Après la mélancolie de « Memory Lane » et « Ce Sentiment De L'Été », Mikhaël Hers souhaite graver le deuil tricolore dans sa filmographie. Plus d’exploration mélancolique ou de relation sentimentale fragile au premier plan, place à l’absence irréversible. Dans ce genre de récit, il y a toujours un avant et un après qui flirtent respectivement avec tranquillité et responsabilité. Il ancre ainsi son intrigue avec du réel, dans un quotidien parisien décalé. La ville paraît si artificielle et muette, symbolisant sa fébrilité face à la violence qui s’est emparée de la vie.


Mais dès lors qu’on laisse place au sujet dominant, on parvient pleinement à développer un drame familial, intime et sincère. La paternité accidentelle n’est pas courante, mais cela pousse David (Vincent Lacoste), du haut de ses 24 ans, de prendre de nouvelles responsabilités vis-à-vis de sa nièce Amanda (Isaure Multrier). Dans un Paris ordinaire et presque hors du temps, on devine les intentions du mélodrame qui se tisse peu à peu. La jeune fille constitue le nœud de cette réparation qui la touche, elle et son tuteur improvisé. Le cadre nous impose un rapprochement simple, mais efficace avec ces personnages, étourdis par le manque de balises ou de guides. C’est pourquoi une galerie de personnages secondaires viendra servir leur ascension, dans une relation qui part pour séduire.


Par ailleurs, ce sera dans la routine et les petits détails qu’on ne remarque qu’après réflexion. Ce sont des gestes, des notes d’attention qui semblent logiques et pertinentes qui font de David une âme respectueuse, mais tourmentée par le doute et la peur de la solitude. Il est face à ce phénomène qui le contraint à briser ses principes, car il prétend à une situation de couple, sans savoir qui il faut choisir entre sa nièce et son idylle, Léna (Stacy Martin). Elle est l’ambassadrice du traumatisme parisien et est traitée avec saveur dans une mise en scène symbolique. Sa présence pimente donc le cœur d’une relation forte en devenir, mais qui aura droit à toutes les étapes du silence, du mécontentement et du réconfort.


Les larmes sont les résultats d’une séparation ou d’une nouvelle union. Et c’est à tour de rôle entre « Amanda » et David, que le capital sympathie prendra un sens. Chasser le mal n’est pas ce qui les fera renaître, non. Eux vivent déjà. Il s’agit de l’accepter et de mieux vivre, malgré les circonstances. L’introspection les aidera grandement, mais le fossé générationnel entre l’adulte prématuré et l’enfant constitue une barrière à franchir. Le scénario y parvient subtilement, tout en incluant une légère braise, rimant avec la reconquête d’une cité, pleine de vies, de redondance, d’échanges, de sentiments et de partage. Enfin, notons une seconde lecture devrait évoquer bien plus de symboles et de métaphores sur les cicatrices d’une ville blessée, mais il faudra s’acclimater des lieux et de s’en investir le langage pour en comprendre la signification. À bon entendeur, tirons la révérence.

Cinememories
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le 29 sept. 2019

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