James Cameron est un génie: il sait l'art de parler au public en général et au public qui fait masse.
Exempli gratia avec ce second volet d'Alien qui respecte la règle d'or de la rhétorique et l'un des code de la suite d'un film de monstre.
La règle d'or de la rhétorique? Soigner le début et la fin !
Cameron associe esthétiquement et d'un point de vue narratif le début et la fin du film avec ceux du précédent, veillant à reprendre Ripley pile là où Scott l'avait laissée et à la laisser dans une situation analogue à celle où il a dû la reprendre


(alien expulsé dans l'espace, gros dodo dans la cellule de stase)


tout en rattrapant le petit manque de convenance de Scott


(Ripley porte le slip de façon plus pudique, moins ras la lune et la pussy galore).


Il ravit le spectateur dès l'incipit en plaçant Ripley 57 ans après les événements du premier opus, ce qui implique une répercussion effroyable sur sa vie de jeune mère. Il le fait frissonner et stresser avec de multiple bouleversements finaux de situation


(Ripley évoluant parmi les Aliens, expérimentant une version sienne de l'expression "marcher sur des oeufs" / Ripley poursuivie par une alien démesurée qui n'a rien à envier aux tyrannosaures de Jurassic park - comprendre par là qu'elle manie aussi bien les boutons d'ascenseur que les T-rex les poignées de porte - / Ripley laissée seule, une enfant sur l'épaule face à l'alien et sauvée in extremis par un allié)


qui amènent à une confrontation finale épique et anthologique.
Le code de suite de film de monstre?
Impliquer plus de monde - de préférence des militaires - et opposer à des monstres plus nombreux une force de feu inédite.
Bref, un bon début, une bonne fin et un milieu bien bourrin.


                                                               ***

Mais est-ce vraiment ce que l'on pouvait attendre d'un second opus d'Alien? Avait-on besoin et/ou envie de passer du huis-clos claustrophobe aux allures de slasher du Huitième passager à l'action militaire shootée à l'adrénaline et repeinte à l'hémoglobine d'Aliens? Fallait-il vraiment qu'Alien devienne AlienS ?


Pas nécessairement, telle est ma réponse.


Tout y est plus grand pour un casting plus mince: Sigourney Weaver, autrefois entourée de rien de moins que Ian Holm (Le Cinquième élément), Yaphet Kotto (Vivre et laisser mourir), Harry Dean Staunton et John Hurt (Elephant man) comme le rappelle le début du second opus, est cette fois entourée de trois vedettes fétiches de l'univers cameronien, Michael Biehn (Terminator, Abyss), Bill Paxton (Terminator, Titanic) et Lance Henriksen (Terminator) - qui reviendra dans d'autres Alien parmi lesquels le premier cross-over entre Alien et Predator- qui n'égalent pas le niveau des premiers. Au contraire, ils sont plutôt là pour marquer la saga de l'empreinte de Cameron.
Une empreinte trop visible, tant Aliens par son colonialisme terrien et ses exo-squelettes semble plus un creuset foutraque d'Avatar qu'un réel volet d'Alien.
On aura noté avant moi la lenteur à mettre en place une ambiance anxiogène digne du premier film. On aura rit avant moi de ce troc à peine crédible du chat Jonesie pour la petite Rebecca. On aura hurlé haro avant moi face à ces aliens bien destructibles en comparaison avec l'indestructible huitième passager.
C'est pourquoi, je m'attacherai plutôt à parler des scènes violentes et horribles dont Cameron nous fait grâce au lieu de nous en faire profiter. Faute de budget? Faute de goût? Non! Mais faute d'effet. Car les écrans correspondant à ce que voient les militaires livrés aux monstres, les écrans de décompte de munitions qui alternent avec des gros plans sur les visages de Ripley et d'Hicks cherchent à recréer l'étrange impression mêlée de sécurité et d'insécurité de l'enfant caché dans son placard quand un monstre ou un tueur rôde dans sa chambre. Mais cela est fait au détriment de l'angoisse réelle, le spectateur se trouvant sans arrêt mis à l'écart, à distance, du danger. Il éprouve donc plutôt de l'ennui et attend que Ripley se trouve en péril.


Un bel écrin qui renferme un miasme d'action pure parfois problématique d'où ressort tout de même une intelligente et réussie description du mode de fonctionnement social et reproductif des aliens en analogie avec celui des abeilles.
Un film passablement bon qui ne tient hélas pas la distance avec son prédécesseur. Ou bien seulement sur le plan des effets spéciaux, nouvelle décennie oblige.

Frenhofer
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le 28 mars 2016

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Frenhofer

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