J'étais très curieux de voir ce film dont la sortie fut éclipsée par son rival spatial : "Gravity". La bande annonce laissait présager la même histoire mais tournée de façon plus minimaliste.

Et en effet c'est minimaliste. Pratiquement aucun décor si ce n'est l'océan et quelques navires, aucun dialogue si ce n'est quelques rares jurons, aucun personnage secondaire. Ça n'empêche pas le plaisir. les conflits sont nombreux, d'abord de l'extérieur (l'eau de l'océan, la tempête, le soleil, le manque de vivres, etc.) puis d'ordre intérieur (scepticisme à combattre, chute du moral). Les résolutions sont souvent logiques, rationnelles, puisqu'il s'agit d'un marin qui sait quoi faire et qui d'ailleurs fait preuve d'un extrême sang froid malgré toutes les péripéties qui lui tombent dessus.

La mise en scène est ici adéquate. on n'est pas dans l'epsace, il apraîtrait donc mal venu pour un projet aussi intimiste, de filmer en long plans séquences. Le découpage est parfois nerveux, mais l'on ne tombe jamais dans les effets de style. L'on pourra tout de même reprocher une lisibilité douteuse de certains plans dûs à des effets spéciaux et une lumière pas toujours réussies (sans doute un manque de budget, ou bien la volonté de trop être réaliste dans l'effet de nuit). Aussi au menu quelques problèmes de rythme, preuve en est ces fondus au noir qui servent à faire passer le temps. Disons qu'on aurait voulu que ce soit plus fluide dans la narration. N'empêche qu'on ne s'ennuie jamais. Mentionnons Robert Reford, assez épatant dans ce rôle non pas de composition, puisqu'il s'agit simplement de réagir aux obstacles plutôt que de camper un personnage ; il reste simple, n'en fait pas trop, ce qui, de nos jours, est assez rare. Surtout qu'une absence de dialogues aurait pu le pousser à se montrer plus démonstratif dans ses actions.

Côté message, c'est surtout là que l'on diffère de "Gravity". Ce dernier porte un message fort, mais clairement pas vécu par l'auteur qui utilise finalement des métaphores faciles (mais que j'apprécie). Ici, l'auteur ne trompe personne, il s'intéresse à l'homme, à la solitude, à la façon dont un homme peut s'accrocher. Il ne s'agit pas de lâcher prise comme dans "Gravity" mais bien du contraire, c'est-à-dire de se retenir au moindre fil de vie qui passe pour remonter à la surface. En plus l'auteur est véritablement jusqu'au-boutiste avec un traitement frôlant le travail d'autiste.

Bref, "All is lost" est un belle aventure humaine, mêlant drame, émotion, spectacle et humanisme avec une grande audace. Un genre de scénario simple digne des années 70 que l'on aimerait moins rare dans le paysage cinématographique actuel.

Bonus : http://image.noelshack.com/fichiers/2014/50/1418143949-all-is-lost.jpg
Fatpooper
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le 19 janv. 2014

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