En cette année 2020 où le cinéma français est particulièrement mis à l'honneur au vu du repli des studios américains, j'éprouve une certaine lassitude lorsque je souhaite aller au cinéma à devoir choisir entre deux comédies potaches "à la française", qui ne racontent pas grand chose, qui peinent à me faire esquisser un sourire, qui ne prennent aucun risque dans leur réalisation, dans leur écriture. Antoinette dans les Cévennes constitue un véritable bol d'air frais au milieu cette effervescence de films français dont un certain nombre me sort de l'esprit sitôt après avoir quitté la salle.
Le postulat de départ peut pourtant s'apparenter à ce genre de "rom-com" un peu bouffonnes : Antoinette, une institutrice interprétée par Laure Calamy voulant rejoindre son amant dans un voyage comprenant une succession de randonnées alors que ce dernier est accompagné par sa femme et sa fille. La randonnée devant s'effectuer avec un âne, on s'attend à des situations burlesques où la relation belliqueuse entre l'âne et l'institutrice en quête d'amour va compliquer le périple. Nul besoin de mentir : c'est un peu ça. Mais au début, seulement. Le film prend rapidement une autre tournure que celle vers laquelle il semblait se diriger de prime abord.
Laure Calamy est brillante dans son interprétation du personnage d'Antoinette, grâce à ce côté romantique de l'extrême qui l'entraîne dans sa folle ambition. Niaise mais déterminée à aller jusqu'au bout, Antoinette devient rapidement attachante et on ressent une véritable candeur émaner de ce personnage qui reconnaît elle-même que les raisons qui l'animent ne sont pas bonnes. Comme un interlude dans sa vie d'institutrice, son voyage apparaît comme une plongée dans l'inconnu qu'elle finit par épouser.
Patrick, l'âne d'Antoinette, n'est pas qu'un accessoire. Même si certaines scènes autour de l'animal cherchent à attiser le rire, sa présence agit comme une lanterne dans les errances d'Antoinette, lui permettant de se parler à elle-même, de réfléchir tout en profitant de ces magnifiques paysages. Clairement, l'aventure d'Antoinette est le reflet d'un voyage que n'importe qui pourrait faire pour se recentrer sur soi et sur la nature, épisode éphémère mais apaisant.
Il n'y a pas de morale sentimentale à rechercher dans Antoinette dans les Cévennes. Le propos du film est ailleurs : il est dans cette ode d'amour à la randonnée, aux aventures impromptues mais nécessaires pour s'émanciper de ses attaches, comme aimerait sans doute le faire parfois Patrick.