Hey Ridley, ta terre sainte, c'est de l'arnaque !


Mon nom est Ozymandias, Roi des Rois. Voyez mon œuvre, vous puissants, et désespérez !" De cette colossale épave, infinis et nus, Les sables monotones et solitaires s'étendent au loin.



Prometheus a métamorphosé positivement ou négativement la franchise Alien en lui offrant un nouveau cap transformant la terreur brute et primaire, en une crainte existentielle dans une texture maladroite, pour parler philosophiquement de la nature humaine ainsi que de celle de Dieu. Une recherche poétique sur la relation ambiguë et fragile entre la nature et le genre humain. Un côté philosophique de la science-fiction qui avait le potentiel pour être grandiose, mais qui n'a pas su concrètement s'affirmer. Alien : Covenant emprunte le même schéma thématique commencé avec Prométheus. On retrouve une configuration amenant un lot d'énigmes et de perspectives dépassant le cadre de simple spectacle, apportant des éléments sur la création, l'existentialisme, le degré de science et de divin, dont je suis beaucoup plus en clin à admirer car la structure bas beaucoup moins de l'aile que l'opus d'avant, même si c'est encore loin d'être parfait.


Pour Covenant, chaque élément se présente comme une égérie empruntant ses références aux déités grecques et bibliques (jusque-là pas de problème) sous une forme tellement grasse et contextualisé voulant à tout prix tout rapporter à ses caractéristiques philosophiques que cela en est par moments certes intelligent, mais aussi trop plonbant et lourd, ce qui amenuise considérablement la qualité du long-métrage. Pour sa première apparition, aller jusqu'à faire naître un bébé alien telle une figure divine faisant la croix du seigneur ne manquant pas au passage de projeter un gros smile, c'est vraiment pousser l'inspiration à l'extrême jusqu'à atteindre le parjure et le grotesque. La saga Alien originalement axée sur une atmosphère oppressante, une horreur graphique, des personnages travaillés et des scènes d'action marquantes, perd en partie tout ceci dans la nouvelle approche du cinéaste, pour beaucoup plus de réflexion et de schématisation, qui a ce niveau de profusion n'ont plus vraiment leurs places dans cette saga.


Heureusement, Alien : Covenant possède des points positifs venant contre-balancer la vision extrême du réalisateur comme avec ces beaux visuels déjà présents dans Prometheus mais qui sont ici mieux développé et plus en adéquation avec la franchise Alien (tout comme la technologie qui cadre mieux avec la saga offrant enfin un peu de cohérence), mélangeant une beauté épurée à une aura inquiétante. Les différents plans offrent des parallèles visuels intéressant et référencé comme avec Les derniers jours de Pompéi, Crusoé, la noyade d'Ophélie de Millais, le poème d'Ozymandias de Percy Bysshe Shelley ou encore le jardin des délices terrestres de Bosch, Wagner, Michelangelo... dommage que cela soit trop surchargé. Les effets spéciaux sont saisissants, la mise en scène bien que pas toujours intelligente, offre des cadres efficaces avec des plans séquences rondement menées. La composition musicale dans une tonalité étrange et difforme appuie efficacement les diverses séquences, offrant un contraste plus atmosphérique. J'adore Hans Zimmer, mais la partition musicale de Jed Kurzel est bien plus efficace, clairement imprégnée (mais pas copiée) sur la musique du film original de Jerry Goldsmith.



Tu as le choix mon frère. Eux, ou moi. Vas-tu servir au paradis, ou régnier en enfer ? Quel est ton verdict ?



En comparaison de Prometheus, le casting et le développement des personnages sont bien mieux mis en valeur. On retrouve l'excellent Michael Fassbender qui offre un double rôle exceptionnel avec le retour du synthétique David et celui de Walter. Le comédien est toujours aussi intense, néanmoins bien que j'ai trouvé ce David bien mieux développé et dépeint, je dois reconnaître qu'à la longue son côté très shakespearien me gonfle, même si j'aime le fait qu'il se prenne pour Dieu. David en fait des tonnes, là où Walter est bien plus dans la retenue, ce qui ne l'empêche pourtant pas d'offrir une subtile palette dramatique très intéressante. Katherine Waterston dans le rôle de Daniels offre une véritable figure héroïque qui fait du bien à regarder. Elle apporte de la dureté et de l'assurance, ainsi que de la sensibilité et des doutes à travers un rôle rappelant un peu celui de Ripley. Bien moins illuminé et simplet dans son raisonnement que Shaw (Noomi Rapace) héroïne de Prometheus qui dans Covenant payera son idiotie et sa foi inébranlable qui la conduira à une mort abominable (ce qui n'est pas pour me déplaire).


Billy Crudup dans le rôle de Christopher le commandant est finalement celui qui engendrera le premier alien. Le personnage tout comme Shaw est croyant et ce que j'aime avec celui-ci, s'est qu'il est bien moins illuminé, amenant plus de fermeté et de raisonnement à ce personnage ambigu. Danny McBride sous les traits de Tennessee réussit à bien se débrouiller avec le peu d'espaces qu'on lui laisse. Les autres personnages sont peu esquissés et donc très anecdotiques, seuls "Maggie" (Amy Seimetz) femme de Tennessee et "Karine" (Carmen Ejogo) offrent un petit moment d'horreur sanglant efficace. La prise constante de décision stupide et frustrante des personnages qui était dans Prometheus est le point noir qui empêchait de se connecter correctement aux protagonistes ainsi qu'au récit, fort heureusement il est ici un peu mieux maîtrisée, même si des stupidités subsistes (mais c'est moins flagrant).


