Merci Wright, ton spectre sauve ce film

Je me suis lancé dans un challenge duquel je pourrais ne pas revenir vivant. Certains pensent que je risque l'overdose. D'autres que je vais probablement ensuite voir la vie avec un filtre Marvel. Que je vais voir partout dans la rue des méchants écrits sur une feuille de PQ et que je verrai en levant les yeux divers portails inter-dimensionnels. Pire encore, que mes proches morts vont revenir à la vie. A vous tous, je vous dis que vous avez tort. Ou du moins, que je l'espère.


Plus sérieusement, l'idée est de revenir à froid sur 10 ans et 18 films qui ont, plus pour le pire que pour le meilleur, révolutionné le genre du blockbuster, et de les revoir aujourd'hui pour savoir s'ils ont survécu à l'épreuve du temps.


Aujourd'hui : Ant-Man.


C'est un film dont il est difficile de parler parce que je suis un immense fan de Wright, et la plaie ouverte par son départ du MCU qui a également plus ou moins entrainé le départ de Joss Whedon - donc, en soi, des auteurs du MCU, et seul James Gunn a survécu en ayant fait deux films tellement titanesques qu'il est aujourd'hui à la tête du MCU et de son avenir post-Gardiens 3/Avengers 4 - n'a jamais été refermée. Et même si j'ai l'impression que de ce départ est né Baby Driver - que Wright avait pourtant en tête avant même Shaun of the Dead, il suffit de voir un des clips qu'il a réalisés - qui est l'un de mes films préférés de l'an passé, quelque chose s'est cassé avec ce départ.


A l'époque, j'avais beaucoup plus d'espoir dans le MCU qu'aujourd'hui parce que les yes-men étaient moins présents. Quand Wright a quitté le projet pour être remplacé par le plus yes-man des yes-men - le mec a carrément réalisé l'immonde bouse Yes-Man avec Jim Carrey - on sortait de l'excellent Winter Soldier, Black avait réalisé le paradoxal IM3, Derrickson que j'aimais déjà beaucoup avait signé pour Dr Strange, et on venait de se taper une grosse claque avec Gardiens 1.


Cette claque qu'était Gardiens 1 représentait énormément d'espoirs. Tout d'abord, celui de confier des films du MCU à des auteurs et les laisser un peu faire ce qu'ils veulent tant qu'ils cochent les cases du cahier des charges. Ensuite, celui de faire des films sur des héros plus obscurs - à l'époque, les Gardiens étaient encore plus inconnus que la Suicide Squad, c'est dire - et enfin l'espoir de voir des films sortir un peu du modèle qui était né en 2008 avec Iron Man.


Donc, clairement, Ant-Man est le premier film du MCU que je suis allé voir en m'attendant à la plus grosse merde du monde, j'étais prêt à le détester, à en découdre.


Et, boy oh boy, que j'ai eu tort.


C'est la première véritable comédie du MCU. Gardiens relevant plus du space opera que de la comédie pour moi, et Avengers 2 restant quand même plutôt noir, ici, on est dans la comédie pure, notamment parce que pour la première fois depuis Thor 1 qui avait utilisé cette idée de très mauvaise façon, l'intrigue du film est beaucoup plus terre-à-terre que les précédents films, elle se passe dans une seule et unique ville, à l'exception d'un détour vers le complexe des Avengers, et on fait très vite le tour des décors.


Le film arrive immédiatement après Avengers 2 qui multiplie les décors et ambiances et où des Dieux font tomber une ville du ciel pour la transformer en météore - sic - et on retrouve un côté terre-à-terre, presque dans la même veine que les Defenders, où l'enjeu principal est de voir le héros pouvoir voir sa fille.


