Un numéro d’équilibriste que Ridley Scott manie moins bien que son emballage mais qui reste palpitan

« Prometheus » avait totalement divisé les fans de la saga « Alien ». Pour certains, dont je fais partie, c’était un chef-d’œuvre plastique et thématique qui renouvelait complètement la mythologie de la saga en posant un nombre incalculable de nouvelles questions passionnantes tout en proposant des réflexions métaphysiques très excitantes. Pour ses détracteurs c’était un film raté et prétentieux, qui posait plus de questions qu’il ne donnait de réponses, bourré d’incohérences et trop éloigné de la base de la tétralogie originale. Ce « Alien Covenant » s’avère davantage un trait d’union entre les deux en se rapprochant davantage du tout premier film. Néanmoins, il a peut-être un peu trop ses bobines entre deux fauteuils !

Ce qu’on ne peut lui ôter, c’est que son esthétique est une nouvelle fois splendide et an adéquation avec « Prometheus ». Ridley Scott prouve, s’il était encore nécessaire de la faire, son statut d’excellent metteur en scène toujours apte à créer des images sublimes. Les tons grisâtres de la photographie, les décors choisis et l’ambiance anxiogène de ce nouveau film sont inattaquables. On est également satisfait de l’évolution du bestiaire proposé et de scènes bien gores revenant aux passages obligés de la saga. Quant aux effets spéciaux proposés, nobles et discrets, ils sont impeccables à l’instar du design des créatures et de certains plans dans l’espace ou sur la nouvelle planète, tous d’une beauté stupéfiante. On ne s’ennuie pas une seule seconde bien que la trame générale soit celle, inamovible, de ce type de films mêlant science-fiction et horreur, eux-mêmes tous inspirés du premier « Alien ». On est également content de trouver des réponses à certaines questions posées par « Prometheus » mais…

Cet opus est beaucoup moins réussi que ce dernier ou « Alien » car il se retrouve obligé de raccrocher les wagons entre les deux et ne le fait pas toujours de la meilleure des manières. Surtout dans le sort réservé par le scénario à la partie passionnante concernant les Ingénieurs et à Elizabeth Shaw. L’histoire part dans un délire mystique qui était plus contenu précédemment et frôle parfois le ridicule (l’arrivée à la Skywalker de David). De plus, on a vraiment de plus en plus de mal à suivre (et comprendre) la méthode de reproduction des aliens qui devient clairement trop emberlificotée. Quant aux scènes de terreur pure, elles sont trop courtes et espacées si l’on met de côté la toute première attaque simultanée des deux nouvelles bestioles, un moment d’anthologie et de stress dans la saga. Mais ce qui cloche le plus dans ce nouvel épisode, ce sont les personnages sans aucun charisme incarné par un casting très moyen et interchangeable, juste là pour se faire dévorer. Certains d’entre eux n’ont même pas une ligne de dialogue et parfois leurs réactions sont incohérentes.

Au final, on sort de la salle avec des embryons de réponses pas toujours satisfaisants, des questions supplémentaires et une mythologie qui se complexifie encore plus. Mais on passe tout de même un bon moment grâce au savoir-faire technique et visuel de Monsieur Ridley Scott et pas mal d’images époustouflantes. On ose espérer que pour la suite il sache où il veut en venir. Et surtout qu’il nous ponde une histoire digne de ce nom gommant les scories de cet épisode et reliant tous les films entre eux de manière limpide et logique. Ce qui n’est pas gagné. Dans tous les cas, cette mythologie et la créature la plus célèbre du septième restent toujours agréables à regarder dans une film imparfait et peut-être le moins stimulant de la saga (avec « Alien 3 »). Une série B de luxe en somme, mais bien au-dessus de bon nombre de blockbusters estivaux par les thématiques qu’il évoque sans toujours néanmoins les maîtriser.