Ami-Ami dit quelque chose des relations d’amitié et d’amour qui unissent une tranche d’âge venue vivre en collocation à Paris, soucieuse d’établir des règles qui volent en éclats à mesure que les corps se choquent et explorent le désir. Aussi le long métrage accorde-t-il une place de choix au sexe, n’hésitant pas à dénuder ses actrices et ses acteurs : ils se mettent littéralement à nu, ils nous donnent accès aux tourments de leur intériorité et à leur fragilité cachée derrière le masque du cool et du décomplexé. On se répète que rien n’est sérieux mais l’on reconnaît malgré soi que tout l’est, qu’un mensonge devient montagne, qu’une déception devient trahison, qu’un secret devient infidélité. L’image des auto-tamponneuses résume assez bien cette idée : l’entrechoc sous couvert de s’amuser.
La réalisation très colorée et pop de Victor Saint Macary cultive les plans éclairés aux néons pour mieux faire ressortir ses scènes dramatiques : l’annonce d’une maladie délaisse ainsi le superflu pour la lumière naturelle, plus crue et authentique, aux antipodes de cette fabrique imaginaire qu’est l’appartement plongé dans la nuit. Les néons, l’espace fermé, l’étroitesse des lieux figurent une chambre noire dans laquelle se développent des photographies mentales, des fantasmes qui échouent à se concrétiser et qui orchestrent les retournements scénaristiques du film. Certaines facilités, notamment la clausule en happy end, rappellent que Ami-Ami aurait pu s’affranchir de son canevas de plus en plus prévisible pour imposer une trajectoire personnelle ; il n’en est pas moins rehaussé par l’authenticité que dégagent ses acteurs, tous excellents ici et qui s’engagent physiquement dans des rôles plus complexes qu’il n’y paraît. Talent à suivre.