• Tu es là Ripley ?

  • Oui.

  • Nous sommes décontaminés, laisse-nous entrer.

  • Qu'est-ce qui est arrivé à Kane ?

  • Quelque chose c'est accroché à lui. Il faut l'emmener immédiatement à l'infirmerie.

  • Quel genre de chose ? Donne une définition claire.

  • C'est un organisme. Ouvre le sas.

  • Attends une minute. Si nous le laissons entrer l'appareil peut être infecté. Tu connais la procédure de quarantaine. 24 heures de décontamination.

  • Il peut mourir en 24 heures. Ouvre le sas !

  • Ecoute-moi. Si on applique pas la quarantaine, on peut tous mourir.

  • Enfin, est-ce que tu vas ouvrir cette saloperie de sas ! Il faut tout de suite le faire entrer.

  • Non, je ne peux pas. Et si vous étiez à ma place vous en feriez autant.

  • Ripley c'est un ordre. Ouvre immédiatement le sas !

  • Oui.

  • Je te dis que c'est un ordre ! Tu as entendu ?!

  • Oui. J'ai très bien entendu, la réponse est négative.

  • J'ai ouvert le sas.



Ridley Scott réalise avec Alien le 8ème passager un des meilleurs films de science-fiction de tous les temps. Une pièce horrifique savamment conçue, d'une originalité sans failles que l'on doit au cinéaste ainsi ""que l'excellente équipe entourant celui-ci (malheureusement trop vite oubliée)"", qui auront réussi à créer une histoire d'horreur radicalement différente et innovant autant dans la conception du monstre que la structure entourant toute l'intrigue. Alien est un film d'horreur sinistre et viscérale, un grand classique du genre mettant en avant la culture du viol via un organisme extraterrestre. Une approche majeure et très nuancée de la sexualité en apparence absente, mais clairement présente et persistante, nous interrogeant sur nombre d'aspects. Tout cela nourrit sans effort la peur viscérale et abjecte que représente cet alien.


L'intelligence de l'intrigue est si stupéfiante qu'elle parvient à nous livrer une synthèse tout en simplicité sur la complexité et la richesse d'un film d'horreur à travers un huis clos rempli de terreur, claustrophobiquement authentique, brillamment tracée et présentée par la cinématographie et le montage fantastiques de Scott. La mise en scène est tout à fait fantastique. Ridley Scott présente un travail formidable avec un jeu de caméra astucieux et réfléchis faisant ressortir chaque émotion directement de l'écran, tirant le ton de manière drastique, ce qui a pour conséquence une aspiration totale du spectateur rudement éprouvé par les différentes séquences. Des longues prises ingénieusement mises en scène, alimentant tout du long une tension qui monte crescendo rendant le tout étouffant par son ambiance, ainsi que la peur ressentie par les personnages qui s'en trouve grandement partagé car largement palpable. Un art de faire faisant grouiller de suspense le long-métrage, gardant jusqu'à la fin le spectateur éveillé et concentré une boule à l'estomac.


Alien c'est également un travail fantastique autour de son cadre qui prend des allures de maison hantée sur un vaisseau spatial dont il semble impossible de sortir. Aucun moyen d'échapper à cette horreur intérieure qui découle du vaisseau «le Nostromo», un navire de fret détenu et exploité par une compagnie minière peu scrupuleuse. Le Nostromo est un parfait habitat horrifique, dégageant une aura anxiogène aux consonances fantomatiques. Avec son aspect vieillot, lugubre, sale, avec une humidité constante ressortant des décors transpirants (ainsi que des personnages dégoulinant d'une sueur d'effroi sans oublier la langue de l'alien), ainsi que ses longs et profonds couloirs sombres où n'importe qui ou quoi peut s'y cacher, l'angoisse s'avère incroyablement alimentée. Ajoutons à cela que nous ne voyons que furtivement l'alien ce qui alimente notre esprit torturé qui devra attendre la fin du film pour clairement mettre une forme dessus. Les flashs rapides des mains griffues, de la queue, du dos cornu, ou encore de la tête avec la bouche et cette fameuse langue dégoulinante, sont si brefs et si déroutants que cela ne fait qu'ajouter encore plus d'horreur à cette horreur déjà bien fournie. La conception de l'alien jusqu'aux scènes se déroulant hors du Nostromo, met en valeur habilement le caractère visuel d'un monde inconnu via le savoir-faire indéniable de H. R. Giger qui conjugue à merveille l'art organique à celui de la cybernétique.




  • Moi je crois qu'on devrait le réfrigérer. Il a un mal qu'on connaît pas. Vos mieux stopper la progression. Une fois rentrer on le laissera voir par un docteur.

  • Ouais.

  • Chaque fois que Parker dit quelque chose toi tu dis « ouais », Brett, tu t’en rends compte ?

  • Ouais.

  • Parker, ça te plaît d’entendre ton équipier passer son temps à dire ouais, comme un vulgaire perroquet ?

  • Beh réagis mon petit, tu crois que t’es un vulgaire perroquet ?

  • Ouais.



Alien le 8ème passager utilise à merveille le son pour alimenter sa fresque effroyable, via une bande-son postmoderne (confiée pour l'essentiel à Jerry Goldsmith) épouvantablement obsédante et mémorable, ainsi que l'excellent fond sonore des éléments qui sont impeccables. Le film joue remarquablement du bruit de ses décors, dès la scène d'ouverture on est plongé dans un espace au son étouffant, pour finalement être rejoint par "Maman" l'ordinateur de bord du Nostromo qui commence à alimenter les systèmes du navire plongé en sommeil. Même si cette scène d'ouverture ne consiste en rien d'autre que des effets sonores provenant de l'espace et du matériel immobile, elle grave définitivement le contraste en posant une atmosphère bourdonnante perceptible. D'autres son plus flippant les uns des autres se feront entendre, comme : les crie de la pauvre Lambert agonisante ajouté aux pulsions d'excitation qu'émet l'alien au moment de la charge de celle-ci. La lumière joue également un rôle essentiel dans cette ambiance horriblement tendu.


