Terre, 2563, dans la cité décharge Iron City en dessous de la magnifique ville volante de Zalem strictement réservée à une élite méprisante, le Docteur Ido trouve un corps robotisé et malmené, à l’intérieur se niche le cerveau humain d’Alita, guerrière cyborg au passé trouble.


Par contre sur grand écran, le bidonville du turfu à beau rayonner en imax 3D et notre cyborg cabossé se payer une plastique éblouissante, il n’abrite pas le moindre neurone actif… Alita : Battle Angel est aussi beau qu’il est bête, et c’est bien là le drame.


Alita (ou Gunnm) est un de ces manga phare des années 80-90 avec Akira et Ghost in the Shell qui ont largement pénétré la pop culture (de Final Fantasy VII à Matrix), pas étonnant qu’il ait tapé dans l’œil du Pape Geek James Cameron. S’il a bossé sur le projet des années, au point de longtemps être considéré comme l’arlésienne de sa carrière, il a finalement dû abandonner l’idée de le réaliser au profit de Robert Rodriguez. Choix surprenant ? Pas vraiment, le roi du box-office (Avatar et Titanic, les deux films ayant généré le plus d’entrées au monde) est un ami de longue date du réalisateur de Sin City, facilement une des meilleures adaptations de comics qui soient.


Du coup difficile de savoir qui a foiré quoi. Les effets spéciaux flattent les mirettes et la direction artistique futuriste avec une touche Amérique du Sud est inspirée (ruelles poussiéreuses, cyborg mariachi et églises mexicaines au milieu de la foire high tech), on ne le nie pas, mais à courir trois lièvres à la fois, Alita n’en attrape aucun. En plus du propos “où s’arrête la machine, où commence l’humain” avec une relation Alita/Ido qui n’est pas sans rappeler Pinocchio/Gepetto, le film traite également d’un vague objectif de devenir champion de rollerball (pardon motorball), le sport ultraviolent de toute dystopie futuriste qui se respecte, et rajoute une couche de romance sirupeuse avec bobby beaugosse au look veste en cuir/bandana tout juste digne d’un boy’s band des années 80 (en vrai il s’appelle Yugo, joué par Keean Johnson au charisme de bulot).


On est navré de la bêtise de l’ensemble qui, s’il commence par prendre son temps pour poser son univers devient de plus en plus incohérent et finit par se reposer sur des raccourcis monstrueux ou des facilités invraisemblables. Au troisième combat entre robots on baille, au dixième on s’ennuie ferme et c’est pas l’histoire coupée nette qui laisse une dernière bonne impression. Et ouais, ça continue dans Alita 2 et 3… Ou pas vu que le film est en train de se manger une tôle au box-office.


En fait les deux créateurs ont mis le pire et le meilleurs de leurs style respectif. De Cameron on a les propositions d’un univers de SF dense et fouillé mais on écope aussi d’un manichéisme crétin et d’une histoire d’amour mièvre phagocytant le récit, de Rodriguez on a une action trépidante qui devient redondante et des personnages hauts en couleurs malheureusement complètement creux…


Idem pour le casting, si l’actrice principale, Rosa Salazar, issue de la saga labyrinthe finit par être attachante et que le choix de ses gros yeux très “manga” ne choque pas tant que ça, le reste va du sympathiquement inutile comme Christoph Waltz qui passe au statut de figurant à la moitié du récit, au carrément grotesque à l’image de Mahershala Ali ou Jennifer Connelly qui n’auraient pas dépareillé dans Jupiter Ascending…


Malgré une direction artistique de haute volée et un casting alléchant sur papier, des vieux relents de ciné pour ados couplés à un scénario brouillon ratant lamentablement ses séquences d’émotions font d’Alita une petite déception pour le spectateur et un coûteux fiasco pour ses créateurs.

Cinématogrill
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le 21 févr. 2019

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