Ander, homme simple de 45 ans, vit dans une province reculée du nord de l'Espagne et partage sa vie entre son travail dans une usine voisine, son exploitation agricole le quotidien avec sa mère et sa soeur. Ce film est une oeuvre à la fois extrêmement rude et sensible. L'homosexualité masculine en milieu rural n'est pas un sujet traité de manière courante dans le cinéma en général et espagnol en particulier. Il ne s'agit pas d'un "Brokeback mountain" basque à la sauce péruvienne mais bien d'une relation qui se noue malgré les désirs et la volonté du protagoniste principal (primé pour sa prestation au festival de St Jean de Luz) qui au dire de sa mère a toujours trouvé une excuse pour ne pas s'engager dans une vraie relation durable avec une femme.

Cet attachement entre la mère et le fils montre que sans les femmes, les hommes restent des enfants. Sentimentalement, c'est encore une femme qui va lui permettre de vivre sa relation au grand jour. On peut se demander ce qui pousse le réalisateur à faire disparaître la mère dans la dernière partie du film de cette façon mais on comprend que sans cela, s'il avait conservé cette vie, il aurait laissé sortir cet homme de sa vie et perdu, une fois de plus une chance de bonheur. La femme, prostituée qu'il partage avec son ami, pour assouvir ses besoins physiques est heureusement là, elle aussi, pour lui faire prendre conscience de ce à côté de quoi il va passer.

Ce film est lent, c'est un reproche que j'ai entendu, mais paradoxalement n'est pas long malgré ses 2h08 et on prend le temps de regarder évoluer les personnages, les gestes, les regards, sans s'ennuyer. Il a remporté le prix du meilleur film au festival du film espagnol de Toulouse mais est malgré cela resté confidentiel.

Le film peut choquer mais son but n'est pas là. Il tend à prouver que les sentiments se créent et dépassent toute norme sociale mais qu'il faut être capable de l'accepter. Le manque d'artifice autant chez les acteurs (nous n'avons pas affaire à Heath Ledger ou Jake Gyllenhall) que dans la réalisation nous rapproche des personnages et de leur réalité. Ce n'est certes pas une oeuvre facile, qui plaira à tous mais qui a le grand mérite d'exister.
En alliant la simplicité formelle à la complexité humaine, le réalisateur réussit son pari de l'identification réussie.
Ces deux êtres là ne seront plus des étrangers pour qui les aura rencontrés.
Rawi
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Films 2010, Top critiques (films) et films (re)vus en 2014

Créée

le 22 nov. 2012

Critique lue 858 fois

24 j'aime

6 commentaires

Rawi

Écrit par

Critique lue 858 fois

24
6

D'autres avis sur Ander

Ander
Gondorsky
8

Critique de Ander par Gondorsky

"Ander" brille par sa simplicité et son réalisme, loin des clichés qui pétrissent les films de ce genre, en règle générale. Une vraie bonne surprise que cette oeuvre sans prétention qui laisse toute...

le 1 mars 2011

5 j'aime

Ander
Zyppi
10

Critique de Ander par Zyppi

Un petit bijou tout en douceur et en lenteur... Une réelle sensibilité au service d'une histoire d'amour magnifique !

le 14 oct. 2010

1 j'aime

Ander
FD29200
7

Critique de Ander par F P

Témoigner son amour envers son frère / sœur / mère est déjà compliqué à exprimer. Quand il faut le faire d'homme à homme, ca prend du temps.

Par

le 24 avr. 2023

Du même critique

Bienvenue à Gattaca
Rawi
10

Critique de Bienvenue à Gattaca par Rawi

Un des meilleurs sinon le meilleur film d'anticipation existant. Scène d'ouverture, une des douches les plus hygiéniques jamais filmées. Des lambeaux de peaux, tombent dans le bac à douche les uns...

Par

le 31 oct. 2012

183 j'aime

23

Le Petit Prince
Rawi
9

Poésie initiatique

Cher Antoine, Quand j'ai fait la connaissance de votre petit Prince, je n'étais qu'une petite fille qui commençait ses découvertes littéraires. Bien sûr qu'à 7 ans, je n'ai pas tout compris. La...

Par

le 26 avr. 2016

129 j'aime

9

Under the Skin
Rawi
8

Poème érotique

Le film s'ouvre sur un oeil, un regard qui se forme, une langue qui se prononce maladroitement. Fond noir ! L'intérêt majeur de cette adaptation est son ACTRICE principale. A la fois très connue,...

Par

le 4 juil. 2014

129 j'aime

33