Le jeu des acteurs est incroyable, à commencer par Sigourney Weaver qui est hallucinante. La comédienne offre l'une des performances féminines les plus époustouflantes et aboutie de l'histoire du cinéma. Son personnage de premier officier, Ellen Ripley, présente une femme très forte et indépendante qui se construit elle-même. L'équipage qui l'accompagne n'est pas sans reste. On retrouve le capitaine Dallas(Tom Skerritt), deux mécaniciens avec Parker (Yaphet Kotto) et Brett(Harry Dean Stanton), un officier scientifique avec Ash (Ian Holm), un navigateur avec Kane (John Hurt) et une géologue avec Lambert (Veronica Cartwright). On constate qu'ils ne sont en rien un groupe de combattants armés, mais des salariés d'une compagnie minière. Chaque membre d'équipage du Nostromo est totalement crédible. Ils parviennent en très peu de temps à construire un lien entre eux, mais aussi avec le public. On se soucis de chacun d'un malgré leurs mines fatiguées et usées. Ils passent beaucoup de temps à se contredire, se chercher gentiment des noises avec pour moteur "l'argent", mais ils restent une unité solide capable du plus sérieux, se soutenant et se protégeant les uns des autres devant l'adversité. Même Ash dans un dernier murmure dira qu'ils ont toute sa sympathie.


Alien le 8ème passager c'est également des successions de séquences éprouvantes marquant à jamais le spectateur. Que ce soit la fameuse scène de la découverte du vaisseau inconnu avec un extraterrestre géant fossilisé dans un siège suivi des oeufs d'alien, le repas avec la première apparition de l'alien via la choquante mort de Kane; la première apparition de l'alien à cause de ce putain de chat; la partie de chasse de Dallas avec le détecteur de mouvements dans les conduits de ventilation; la violente tentative d'Ash pour étouffer Ripley avec un journal enroulé enfoncé dans sa gorge; l'abominable mort de Lambert qui laisse entrevoir qu'elle s'est fait violemment violée, les longues et stressantes déambulations de Ripley durant l'auto-destruction... aucune scène ne laisse de marbre, chacune d'elles se grave au fer rouge dans notre esprit.


CONCLUSION :


Alien le 8ème passager, est un chef-d'œuvre d'horreur que je considère comme un des meilleurs films d'horreur existants. Ce film représente la traduction impériale "non pas que d'un réalisateur", mais "d'une équipe entière" qui aura pleinement réussi à proposer une histoire originale avec un cadre pervers et atmosphériquement oppressant. Sigourney Weaver en tant qu'Ellen Ripley restera la plus belle surprise de cette oeuvre profondément surprenante. Une époque bénie des Dieux où Ridley Scott savait encore réaliser de bons films. Une pièce horrifique de taille !


La même salive fait le crachat ou le baiser ; le même désir fait le viol ou l'amour.




  • Interface 2037 posez votre question.

  • Demande éclaircissement devant incapacité à neutraliser l'étranger.

  • Impossible de donner éclaircissement.

  • Demande explication.

  • Pas d'explication. Ordre spécial 937 uniquement pour officier scientifique.

  • Ordre d'urgence 100375. Quel est l'ordre spécial 937 ?

  • Nostomo dérouté sur nouvelle coordonnée. Chercher forme vivante. Prendre spécimen. Priorité numéro un : assurer retour sur Terre de cet organisme pour analyse. Toutes autres considération est secondaire. L'équipage peut être sacrifié.


Critique lue 2.1K fois

74
34

D'autres avis sur Alien - Le 8ème Passager

Alien - Le 8ème Passager
Hypérion
9

Mother ! You bitch !

L'un des inqualifiables nombreux manques à ma culture cinématographique est comblé. J'ai enfin vu Alien. Je redoutais cette confrontation avec ce monument annoncé. Fanatique absolu de Blade Runner,...

le 11 juin 2012

173 j'aime

20

Alien - Le 8ème Passager
Torpenn
9

La belle et la bête

Les aléas de mes acquisitions de films me font terminer ma rétrospective Alien par le tout premier. Je perds probablement en cohérence, mais je gagne au moins le mérite de mes nettoyer les yeux de...

le 2 janv. 2013

164 j'aime

56

Alien - Le 8ème Passager
Sergent_Pepper
8

Cannibal Kingdom

Alien n’est pas seulement l’acte de naissance d’une créature phare de la mythologie hollywoodienne : c’est aussi l’éclosion d’un cinéaste, qui fait pour ce second film des débuts éclatants avant un...

le 5 mai 2017

113 j'aime

13

Du même critique

Joker
B_Jérémy
10

INCROYABLE !!!

La vie est une comédie dont il vaut mieux rire. Sage, le sourire est sensible ; Fou, le rire est insensible, la seule différence entre un fou rire et un rire fou, c’est la camisole ! Avec le Joker...

le 5 oct. 2019

170 j'aime

140

Mourir peut attendre
B_Jérémy
8

...Il était une fin !

Quel crime ai-je commis avant de naître pour n'avoir inspiré d'amour à personne. Dès ma naissance étais-je donc un vieux débris destiné à échouer sur une grève aride. Je retrouve en mon âme les...

le 7 oct. 2021

132 j'aime

121