Il faut sauver Newt : Chronique macabre d'un sauvetage

J'aime SensCritique pour ce genre de moment. Aliens: Le Retour n'a jamais fait partie de mes épisodes fétiches de la saga et j'étais même assez virulent à son encontre, d'autant plus que le dernier visionnage remontait à très longtemps. C'est au détour d'une petite discussion avec Fritz_the_Cat et à la lecture de sa critique que l'envie de redonner une chance au film s'est renforcé.


Celui-ci se déroule de nombreuses années après les évènements du huitième passager. Ellen Ripley est recueillie après des décennies de dérive, l'histoire prend le temps nécessaire pour installer les bases de cette suite, n'oubliant pas d'émettre la perte coûteuse du Nostromo et la recrudescence de la planète horrifique à laquelle a survécu Ellen, celle-ci faisant désormais place à une colonie nommée Achéron.


On retrouve quelques éléments propres au précédent volet, Ellen a toujours ce fort caractère et à travers son rôle la mythologie de la saga gagne énormément en profondeur, c'est un prolongement à la fois logique et important, notamment pour comprendre le fonctionnement des Xénomorphes, permettant de saisir la supposée psychologie de ces créatures et leur mode de défense.


Outre ces détails et précisions sur l'histoire et le contexte, Aliens: Le Retour m'a vraiment fait plaisir. C'est un film souffrant de quelques longueurs, moins propice au suspens horrifique comme l'était le premier épisode mais beaucoup plus tourné sur l'action, bourré de rebondissements et cela permet vraiment de voir une différenciation entre James Cameron et Ridley Scott. Il évite ainsi le sentiment de réchauffé et donne une autre couleur à Aliens, là où certains pourraient confondre cela avec de la paresse artistique.


Finalement, la seule erreur du film est d'être arrivé après le huitième passager. En le prenant pour ce qu'il est véritablement et en ouvrant son esprit sur ce qu'il a de nouveau à proposer, il y a de fortes chances de passer un excellent moment. Il va s'en dire que l'arrivée d'une bande de marines, cigares à la bouche et dotés d'une musculature saillante, peut faire grincer des dents étant donné que Ripley n'est plus seule au monde face à un prédateur, ici les compteurs explosent que ce soit du côté des aliens ou des humains.


Il n'y a pas de suggestion de la peur, ou du moins très peu. C'est frontal, abrupt, sans finesse, mais encore une fois peut-on décemment attaquer le film sur ce choix de mise en scène ? Justement, la saga Aliens est certainement l'une des seules qui réussit la passation de son univers d'un réalisateur à un autre, chacun ayant sa marque de fabrique sans pour autant trahir fondamentalement les racines du mal. Les aliens ne sont pas ridiculisés et minimisés comme de simples bêtes de foire, l'héroïsme accru des marines et la détermination de Ripley permettent d'accentuer la dangerosité de l'ennemi, en toutes circonstances. Le sauvetage de la petite fille, Newt, terrorisée et en état de choc, donne du sens au film, bien plus qu'on pourrait le penser. Se montrant incapable de parler, Newt représente cette innocence entachée par la peur et la monstruosité, elle permet de contrebalancer avec l'assurance des marines qui, au départ, se montrent trop confiants car dotés d'une puissance de feu énorme.


James Cameron déploie la grosse artillerie tout en apportant son lot d'émotions, de sentiments enfouis et de tension permanente. Et c'est en cela que j'ai énormément apprécié ce deuxième épisode et que je l'ai davantage mieux compris, l’action est certes plus spectaculaire avec l’utilisation de véhicules, d'armes lourdes, mais c'était tout aussi casse-gueule d'emprunter cette voie. En montrant l'ingéniosité des humains et en les poussant à bout, face à une reine Alien démesurée, Cameron mélange parfaitement les genres. Le problème, s'il en est, réside sûrement et uniquement dans les marines qui s'avèrent interchangeables, mais je les vois plus comme des pions humains qui servent une cause commune et mettent en relief un scénario efficace, solide et prônant une surenchère exacerbée mais délicieuse. Dans ce "retour", l'angoisse ne réside pas dans le doute accablé d'un silence morbide, mais dans la crainte de voir des personnages attachants se faire déchiqueter ou dépérir les uns après les autres, Cameron maîtrise l'enchaînement de son action et n'hésite pas à faire vibrer notre petit cœur, comme durant la scène des égouts avec la petite Newt. Encore faut-il ressentir de la compassion à son égard.


En définitif, Aliens: Le Retour est un grand morceau de bravoure, enrichissant à merveille l'univers des Aliens, certes il n'égale pas l'intensité quasi-insupportable du huitième passager, moins angoissant ou moins mystérieux. Quoi qu'il en soit je ne vois pas ces différences comme des fautes de goûts mais comme le résultat de tout un assemblage, rôdé et réfléchi. Il est louable d'avoir des attentes, surtout quand on regarde la suite d'un film qu'on a adoré, mais parfois nos attentes viennent brouiller la perception qu'on peut se faire d'une œuvre. Et je commence à comprendre pourquoi je n'avais pas énormément accroché la première fois, je voulais retrouver les mêmes éléments de stress, d'anxiété et de frissons qui m'avaient plu dans le huitième passager. Pour conter à sa façon cette lutte acharnée dans un milieu hostile, James Cameron se devait d'être le plus honnête possible avec sa vision alternative à celle de Ridley, et ce que représente pour lui une confrontation entre un humain et de telles créatures. Il se fait le garant d'un mariage décrié et contesté entre l'action et le développement de la mythologie Aliens. Et ça, c'est foutrement respectable. De plus, il prend le soin de s'accompagner d'une composition musicale redoutable d'efficacité, magnifiant l'ambiance du film, James Horner jouant la carte de l’agressivité, ses musiques viennent amplifier et retranscrire l’insécurité dans laquelle se trouvent les personnages. Bref, une suite qui n'a pas à rougir face à son aîné.


(8,5/10)

Eren
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le 2 mai 2020

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Eren

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