Si il demeure une belle photographie de son époque, American Graffiti peut aussi se targuer d'avoir mis au jour deux protagonistes majeurs des décennies à venir : George Lucas et Harrison Ford.
Néanmoins, il accuse par ailleurs un peu son âge, et paye le tribut du propos sus-nommé.
De fait les destins croisés de ces jeunes "normaux" n'offrent guère plus d'intérêt que l'éventuelle nostalgie qu'ils sauront éveiller en vous (ce qui est délicat quand on est né dans les années 80) ou votre attrait pour les belles mécaniques (et je parle bien ici exclusivement des voitures, nous y reviendrons).
Je ne cherche pas à nier ou dénigrer l'aspect autobiographique de l'oeuvre et, ça fait toujours bien de le placer, l'éventuelle catharsis qu'elle représente pour son auteur, c'est juste difficile de s'identifier justement.

Pour autant le film ne manque pas d'un certain charme, par la nuit permanente et sa très belle "lumière", bien sûr la BO omniprésente et marquée au fer rouge par ce son typique des fifties, une certaine dolence et nonchalance propres à cette période également, véhiculée malheureusement par une pléthore d'acteurs à qui je concède éventuellement de correspondre aux souvenirs de Lucas, mais qui font bien pâle figure à notre époque où l'apparence a tant d'importance.
Sans jugement de valeur sur ce dernier point, il n'en reste pas moins qu'il met à mal la crédibilité de certaines scènes : Toad qui est le premier à serrer, Harrison Ford qui se tape boudin sur boudin pendant qu'un roux lève les plus belles poules du quartier (brushing à l'épreuve du vent en tête, évidemment) mais préfère in fine retourner vers sa petite amie hideuse au pire, banale au mieux.
À noter d'ailleurs que c'est ici l'ensemble d'une génération qui peut s'ériger ici en porte-drapeau du féminisme et de la sexualité féminine assumée. Au point qu'on se demande si il est encore possible de trouver un coin sec sur les banquettes des bagnoles, mais ne sombrons pas dans le mauvais goût pour autant.

Dernier regret d'importance : la déception de l'affrontement automobile autour duquel on fait monter la mayonnaise pendant une bonne moitié du film, entre deux flirts.
Expédié en deux secondes, il n'est pas porteur de beaucoup de sens pour moi, avec un héros qui tire sans grande conviction une leçon qu'on a du mal à identifier.
Soit je suis débile, soit c'est laissé à la libre appréciation et imagination du spectateur, en tout cas je n'étais guère convaincu moi non plus.

Si l'on arrive à occulter ces quelques faiblesses, les qualités du film ressortent sans mal, servies par une réalisation très propre à défaut d'être tape-à-l'oeil, constituant une fenêtre ouverte sur une qualité de vie révolue, vestige d'un temps que les moins de 20 ans (et 50) ne peuvent pas connaître et vecteur de quelques sourires aux modes vestimentaires, musicales et capillaires dont on se dit toujours que c'était mieux (ou bien pire) avant.
SeigneurAo
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le 3 janv. 2013

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SeigneurAo

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