Tu me connais, je ne suis pas un grand amoureux de la musique classique. Je ne peux pas dire que j'ai essayé, réellement, mais je n'ai jamais rien trouvé qui soit susceptible de m'intéresser à cela. Et pourtant, j'ai su, avec le temps, ouvrir mon esprit à un ensemble très hétéroclite de choses.
Donc, un biopic sur Mozart, le compositeur le plus connu du monde, pas plus intéressé que cela à la base.

Pourtant, j'avais déjà vu Amadeus, il y a une bonne dizaine (vingtaine, plutôt) d'années. Et, dans des prédispositions similaires, j'avais été agréablement surpris et avais beaucoup aimé (reprochant à l'époque le manque d'explosions et de gunfights). Mais pas vraiment envie de le revoir pour autant.

Mais au gré d'une utilisation hasardeuse de mon Plex mobile (qui l'a synchronisé par défaut, car dans les premiers de l'ordre alphabétique), je me suis trouvé avec peu de choix hormis celui-ci et me suis lancé à corps perdu dans le film.

Et, *spoiler*, j'ai adoré.

JE TE PITCHE, TU ME PITCHES PAR LA BARBICHETTE

Ce film parle de Mozart. Ahhh, bravo, *big révélation*. Mais attention, ce n'est pas ton *usual biopic* dont raffolent les Américains. Non. Déjà plusieurs choses peuvent te mettre la puce à l'oreille:
1/ Milos Forman. Mais si, tu sais, Vol au Dessus d'un Nid de Coucou (qui d'ailleurs, attend également une synchro hasardeuse de mon mediacenter).
2/ Milos Forman. Mais si, tu sais, Larry Flynt.
3/ Milos Forman. Mais si, tu sais, Man on the Moon.
…Arrêtons tout de suite l'hypocrisie. Le cinéphage que je suis connait Milos Forman, sait qu'il aime Milos Forman, mais n'est pas non plus überfamilier avec l'ensemble de son oeuvre (pourtant courte). La preuve? Je n'ai rempli que le 1/ de cette liste de tête. Le reste est *courtesy* IMdB (je les ai vus, hein, mais je les attribue pas à Forman spontanément).
Donc oui, ce n'est pas ton *usual biopic* car Milos Forman, ce réal-que-tu-aimes-même-si-tu-le-connais-pas-tant-que-cela.
De plus, car tu es renseigné et que tu maîtrises Wikipédia, tu sais que Amadeus est l'adaptation d'une pièce de théâtre sur la vie de Mozart écrite par Peter Shaffer (qui a aussi commis le scénar du film).
Basée sur une nouvelle très controversée de Pouchkine de 1830.
Réputée pour être HAUTEMENT romancée.
Donc tu ne prendras pas tout cela au pied de la lettre, pour parole d'Eve Angéli. Car si, comme moi, tu es d'une nullité crasse sur la musique classique, ce n'est pas là que tu vas pouvoir te faire ton vernis de culture pour briller dans les diners mondains ou auprès de tes beaux-parents.
Non, pour cela, va plutôt voir Mozart: l'Opera Rock (...c'est de l'humour, des fois que tu te méprennes sur mes propos).

Donc le pitch, car tu es venu là pour ça:
Le film est entièrement raconté en flashback (en *analepse*, on dit quand on a des lettres) quelque 30 ans après la mort de Mozart, par l'astucieux biais d'un entretien-confession entre Salieri et un prêtre. Et abuse de la voix-off, méthode narrative que personnellement j'apprécie hautement, au point de préférer la version initiale de Blade Runner pour cette raison (oui, vous pouvez me lapider), mais qui semble avoir un large LARGE nombre de détracteurs.
Donc pour toi et tes amis voxoffophobes (néologisme, encore, cherche pas dans le dico), vous êtes prévenus.

LA PARTIE OU ON PARLE CINEMA, (PRESQUE) COMME DANS LES MAGAZINES...

Salieri, c'est le compositeur officiel de la cour d'Autriche. Il a consacré sa vie entière à la musique, meilleur moyen selon lui de consacrer l'amour de Dieu. Car oui, l'individu est très pieux. Et brillant, aussi: il a réussi là où rien ne le prédestinait (origines modestes et rustres, toussa).
Mais lorsqu'arrive Mozart, le génie de ce dernier remet complètement les croyances de Salieri en perspective, chamboulant toutes ses convictions, y compris religieuses, voyant en Mozart un pied de nez ultime de Dieu à Salieri tant sa musique tend vers le divin alors que son lifestyle…non. Et puis pour l'ego, c'est chiant, hein, mets-toi à sa place.

La relation amour/haine/jalousie/admiration magnifiquement campée par F.Murray Abrahams (mais si, le cas typique du mec-que-tu-connais-mais-tu-sais-plus-où-tu-l'as-vu-ni-comment-il-s'appelle… Il a joué dans Scarface, Le Nom de la Rose, Last Action Hero ou les Muppets dans l'Espace… Je suis sûr que tu as au moins vu ce dernier…) lui a valu l'Oscar. Quand même. Et là, déjà un indice s'affiche chez vous: Amadeus est paradoxalement plus un film sur le personnage de Salieri que celui de Mozart.

Mozart est incarné par Tom Hulce, véritablement habité par le rôle. D'ailleurs, ce dernier n'aura pas vraiment de carrière significative par la suite, sorte de "*one-hit-wonder*" du cinéma; le fameux syndrome Linda Blair...

ATTENTION CHERIE, CA VA SPOILER...

Et donc, tout le film tourne autour des aveux de Salieri et de sa relation avec Mozart, des intrigues de cour pour couler ce dernier, tout en se pâmant secrètement et sincèrement sur le génie de l'oeuvre. Entre sabordages politiques et supercheries, Salieri commanditera secrètement une Messe pour les Morts à Mozart, point final de son plan visant à tuer Dieu, usant d'artifices pour stimuler la culpabilité d'Amadeus vis-à-vis de son père décédé (superbe costume de carnaval, intelligemment repris dans l'affiche du Director's Cut, qui dégage ce sentiment de malaise que je n'avais pas connu depuis le Belphégor de quand j'étais gamin. Celui de Juliette Gréco des 60s, hein. Pas Sophie Marceau.).

Le point ultime de cette relation donnera lieu à une scène d'anthologie de "dictée musicale", où Mozart, exténué, agonisant, dictera les dernières instructions de son Requiem dans une *battle* effrénée avec un Salieri extatique devant le génie à l'oeuvre.

Bon, les historiens et les geeks de W.A.M savent bien que toutes ces scènes ne sont que fiction, que Salieri n'a absolument pas commandité le Requiem, ni ne l'a fini (ce sont, semble-t-il, les élèves de Mozart), ni même que Salieri détestait Mozart (il fut l'un de ceux qui oeuvrèrent pour faire reconnaître son génie). Ce qui est gênant, tu en conviendras aisément, pour un film uniquement basé sur ce fait précis.

Mais l'histoire racontée est savoureuse, passionnante…et cohérente.

Le film pèse ses trois heures, quand même, mais s'avale d'un trait, sans longueur. Et même les profanes de l'oeuvre de W.A.M (et tu en sais bien plus que tu ne le crois, vu le nombre de pubs, films et autres qui "utilisent"du Mozart) y trouveront leur compte, voire même auront envie d'approfondir. Jusque ton serviteur, en train de finir ces lignes sur le Recordare du Requiem…
elSkatos
8
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le 2 janv. 2013

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