Le projet était excitant et en même temps éminemment casse-gueule : Valérie Lemercier se glissant dans la peau de Céline Dion de son enfance à ses cinquante ans. Comment la réalisatrice arriverait-elle à capturer en deux heures le destin hors du commun de la diva sans la singer ni sombrer dans le ridicule ou la parodie ?
C’est en créant Aline Dieu, double fictif de la chanteuse qui emprunte autant à la personnalité parfois désarmante de naturel de l’icône Dion qu’à son propre humour et sa propre sensibilité qu’elle parvient à éviter tous les pièges. Aline lui offre la liberté de crier son admiration pour la chanteuse tout en se livrant elle-même.
Valérie Lemercier livre un geste de fan d’une incontestable sincérité autant qu’un geste artistique abouti. Avec un respect constant pour l’intimité de la star, elle construit un grand film populaire autour d’un principe simple et universel, la pureté d’une histoire d’amour.
C’est beau, tendre, complexe et émouvant comme les grandes passions longtemps contrariées.
Même si Aline est jalonné des tubes de la chanteuse (très correctement interprétés par Victoria Sio) le scénario s’attarde peu sur le parcours musical de Céline Dion. Aucune référence à Goldman, un simple clin d’œil à Titanic… Non, c’est bien le souffle de la romance entre Aline et Guy-Claude qui emporte tout et résiste à tout, envers et contre tout : le qu’en dira-t-on, le succès, les difficultés pour avoir une enfant et la maladie, qui est d’ailleurs abordée avec une grande pudeur.
Et comme pour toute comédie romantique réussie, c’est aussi très drôle. Grâce aux dialogues percutants de Lemercier, au rythme qu’elle parvient à insuffler à ce vrai-faux biopic et à la formidable troupe d’acteurs québécois qui l’entoure, on a le smile du début à la fin. Danielle Fichaud en maman Dion est épatante.
Si on peut questionner son choix d’interpréter elle-même la chanteuse enfant (c’est franchement perturbant) et si les scènes de concert sont étrangement peu enlevées, la mise en scène de Lemercier ne manque pas d’idées ni de peps. Le montage est particulièrement malin dans sa manière de créer des ellipses et faire des bonds dans le temps et la réalisatrice soigne la reconstituions de chaque époque, toujours avec déférence, et s’amuse visiblement beaucoup à reproduire la garde-robe de Dion dans le moindre détail. Elle a également la bonne idée d’utiliser des chansons originales dont Céline a fait des covers (Nature Boy, At Seventeen) pour varier sa bande son et renforcer son empreinte sur le film.
Si on ressent un peu la frustration de ne pas entendre la « vraie » Céline, on pardonne tout, tant Lemercier embrasse autant la simplicité que le mode de vie hors sol d’une star internationale décidément à part.
Une déclaration d’amour qui vise juste. Au cœur.

Thibault_du_Verne
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le 15 nov. 2021

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