Sigourney Weaver dans le rôle de sa vie : chapitre 4

Quatrième film, quatrième réalisateur avec une vision forte et singulière. Avant de succomber à l'appel du crossover décérébré avec les Prédators, la franchise Alien avait le mérite de laisser transparaitre la sensibilité de ses réalisateurs.

Nous nous retrouvons 200 ans dans le futur (enfin on y était déjà avant, mais là c'est un futur d'autant plus loin de 200 ans), avec des militaires et savants fous, un équipage de pirates de l'espace, une lieutenant Ripley clonée, à l'ADN corrompu par son exposition aux aliens, devenue surpuissante, sensible télépathiquement aux monstres qu'elle considère désormais comme ses enfants, elle est aussi un peu nihiliste, et quelque part très blasée. Sacré cocktail pour une Sigourney Weaver qui se donne à fond dans son rôle, étoile lumineuse que ce soit dans ses interactions avec ses bébés xénomorphes, face aux débris des autres clones ou dans un jeu de tension/séduction permanente avec Winona Ryder.

Jean-Pierre Jeunet redéfinit son héroïne, redéfinit le rapport aux monstres en leur donnant non seulement une voix, un instinct maternel à défaut de sentiments, mais aussi en les opposant à des scientifiques en images d'épinal du savant fou (laissant en pâtures de pauvre âmes devant les œufs d'alien). Ainsi, on éprouvera un plaisir pervers à voir l'alien appuyé sur le même bouton qui servait à le torturer pour infliger à ses geôliers son sort. Parce que l'Alien est redoutablement dangereux et intelligent dans ce film, s'échappant à coup d'acide, tendant des guet-apens, etc. On renoue avec le monstre-chasseur d'Alien premier du nom!

Mais pour autant on est à des kilomètres du survival, avec un ton de série B assumé, une certaine auto-dérision calculée (la séquence très rigolote du basket entre autre exemple). Si ce n'est pas dérangeant, la progression linéaire du script à partir de l'évasion des Aliens - elle - ennuiera davantage. On aura bien quelques séquences se démarquant par moment, dont une péripétie aquatique qui a le mérite d'innover, quelques twists par moment (un robot en infiltration parmi les personnages que l'on suit, le monstre final qui forcément surprend et perturbe, la menace qui plane sur la Terre pour rajouter un peu de tension), mais dans l'ensemble reste cette sensation de suivre une progression linéaire à travers des couloirs ternes.

Ni réussi ni raté, "Alien La Résurrection" mérite pleinement le détour en temps qu'objet filmique à part entière, empreint d'une certaines poésie monstrueuse très glauque. Au sein de la saga, il mérite également sa place, reprenant certains codes qu'on a pu apprécié dans les autres opus. Néanmoins, il n'est pas suffisamment convainquant pour s'intégrer comme opus incontournable eu égard à une trilogie dont je suis particulièrement fan.