Déjà condamné sur la foi de quelques images aux effets approximatifs, et de tweets crétins de pisseuses émotives, cet Aladdin new look venait alimenter la complainte désormais routinière des habituels gardiens du temple Disney.


Pour de mauvaises raisons, donc.


Entendons-nous bien, les amis. La séance n'a pas été désagréable. Tout le début du film, ainsi que certains passages archi obligés, donnent même le change et font inscrire un sourire sur le visage du spectateur. A ce titre, revoir toute la scène de vol en tapis en réentendant Ce Rêve Bleu, ou encore Prince Ali et sa superbe parade aux milles couleurs fait renouer avec quelques uns de nos plus beaux souvenirs d'enfance.


Mais à côté de cela, les ajouts inutiles alourdissant le rythme du film, et les modifications scénaristiques initiées, histoire de flatter l'air du temps et le girl power, pourront apparaître comme déplacés, voire totalement à côté de la plaque... Soit exactement les mêmes tares dont était affligé le remake boursouflé de La Belle et la Bête, tiens.


Quand ça veut pas...


Ainsi, voir Aladdin se débattre dans une histoire de compote pour séduire sa belle pourra mettre mal à l'aise, ou faire naître un soupir de dépit, tout comme cette soirée dancefloor parfois embarrassante, ou encore cette sous intrigue amoureuse sortie de nulle part entre la servante du palais et un génie priapique...


Mais le plus grave, certainement, c'est la totale absence de magie de l'oeuvre originale qui se dessine comme le plus gros défaut de cet Aladdin 2019. Il est frappant, à ce propos, de se souvenir, pendant la redite de Je Suis ton Meilleur Ami, de la réinterprétation de C'est la Fête innervant La Belle et la Bête : mêmes effets spéciaux, même direction artistique superbe, notes et intonations similaires... Mais ce qui emportait immédiatement en animation reste désespérément plat et peu concerné en retranscription live, faisant douter de la pertinence de la politique de remakes purs de la souris aux grandes oreilles...


Cette absence de magie est malheureusement doublée de l'oubli quasi criminel du grain de folie contagieuse qui emportait tout sur son passage : Abu et Iago, délicieux de drôlerie, sont aujourd'hui dénués de toute saveur. Et si Will Smith ne démérite pas en génie, il se trouve à des lieux des interprétations survoltées de Robin Williams et Richard Darbois...


Jafar, lui, est à ce point insipide qu'il perd instantanément tout son charisme et sa perfidie mielleuse originelles dès qu'il apparaît à l'écran. Alors même qu'essayer de lui donner un passé proche de celui de son antagoniste était plutôt bien vu.


Reste Jasmine qui, empruntant le très charmant visage de la mignonne Naomi Scott, si elle magnétise la caméra, oscille entre son personnage d'origine et une évolution obligée par un progressisme tarte à la crème des plus dommageables. Alors même que ses aspirations auraient pu être traitées comme un complément idéal des préoccupations du film de 1992.


Mais manque de bol : si la faire devenir sultane aujourd'hui caressera sans doute dans le sens du poil les lobbyistes les moins regardants, Disney conservera son caractère parfois simplet, voire nunuche, tout en ne résistant pas à la faire chanter comme une aspirante candidate approximative à un concours de hurlements digne d'un The Voice en pleine nuit d'Arabie... Plutôt problématique, comme la recherche de l'assentiment de son cher Daddy au mariage...


Tous ces défauts mis bout à bout et ces surlignages inutiles sauteront sans doute aux yeux de ceux dont le Aladdin originel a bercé l'enfance. Quant à ceux qui n'ont pas connu cet âge d'or, ou qui feront l'effort de ne pas comparer l'incomparable, ils passeront sans doute un plutôt bon moment, cependant dénué de caractère ou d'identité, Guy Ritchie s'étant pour le moins effacé pour le coup.


Tout cela me ferait presque dire que cet Aladdin ne risque pas d'atterrir dans la caverne aux merveilles...


Behind_the_Mask, qui a une petite idée de comment utiliser son troisième souhait...

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le 25 mai 2019

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