Je ne sais pas ce qu’a fait Caroline Vignal pendant les vingt années qui séparent son premier long métrage de celui-ci. En tout cas, elle a probablement eu le temps de peaufiner son scénario. Celui-ci raconte l’histoire d’Antoinette, instit éprise d’un papa d’élève et en liaison adultérine avec lui. Bien sûr, elle est pleine d’espoir quant à la suite de leur relation. Alors quand il annule ses vacances avec elle pour les passer avec sa femme, c’est la déception. Il est supposé partir dans les Cévennes pour marcher en famille et qu’à cela ne tienne, Antoinette ira aussi, espérant le croiser sur un chemin creux. C’est parti donc pour une rando éprouvante sur la route de Stevenson avec un âne pour seule compagnie et son inexpérience dans le sac à dos. Il faut admettre que ça commence comme n’importe quelle comédie française, par la thématique comme par le traitement. On sait qu’elle va souffrir mais Antoinette a ce sourire et cette humilité qui la rendent parfaitement sympathique et profondément attachante. De déceptions en trahisons, elle lutte pour retrouver un peu de fierté et d’amour propre. Pas facile quand on est ligoté à une ordure. C’est par la présence bienveillante et patiente de son âne Patrick que va venir l’extériorisation de ses frustrations et l’expression assumée de son mal-être. L’âne au prénom d’homme sera tous les hommes qu’elle n’a pas trouvé et il lui permettra de dire ce qu’elle n’ose dire aux autres mâles. Un scénario tout en rebondissements subtils qui sait prendre le spectateur par la main sans lui imposer les poncifs du genre. A l’image, c’est frais et beau et ça sait se jouer des clichés. Le rythme permet de saisir l’ambiance aussi bien que la métamorphose lente de notre héroïne. En bref, une franche réussite aussi belle que surprenante, du genre qui pourrait réconcilier avec un cinéma qu’on pensait coincé entre les drames des salons parisiens et les comédies champêtres au rire gras. Fortement recommandable donc.