Les Guinea Pig sont un groupe de films ultra-gore dont les deux premiers volets (1985) sont passés pour la confirmation de légendes urbaines à l'époque de leur production. Devil's Experiment (1er) et Flower of Flesh and Blood (2e) sont de faux snuff movie (où des individus sont mis à morts et généralement torturés). Les quatre films suivants se greffent sur la marque sans être de véritables 'fake' snuff – l'alerte de Charlie Seen lancée aux autorités a apporté une excellente publicité aux Guinea Pig. Les opus 3, 5 et 6 sont même des comédies médiocres, grasses et fantaisistes, où la violence est minime. À l'inverse, le 4 est un essai original (love story malade avec une sirène), tourné par le même réalisateur que pour le 2. Hideshi Hino a donc fourni les deux opus notables de cette saga underground.


Fin 2014, American Guinea Pig est projeté dans deux festivals aux Etats-Unis, puis sort en DVD dans ce pays le 21 juillet 2015. Ce curieux projet est conçu par Stephen Biro, président et fondateur de Unerthead Films Inc. Producteur du Philosophy of a knife d'Iskanov (film de 4h reproduisant les expériences d'une unité militaire japonaise pendant la seconde guerre mondiale), Biro commercialise les films les plus sombres ou violents disponibles, ce qui l'a amené aux Guinea Pig. Il est également responsable d'effets spéciaux pour plusieurs produits horrifiques de Marcus Roch, dont le plus fameux est 100 tears, avec un clown tueur. Son American Guinea Pig s'adresse à une toute petite fraction de cinéphages, goreux profonds ou connaisseurs de la saga japonaise.


Avec ses prises de vue embrumées de copie VHS, entrecoupées de passages où la photo devient plus crûment 'directe', AGP retrouve bien ce côté cheap (amateur) et daté des deux premiers Guinea Pig. Comme eux il est un authentique faux snuff. Deux hommes y dépècent un tandem de jeunes femmes, étendues sur un lit, maintenues paralysées mais conscientes par une drogue. Leur style est différent de ceux des homologues japonais, tous exaltés à leur façon : romantique dans le 2, savant fou dans le 5, les deux dans le 4, expérimental burlesque dans le 6. À la limite, ils se rapprochent du gang de stoïques opérant dans le volet initial, en le surpassant dans la violence et surtout dans la folie.


Monomaniaque comme lui, American ne rejoint pas Devil's Experiment par son inanité, grâce au travail d'ambiance. Outre les masques de démons voir de 'bêtes immondes', Bouquet of Guts and Gore se caractérise par une bande-son poisseuse (sorte de souffle discret) et ses aspects érotico-gore 'refoulés'. Les deux types restent indéfinis, mais leur attitude froide, une vague dimension ritualiste et les tenues grotesques donnent l'impression d'avoir à faire à des espèces de nihilistes facétieux ou d'aspirants illuminés attirés par le versant pratico-pratique de leur engagement. Malgré le manque de crédibilité sur des éléments cruciaux (la main coupée comme du beurre) et surtout le côté foire du plastique, le spectacle est troublant.


Car le Guinea Pig américain est une boucherie littérale : après avoir retirés quelques morceaux, un des types découpe la gueule d'un mannequin assez évident, puis enchaîne sur une série de tranchages d'yeux façon tonton Bunuel (Un chien andalou). S'ensuit un vidage de tripes puis le passage à la seconde victime, toujours avec sa main sur la poitrine. La peau des bras et jambes est décalcinée avant un trifouillage d'organes éparpillés au sécateur. AGP ne permet aucune distance, n'a aucune pudeur et est généreux en détails assassins : il est psychotique comme le 2 mais dépourvu de sa 'poésie'. Sa surprise finale rappelle un des pires chocs recelés par A Serbian Film ; la séance s'achève sur les pleurs d'un bébé, probablement trop jeune pour réaliser qu'il aurait mieux fait de ne pas venir à la vie. Au royaume du glauque American Guinea Pig est un leader incontestable.


https://zogarok.wordpress.com/2015/08/10/american-guinea-pig-bouquet-of-guts-and-gore/

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le 10 août 2015

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