Le scénario bien que décousu dans son rythme et son ambiance, présente un récit mieux maîtrisé que celui de Prometheus qui malgré ses nombreuses références philosophiques fortement surchargées, part moins dans tous les sens. Il y a quelques moments intenses et effrayants que l'on doit aux 63 premières minutes du film qui pour ma part tiennent de l'excellence. Jusqu'à l'arrivée dans les ruines de l'ancienne civilisation des ingénieurs avec le fameux plan-séquence magistral entre David et Walter. Puis c'est alors que le drame opère. Si la première partie est excitante avec une tension et un suspense authentique avec des péripéties mouvementées, sa seconde est plus sporadique et bien moins structurée avec des choix scénaristiques très douteux. Bien que la seconde partie mérite d'avoir enfin fourni des réponses à certaines questions laissées en suspens dans Prometheus, le choix de dégager d'un revers de la main les ingénieurs me laisse très perplexe. Sachant que les ingénieurs de ce film ne ressemblent pas beaucoup à ceux de Prometheus. Si Covenant aurait su maintenir l'excellence de sa première moitié, ce film aurait pu être grandiose, c'est frustrant.



Rien ne va plus (SPOILER) ##



La manière dont David attire Christopher près de l'oeuf me fait toujours autant marrer, impossible que quelqu'un se fasse avoir en vrai par un plan aussi grossier. Ce qui est drôle c'est que juste avant David montre qu'il est un savant fou, insistant en plus sur le fait qu'il lui manque une matière première pour finaliser ses expériences. Sachant que juste avant, il précise que la mixture ne peut s'attaquer qu'a de la chair. Si ce n'est pas clair. Manquait plus qu'une grosse pancarte avec écrit dessus : "je suis le grand vilain et je vais vous piéger". Du coup, que dire de Christopher qui fait preuve d’une naïveté surprenante en se penchant au-dessus de l’oeuf sous les conseils de David qu’il qualifiait quelques secondes plus avant de : "diable". Je me répète, mais l'affront de cette scène m'y oblige : la manière dont l'alien original vient au monde en se prenant pour Jésus tout en faisant un bon gros sourire me donne envie de vomir.
Pour terminer, les deux Aliens du film qu'on attendait depuis Prometheus initialement créé pour présenter ceux-ci, sont ridiculement vaincus en moins d'un quart d'heure et avec une facilité déconcertante, sans avoir provoqué de grand moment de frisson. Ils sont passés inaperçus.


Le visuel, les effets spéciaux, ainsi que la mise en scène autour de l'alien original sont vraiment décevant. Ironiquement, l'alien original tient moins bien la route que les deux néomorphes blanc qui sont superbement mis en scène dans des séquences particulièrement éprouvante, horrifique et tragique. Ce n'est pas la lassitude de revoir une fois de plus les aliens qui est la cause de cette déception, mais bien l'introduction de ceux-ci qui est un vrai ratage, que dis-je, "foirage". Tout ça pour seulement ça ! Deux films pour arriver à cette conclusion sur la création et l'introduction des aliens, ce n'est vraiment pas à la hauteur. J'ai eu l'impression de me faire arnaquer. La condescendance selon Ridley Scott, dans toute sa démesure ! Et après on s'étonne qu'on le trouve prétentieux.


Vient enfin la fameuse grande révélation finale qu'on voyait venir à des kilomètres : "Walter était en fait David !" La mise en scène autour de l'affrontement sympathique entre David et Walter conclue sur une scène tellement loupée qu'on ne pouvait que savoir que Walter ne s'en était pas sortie. Suspens 100% foiré. Arrive juste après la séquence finale qui me fait toujours autant rigoler et crier au scandale, montrant que David avait au préalable ingurgité des xénomorphes miniatures (Alien Pocket) pour les régurgiter afin de les stocker dans un système de réfrigération de foetus humains, qui comme par magie est parfaitement adapté à la taille de ses xéno-pocket. Une facilité tellement déconcertante que cela laisse une très mauvaise sensation finale, surtout que la séquence bien présentée avait tout pur finir en apothéose. Qu'on ne vienne pas me dire que ce n'est que secondaire !


CONCLUSION :


Alien Covenant sans sort bien mieux que Prometheus en présentant un récit plus cohérent avec des personnages un peu moins bras cassés et plus marquant (même si). On retrouve le superbe esthétisme visuel du cinéaste qui n'a pas pu s'empêcher de remettre une très grosse couche de message philosophique et poétique sur le divin et l'humain. Passé l'excellente première heure, Ridley n'a malheureusement pas pu s'empêcher de remettre un coup d'instabilité grossière made in Prometheus. Un film présentant les origines de l'alien en les foirant totalement, dans une conception du xénomorphe frôlant le désert, fallait le faire. Covenant n'est certainement pas une oeuvre horrible, mais cela reste tout de même une déception. Quel dommage, le potentiel était pourtant là. Néanmoins, il reste une symphonie de noirceur d'une violence inouïe que je tiens à saluer, du moins, pour sa première heure remarquable qui est à l'origine de mon 6/10.


J'ai vu la terre sainte, et bien que l'entrée fût lumineuse et resplendissante, une fois les portes franchies je n'ai pu que constater le néant.



Faris, la chance c’est pas mon truc. Je préfère la compétence et la préparation à la chance. Observation, réflexion, foi, ténacité. Nous éclairerons le chemin à mesure qu’il se dévoile.


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le 22 oct. 2020

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