En donnant cet aspect beaucoup moins épique que le reste du MCU au film, paradoxalement, on s'attache beaucoup plus aux personnages, parce que non seulement Paul Rudd pourrait être notre voisin à tous, mais en plus, cette histoire de garde, on pourrait tous la vivre. Et très honnêtement, je sais pas vous, mais j'en ai beaucoup plus quelque chose à foutre que Scott Lang puisse voir sa fille plutôt que de voir des villes-météores tomber du ciel.


Et donc, comme je disais, c'est la première véritable comédie du MCU. Les quatre scénaristes que sont Wright, Rudd, Adam McKay et Joe Cornish, ont compris deux choses fondamentales. Tout d'abord, ces fourmis-là, c'est complètement débile. Donc il faut leur faire faire des trucs débiles comme porter du sucre. Et tous les gags de cet acabit sont à mourir de rire. Ensuite, ils ont compris le principal problème de ces films, et bien qu'ils ne s'y attardent qu'au détour d'une réplique, on sent que ces gars-là en ont dans le crâne et qu'on peut leur faire confiance. Lorsque Pym explique tout le problème et la menace que représente le méchant vraiment très méchant oulala qu'il est méchant, la première réponse de Scott est : "ok, la première chose qu'on doit faire, c'est appeler les Avengers". Et voilà, en une réplique, ces 4 comiques viennent de pointer du doigt le principal problème des films après Avengers 1 où chaque héros sauve le monde dans son coin sans appeler ses super-copains à la rescousse.


Evidemment, ces deux points ne sont pas les deux seules qualités du script humoristique qu'ils ont signé, mais ils sont en quelques sortes l'allégorie de tout leur scénario. Encore une fois, on comprend vite que ce film est écrit par quelqu'un d'autre que les costards-cravates du MCU et il n'est alors pas étonnant que le film ne soit lié aux autres que par une figuration hilarante du Faucon et quelques évocations par ci par là. A un moment du MCU où chaque film à l'exception d'IM3 était une bande annonce du suivante, c'est extrêmement rafraichissant.


Bon, OK, c'est une comédie, une super de surcroit, et les seconds rôles sont tout aussi géniaux que les premiers, tellement que même Darren Cross se retrouve comme un méchant certes caricatural mais intéressant parce qu'il est extrêmement présent dans le film et que l'acteur se donne à fond, mais à part ça ?


A part ça... C'est un peu vide. Dés qu'Ant-Man n'est pas en action, c'est branlé comme un téléfilm, ça n'a aucune vie, c'est fade. Les gags marchent parce qu'ils sont écrits pour marcher et rarement parce qu'ils sont filmés pour marcher. Si vous ne comprenez pas cette nuance, regardez le début de Hot Fuzz, pour rester dans le thème, et vous verrez comme Wright peut vous faire rire avec une batterie qui se décharge et une gare vide.


Il n'y a aucune vie dans la réalisation. On retrouve le mec qui a fait des petites comédies romantiques jusque là. On ne ressent rien dans la réalisation, on ressent dans l'écriture. Et on se fait très vite chier.


Ce qui est très paradoxal puisque toutes les scènes de la fourmi en action sont assez incroyables, c'est plus ou moins du jamais-vu, les effets spéciaux sont géniaux notamment grâce à l'usage intelligent des objectifs macros, c'est fun, excité, et, tenez-vous bien, tenez-vous bien : y a même une scène extrêmement belle dans une salle des serveurs.


Le combat final est aussi drôle que cool, et quasiment tous les slapsticks marchent parce que non seulement ils sont bien écrits, mais surtout, deux fourmis qui se battent, de base, c'est débile.


On ressent le spectre de Wright tout au long du film à travers certaines scènes qu'on sait qu'il a écrites, le film brille beaucoup plus par son écriture que par sa réalisation, on s'amuse beaucoup. C'est sans prétention, mais ça fait le boulot. J'ai très peur pour le second film malgré le trailer extrêmement hypant, mais on en est pas encore là.

WallydBecharef
7
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le 15 avr. 2018

Critique lue 218 fois

Wallyd Becharef

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