Impossible de ne pas concéder à Anaconda (doublé d’un non-équivoque « le prédateur » en version française) une certaine forme de sincérité : il y eut les vampires, les loups-garous, les requins et les araignées ; désormais, il y aura également l’anaconda. Vision « fantasmée » du plus grand serpent vivant (paraît-il), le film de Luis Llosa a tout de la série B (ou Z, c’est selon) généreusement pourvue (45 millions de dollars, tout de même) tenant du nanar en puissance.


Son carton inaugural ne laissant pas de place au doute, puis ce bougre de Danny Trejo préférant mettre de lui-même fin à sa vie, Anaconda ne lésine pas sur l’emphase pour signifier la menace que représente son diable de reptile géant. Bien que nous décelions alors un goût certain du grandiloquent, le récit semblait prendre un tant soit peu au sérieux son potentiel horrifique : certes, le tout s’inscrivait dans un schéma des plus génériques, l’équipe d’explorateurs comptant dans ses rangs des profils aussi variés que conventionnels, mais les ingrédients étaient bien là.


Néanmoins, cette idée d’un fond de sérieux a tôt fait de s’évanouir dans les profondeurs de l’Amazonie, Anaconda prêtant invariablement à la grimace dans le pire des cas… et le sourire dans le meilleur. Dans le sillage d’une Terri destinée à prendre les choses en main, car détentrice de l’usuel totem d’immunité, l’intrigue échafaude à grand-peine un semblant de suspense concernant les intentions de Serone : outre les regards de connivence échangés avec Mateo, capitaine de navire des plus avenants, les rictus outranciers de Jon Voight donnent le ton.


Avoir la gueule de l’emploi, c’est bien, mais cela n’est pas suffisant : entre inquiétude et inconfort constant, le malaise de ses « sauveurs » tombe sous le sens tant l’intrigue ne s’embarrasse d’aucune subtilité à l’égard de son antagoniste (humain). L’intention de départ n’était pourtant pas dénuée de sens, Anaconda visant à ne pas placer tous ses œufs mortifères dans le même panier : le danger sauvage et imprévisible qu’incarne son (ou plutôt ses) serpent(s) est une chose, celui de l’Homme pour l’Homme en est une autre.


Aux antipodes du convaincant, faute d’une réelle tension, le film n’est pas loin de se rire de lui-même, prenant par voie de fait de vagues allures de parodie assumée : reste que cela serait des plus commodes. À l’image de ses effets spéciaux ayant fort mal vieillis, d’autant qu’il a la main lourde en ce qui concerne les aptitudes de ses anacondas géants (que dire de leur digestion éclair), l’ensemble de ses atours forment une signature bancale : l’absence d’épouvante n’arrangeant rien (sa « gestion » de l’hors-champ est désopilante), le risible se veut donc majoritaire… ce qui n’est pas rédhibitoire, son statut de nanar n’étant pas malvenu.


D’une édifiante délicatesse, Anaconda aura malgré tout initié une franchise à son nom (douée d'une qualité, aussi infime soit-elle, déclinante) : une marque de réussite envers et contre tout, le film ayant effectivement plus que rentabilisé son solide budget à sa sortie. Comme quoi, tout arrive.

NiERONiMO
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le 24 oct. 2020

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NiERONiMO

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