Les vacances de Lucifer

Après tout, un film c'est un produit. Fabien Onteniente et Franck Dubosc, ces visionnaires, ont bien compris que pour attirer le chaland il suffisait de mettre un casting français grand public, une histoire d'amour, un peu de sexe, deux ou trois blagues et envoyer tout ce petit mélange au soleil. Ils se sont certainement dit : "Ouais c'est bon ça suffira pour le connard moyen... enfin je veux dire... pour le public populaire que nous aimons et qui nous le rend toujours bien" et l'autre de lui répondre : "Mais oui t'en fait pas, l'important c'est qu'il s'identifie aux personnages...puis comme on dit SCPCP, si ça passe, ça passe..."

Oups ! Raté... Tout est à jeter dans ce "film" :

Le jeu d'acteur est intolérable, à la limite du crachat dans la tronche. Dubosc est - si c'est possible - encore plus insupportable que d'habitude dans son personnage de parasite. Demaison écope d'un rôle de débile mental qu'il incarne avec l'air de ne pas comprendre ce qu'il est venu faire dans cette galère. Je n'ai pas trouvé un terme plus approprié pour définir son rôle. Mari apathique et blasé ? Quarantenaire niais, incohérent, inconstant et influençable ? Je ne sais pas, tout ce que je peux affirmer c'est qu'il est aux fraises complet. Josiane Balasko dans le rôle d'une sorte de mamie nymphomane dégouline d'une vulgarité assez dérangeante. Mister V qui incarne un Pépito fade et peu convaincant aurait mieux fait de rester parodier du rap sur Paris. Seul Thierry Lhermite, l’œil vif, reste à peu près fidèle à lui même sans arriver, cependant, à sauver la bêtise de son rôle du vieil homosexuel seul, triste et prédateur. Pour résumer il est clair qu'il s'agit d'une grave erreur de carrière pour la plupart de ces acteurs dont certains ont encore des choses à prouver.

Rien n'est crédible dans le scénario. Un couple qui se dispute mollement dans un aéroport avec des dialogues du genre "Tu ne me dis jamais je t'aime" et finit par se séparer, un clochard en doudoune dans une file d'attente pour un vol en partance pour la Martinique qui va finalement réussir à s'incruster de force dans la suite de luxe de l'infortuné concubin en lui volant et détruisant ses affaires, tout en renforçant son amitié avec lui. Bon sang, ça ne marche pas les gars ! On n'arrive pas à suivre la bipolarité d'un Xavier Demaison qui passe subitement d'un coup de sang à une tendresse infondée pour son incrusté parasite. On ne comprend pas l'intérêt des amourettes de vacances avec les trois jeunes vacancières, qui sont manifestement la caution "jeunes trentenaires en chaleur" du film et ne se montrent jamais bienveillantes ou même humaines.

Parce que je crois qu'au delà d'une absence quasi totale de scénario, un des points les plus loupés dans cette infusion de débilité c'est bien le manque intrinsèque de bienveillance ou d'humanité. Tout est malsain, tout est glauque. Dubosc qui laisse un sachet de préservatif ouvert dans la valise de Demaison pour pouvoir le convaincre de partir sans sa copine et squatter sa chambre, Demaison qui utilise les femmes pour oublier sa copine, les femmes qui se servent de lui pour assouvir leurs besoins de jeunes célibataires paumées, Le patron de l'hôtel qui cherche une proie en vieille tante riche et assumée, Balasko qui est prête à tout pour avoir sa cartouche avant la fin de l'été... On a presque l'impression que l'ensemble dégouline d'un mélange bizarre de racisme, d'homophobie, de sexisme et de dégoût pour l'être humain.

Et encore, on pourrait se dire que la bienveillance - qui semble pourtant indispensable dans un film aux prétentions "grand public" - n'est pas forcement indispensable si l'humour est présent. Moi ce qu'on appelle parfois trop rapidement sexisme, racisme, etc ne me dérange jamais lorsqu'il est drôle. Mais là encore...

Un exemple de petite scène censée être humoristique :

****A un moment, deux employés du "resort all inclusive" s'en prennent à un enfant (d'où sortait il, qui était il alors qu'on a jamais aperçu un autre enfant de tout le film ? Mystère...) et finissent par le faire tomber à l'eau en riant. Franck Dubosc accourt vers eux et crie "Les gars, les gars... Ce n'est qu'un gosse !" Il sort l'enfant de l'eau lui demande s'il va bien et.... LE REPOUSSE VIOLEMMENT DANS L'EAU ! Et il s'en va dos à la caméra en laissant le gosse dans l'eau. Fin de la scène****

C'est drôle hein !! Toutes les blagues sont comme ça...

Bref le jeu d'acteur est catastrophique, le rythme ne fonctionne pas, les blagues sont de mauvais goût et systématiquement ratées, le scénario n'est pas crédible et malsain...
Je n'arrive toujours pas à comprendre que des producteurs et toute une équipe de professionnels aient pu valider ça. Qui a bien pu se dire à un moment " Les gars, c'est bon ! On tient le truc qui va cartonner au box office ! En avant la promo ! Champagne !" ?

Pourtant sur le papier, on ne s'attendait pas au film de l'année c'est certain, mais un casting avec François Xavier Demaison, Josianne Balasko, Thierry Lhermite, Mister V et bon... Dubosc, le tout dans un cadre vacancier et tropical, on imaginait qu'on allait, si ce n'est rire à ventre déboutonné, au moins sourire de temps en temps.

Dieu sait que je peux être bon public et souvent plus clément envers les comédies françaises que la majorité d'entre vous sur Senscritique. Mais là je suis dépassé. C'est allé trop loin. Je sens qu'on nous veut du mal et il faut le dire quand on se sent agressé il paraît.