Albator, corsaire de l'espace
5.8
Albator, corsaire de l'espace

Long-métrage d'animation de Shinji Aramaki (2013)

J’allais voir Albator un peu comme Arthur serait sur le point de découvrir le Saint-Graal, comme une apothéose sur laquelle aboutiraient des années d’attente. J’avais tout de même quelques appréhensions liées au fait que le film serait sans acteurs, mais en tout numérique. Ce genre de choses peut bien passer du moment qu’on utilise un minimum de motion capture, pour que les émotions passent à travers les expressions du visage. Bref, à la lecture de ce texte, peut-être ne comprendrez-vous pas une note aussi élevée que six, mais dites-vous qu’avant même d’aller le voir, j’étais parti pour lui mettre un dix d’office, la chute n’en a été que plus rude, bien fait pour moi.

J’évacue d’entrée les deux ou trois points positifs qui valent cette note de six. Une histoire respectueuse de l’univers sombre et désespéré du dessin-animé original, pas de vraie surprise mais un esprit qui est bien présent. Les images sont, elles, splendides, c’est coloré à souhait, l’animation est fluide et le vaisseau est encore plus beau qu’aux origines. Petit problème tout de même, certaines images très, mais alors très léchées ressemblent beaucoup trop à des wallpapers. C’est certes très joli mais, sans âme ni personnalité, les scènes de combat sont heureusement là pour tirer le tout vers le haut et assurent un vrai spectacle de qualité. Dernier bon point pour les messieurs, une scène de nue courte mais fort agréable qui laisse penser qu’on pourrait bien arrêter de demander à des actrices de tourner des films pornographiques, pour qu’ils soient totalement virtuels. Le diable étant dans les détails, cette scène débute et s’achève sans raison, comme s’il fallait en placer une quelque part.

La déception est comme la vérité : ailleurs. Albator est sur le fond un film ambiguë, une histoire clairement destinée aux grands enfants ayant pu suivre la série lorsqu’ils étaient plus jeunes, en résulte un côté mélodramatique constant et beaucoup trop insistant. La série originale était certes sombre, mais se donnait le temps de respirer par des scènes et des traits d’humour. Ici rien de tout ça, le film se prend très, trop au sérieux et se refuse la moindre touche d’humour, nous livrant une galerie de personnages animés seulement par la haine ou le désespoir, l’ambiance s’en ressent un tantinet. Paradoxalement, il reste quelques aspects grossiers de la série pour enfants. A savoir quelques scènes aux traits forcés par exemple lorsqu’ils la voient apparaître, disant chacun à leur tour : « La terre !» de manière très appuyée et beaucoup trop mélo, comme si nous n’étions pas assez mûrs pour comprendre. Voici donc un film pour adultes, s’adressant aux enfants que nous étions, mais qui ne nous aurait pas vus grandir.

Mais le défaut majeur, celui qui casse vraiment le jouet, c’est l’animation des visages qui ne s’est pas faite en motion capture et qui tente alors de faire passer les émotions, parfois très nuancées, par les seuls sourcils et les rictus de la bouche. Les visages ressemblent alors à des masques de cire qui ennuient par leur rigidité. Comme si ça n’était pas assez, un doublage en Français plus que discutable vient ajouter une touche finale au manque de crédibilité des « acteurs » numériques et rend le fond de l’histoire fade car porté par des poupées sans vie. Le pire étant probablement Albator qui passe le film à faire la tronche, caché derrière ses cheveux. Tout cela vient se diluer dans une bande originale qui a perdu le côté épique qui portait les enfants que nous étions dans la série, des airs que, vingt-neuf ans après, nous sommes encore capable de siffloter quand nous oublions ceux du film sitôt qu’on les entend.

Je suis triste, j’avais des espoirs immenses dans ce film, persuadé que c’était mon rêve rien qu’à moi qu’on accomplissait. Je regardais de haut ceux qui, à l’entrée du cinéma, allaient voir une horreur quelconque, forcément moins bien et indigne du corsaire balafré. Je me suis fait avoir, j’ai réagi comme l’enfant que je suis resté, trop enthousiaste pour imaginer qu’Albator puisse ne pas être le plus grand chef-d’œuvre du Septième Art. J’ai remis rapidement les pieds sur terre, mon enthousiasme a été douché et j’ai décidé de plutôt revoir Space Battleship qui semble finalement plus abouti.
Jambalaya
6
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le 27 déc. 2013

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Jambalaya

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