Dossier très épineux, pour ne pas dire " casse-gueule" que ce Alita : Battle Angel produit par le duo Cameron/Landau et réalisé par Robert Rodriguez. Projet dans les cartons depuis des années, il voit enfin le jour sur grand écran. Quand on voit ce qu'a donné Ghost in the Shell avec Scarlett Johannson, et la première bande-annonce qui n'incitait pas à l'optimisme, j'ai finalement été très agréablement surpris. Gunnm, pardon Alita (nom américain de Galy) est sans doute la meilleure adaptation de manga par le cinéma hollywoodien . D'accord, ce n'était pas bien dur, mais tout de même, lorsque j’ai vu des gens qui appelaient à boycotter le film à cause des " gros yeux" de l'héroïne, franchement il n'y a pas de quoi. Notamment parce qu'au bout d'un moment... On y fait plus attention. Le point de contestation ne doit pas se trouver là.
En gros, le film est un condensé des trois premiers volumes du manga. Pour faire tenir ça en deux heures, ils ont dû pas mal élaguer, et pourtant, ça passe plutôt bien. Pourquoi ? Parce que Rodriguez ne s'est cette fois pas contenté de reproduire case par case le matériau original, piège dans lequel il est tombé pour Sin City. S'il a su tirer l'essentiel du manga, il a su aussi s'en affranchir pour prendre des libertés plutôt bienvenues. Mais il parvient également, de fait, de ne pas tomber dans un piège hélas trop répandu dans le cinéma : américaniser sa production à outrance. L'adaptation ciné de Metro 2033 rencontre des difficultés à cause de ça.
Dans le manga, rien n'indique que cela se passe forcément au Japon. Donc, rien non plus pouvant expliquer que le film se passe aux Etats-Unis. Finalement, Iron City ressemble beaucoup à une ville sud-américaine,comme en témoignent les panneaux des magasins, mais cela donne une ambiance particulière au film. On y découvre une cité pauvre, certes, mais chaleureuse et pleine de vie. Zalem apparaît comme rutilante, mais froide. Et comme dit le méchant de l'histoire, joué par un Maershala Ali manipulateur à souhait " il vaut mieux régner en enfer qu'être esclave au paradis".
Le film reprend le contexte de départ : Gunnm, je voulais dire Alita, ( je ne m'y ferai jamais) se passe trois siècles après un événement appelé "L'Effondrement" et le professeur Ido trouve dans une décharge une tête de cyborg avec un cerveau encore intact. Il lui donne donc un nouveau corps.
Au niveau du scénario, le mélange passe très bien, comme je l’ai déjà mentionné plus haut. On pourra reprocher de grosses ficelles et des raccourcis, ainsi qu'un début un peu poussif, et une romance qui fait traîner un peu le long-métrage en longueur. Mais il y avait longtemps que je n'avais pas vu une aussi belle mise en scène lors des séquences d'action. C'est lisible en tous points, inventif et on notera aussi une utilisation judicieuse du Bullet Time. Le Motorball s'intègre très bien à l'intrigue centrale. Bref, ça claque fort une fois que le film décolle.
Et ce d'autant plus qu'Alita est techniquement bluffant. Les équipes de Weta Digital déjà à l'origine des effets spéciaux de la trilogie du Seigneur des Anneaux, a fait un travail magistral. Il y en aura toujours pour crier à la bouillie numérique excessive ( "on diré un manèje"-coucou le critique de Libé-), mais il n'empêche, on a droit ici à du pur cinéma de divertissement comme on en fait plus.
Galy/Alita est sans doute la plus humaine des guerrières et le montre notamment en tombant amoureuse ou en s'émerveillant des choses simples.
C'est vrai, on regrette que Ido soit traité trop vite, et Shiren aussi. Il y a beaucoup à dire et les puristes pourront toujours regretter des choses. Pourquoi ces arcs narratifs et pas les autres ? Et on sent clairement qu'il a fallu rentrer dans un moule de deux heures... Et à vrai dire,une adaptation ne peut pas coller totalement au matériau d'origine. On peut aussi contester le fait que l'oeuvre a été édulcorée par rapport à la violence d'origine,les choses les plus gores sont hors champ, mais c'était sans doute le prix à payer pour rendre le film plus accessible. Cependant, ce n'est pas devenu non plus le monde des Bisounours, très loin de là.
Et on ne peut pas reprocher au film d'avoir une personnalité, ce qui manque tout même à pas mal de productions actuelles. Et il offre de purs moments de kiff intégral lors des scènes d'action.
Alita : Battle Angel est un film rempli de paradoxes. Les énumérer ici prendrait trop de temps. Mais en sortant de la salle, je n'avais qu'une envie : en voir encore plus.