Rome. On l’avait connue toute puissante chez Wyler, en guerre chez Rossellini ou encore sublimée dans la mondanité chez Fellini, mais on ne l’avait jamais vue affreuse, sale et méchante comme c’est ici le cas chez Scola. D’abord imaginé sous forme de documentaire, il a choisi l’humour pour filmer cette famille de 24 personnes entassée dans une des borgate de la périphérie de Rome – sorte de bidonville apparues dans les années 50, résultat de la trop grande expansion de la capitale.


Le décor qu’il filme n’a a priori rien de drôle, mais en voyant cette famille essayer d’assassiner Giacinto, chef de famille avare qui cache son million de lire au lieu d’en faire profiter sa famille, et qui n’hésite pas à inviter une prostituée à venir dormir dans le lit conjugal, on ne peut s’empêcher de rire. Même si tout est répugnant, même si cette famille est cruelle et immorale, on rit.


Certains seront peut-être dérangés par l’humour parfois grinçant du film - on pense notamment à la scène du repas où toute la famille regarde Giacinto manger son plat de pâte assaisonné à la mort-aux-rats, attendant de le voir s’empoisonner. D’autres le seront peut-être par les personnages eux-mêmes, répugnants, immoraux et vicieux. Mais c’est précisément cet aspect déroutant qui en fait une comédie marquante, que l’on souhaite voir et revoir.


Au-delà de l’aspect comique de l'œuvre, Scola dépeint un portrait tout de même très réaliste des borgate romaines, bien que celles qu’il ait utilisées ont été construites pour les besoins du film. Le but était d’apercevoir la basilique Saint Pierre, créant ainsi un plus grand décalage avec la beauté de Rome. Comme avait pu le faire Pasolini pour Mamma Roma, Scola fait le choix d’un casting formé exclusivement d’amateurs et d’habitants des borgate, à l’exception de Nino Manfredi, fabuleux dans le rôle de Giacinto. Empreint d’une certaine fatalité, le film est en fait avant tout une critique du consumérisme et du néocapitalisme.


En somme, Affreux, sales et méchants est une comédie acerbe non dénuée d’un certain réalisme, évitant ainsi de tomber dans toute forme de caricature un peu lourde et grossière.

lucilecailly
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le 27 avr. 2021

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