude, on se moquera de vous pour votre côté sirupeux. Interstellar en sait quelque chose avec sa résolution basée sur l'attachement entre un père et sa fille.


Mieux vaut sans doute proposer une œuvre plus froide, analytique. Ça avait bien marché avec 2001, après tout. Mais pas avec Ad Astra. Les gens s'emmerderont et diront, sans doute à raison, que de belles images ne suffisent pas à faire un film. Il n'y a pourtant pas que ça dans le film de James Gray. Il y a un vrai fond. Seulement, ce dernier n'est pas surexpliqué, surinterprété.


Le héros joué par Brad est un homme d'une grande sécheresse intérieure, qui croit pouvoir trouver des réponses dans l'éloignement et l'isolation, exactement comme son père auquel il ne veut pourtant pas ressembler. Le cadre spatial est en parfaite cohérence avec la progression intime du personnage. Dans Interstellar, on avait des gens qui pleuraient à chaudes larmes. Dans Ad Astra, un homme et ses pensées flottent dans un dénuement de plus en plus appuyé à mesure que le film déroule son implacable logique.


C'est sobre, parfois peut-être trop. Quelques moments d'action, improbables dans un tel contexte, font des concession à l'aspect "auteurisant" du film. L'équilibre n'est sans doute pas parfait, mais je me suis personnellement senti bercé par la beauté et le calme de nombreux passages très réussis. Ad Astra peut être un bon support cinématographique aux méditations de son spectateur si ce dernier parvient à entrer dans le film, jusqu'à son audacieuse conclusion: celle de la déception. D'un ailleurs en forme d'illusion. Inutile de rêver d'infini à travers la science ou l'art si l'on est incapable de régner sur sa propre vie.

Amrit
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le 19 janv. 2020

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Amrit

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