J'avoue que j'étais sceptique en lançant le film, mais curieux de le découvrir. Sceptique, oui, mais pas autant qu'il y a 5 ans, lorsque j'appris l'existence de ce projet quelques mois avant sa sortie. Je m'étais dit : un drame historique par Emmerich, ça ne peut rien donner. À cette époque je n'appréciais pas le bonhomme, j'estimais que ses films catastrophes étaient mal fichus (j'ai depuis révisé mon jugement ne partie). Lorsque j'ai vu la bande annonce, j'ai rigolé : un drame historique avec des plans aussi spectaculaires, ça sentait le film bien con, où Emmerich trahit son sujet. En fait, c'était moi le con.


Parce que tout d'abord c'est très bien filmé. Emmerich est au service de son histoire. Bon, on sent qu'il a un peu peur que son public s'ennuie, donc il dynamise ses plans le plus souvent possibles à l'aide de mini traveling dès qu'un personnage dit quelque chose d'important. Il propose également quelques plans spectaculaires, mais pas tant que ça en fait ; en effet, il semblerait que les producteurs aient voulu miser sur le nom Emmerich pour vendre ce film et ont donc décidé de balancer tout ce qu'il y a de plus spectaculaire dans la bande annonce. Ce n'est de toutes façons pas totalement faux ; en effet, Emmerich semble s'interdire au simple dialogue et trouve toujours une excuse pour mettre en mouvement ses personnages. Cela ne nuit en rien à l'histoire car justement, l'auteur trouve le moyen, par le geste, par le mouvement, de mettre en avant ce qui est dit. C'est donc une mise en scène intelligente à laquelle nous avons affaire.


J'ai apprécié la retenue dans les effets spéciaux. Il y en a surtout, pour les plans larges en extérieur ou pour accentuer des pluie, ou encore pour décupler les foules, mais ça reste souvent discret, en arrière plan. La photographie aurait pu être plus inspirée (notamment par les peintres de l'époque par exemple), on a quand même droit à quelque chose de propre, géré, quelques beaux contrastes, quelques chouettes clairs-obscurs. Le casting est impeccable. Emmerich recrute là de très bons acteurs qui se donnent à fond. Que ce soit pour jouer un méchant, un gentil ou un entre-deux. La musique est un peu plus classique, efficace.


Je ne dirai pas que Emmerich est un génie, mais il en a bien plus dans la tête que ce que sa filmographie américaine laisse supposer. Je fus d'ailleurs surpris d'apprendre récemment que son projet "10,000 BC" était à la base bien plus ambitieux et artistique jusqu'à ce que les producteurs le violent ; les réflexions qu'il a partagées à ce sujet montre que le bonhomme est conscient et lucide de son œuvre et qu'il est capable d'être autocritique. Vraiment, voir ce film m'a rassuré sur son prochain projet "Stonewall" autant que ses films avant "Stargate". Mais revenons à la critique.


L'histoire proposée est construite sur le principe de flashback. En général je ne suis pas très fan de cet artifice. Ici encore, il aurait pu être évité. Mais cela n'est pas pour autant désagréable à suivre. En effet, les flashback servent principalement à expliquer les rouages politiques ou à mettre en avant la personnalité des personnages. Le flashback paraît donc intégré dans la continuité du fil narratif principal. Le spectateur n'échappe tout de même pas à quelques chutes de rythme, notamment sur la fin, du fait que l'intrigue principale est terminée. Mais il y a en contrepartie des idées très intéressantes. Tel que le début sur les planches. Tels que les nombreuses références aux pièces (des faits historiques se retrouvant dans la pièce) sans que ce ne soit trop lourdement montré. Au début, j'étais pourtant peu confiant, mais petit à petit, les personnages m'ont séduit de par leur construction efficace et exploitée avec jusqu'au-boutisme. Et puis le récit en soi, qui s'avère très shakespearien est tout simplement très intéressant. C'est bien simple, c'est tellement en accord avec ce que Shakespeare a écrit, que je m'attendais à ce que tout le monde meurt à la fin.


Bref, ce fut une belle surprise. Emmerich est un bon réalisateur qui a tardé un peu pour délivrer des films un peu plus personnels, mais ce n'est pas grave. Mais rassurons-nous : il ne compte pas oublier ses premiers amours puisque c'est avec plaisir qu'il se relance dans l'aventure de "Independence Day" (et entre-temps il a fourni un "White house down" qui a été plutôt bien reçu il me semble).

Fatpooper
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le 30 avr. 2015

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