J'ai vu ce film au cinéma sans avoir rien lu dessus, comme à mon habitude lorsque j'attends beaucoup d'un film.
J'avais loupé la Horde Sauvage la veille, mais l'ayant vu depuis, je ne regrette pas vraiment, car ce dernier m'a, malgré certaines fulgurances de génie, globalement ennuyé.

Mais bref, tout commence ici comme dans un western, l'époque est indéfinie, et tout ce que l'on sait, c'est que la fille d'un homme puissant est enceinte, et que le père est très en colère, au point de mettre sa tête à prix, après avoir interrogé sa fille sans le moindre ménagement, une scène vraiment puissante, éprouvante.
Le père gronde "Bring me the head of Alfredo Garcia!!", et là, plan extérieur, grondements de moteurs et une file de grosses voitures quitte la propriété du père.
Et je suis envoûté, accroché au film jusqu'à la fin, fasciné, pris par surprise par ce changement brusque de décor.

Puis l'on suit l'histoire de Benny, campé par le magistral Warren Oates, qui m'avait déjà foudroyé dans les magnifiques films de Monty Hellman, un homme sur le retour, qui rêve pour ne pas sombrer trop vite.
Le portrait de Benny est dressé tout en subtilité, et les révélations sont dans les marges, entre les lignes plus que dans le texte. Il en est de même de la relation amoureuse qu'il entretient avec une ex-prostituée semble-t-il.
Peckinpah dit peu, suggère beaucoup et fait mouche à coup sûr.
Benny est engagé par des hommes de main du père pour retrouver la tête d'Alfredo Garcia, et malgré l'odeur d'embrouille, il s'engage dans cette quête insensée qu'il voit comme un échappatoire à la pauvreté et à la médiocrité. Il a ses défauts, mais c'est un homme au grand coeur, et qui respecte ses engagements, mais l'addition peut s'avérer salée...
S'ensuit un road movie sombre, désespéré, à l'odeur de roman noir, émouvant, terrible par moment.
L'intensité des situations est servie par l'épaisseur des personnages.
La qualité de réalisation est au rendez-vous, Peckinpah signe certainement son meilleur film ici.
Souvent, l'utilisation des ralentis m'apparaît comme une facilité de la part des réalisateurs pour rajouter une pseudo intensité là où il n'y a que du vide. Mais ici, la maestria du réalisateur parle à chaque mouvement de caméra, tout est délibéré, et ceux qui l'ont vu comprendront sans problème pourquoi je parle de ralenti, non pas qu'il en abuse, loin de là, mais lorsqu'il l'utilise, ce n'est pas pour décorer, et certaines scènes sont gravées dans ma mémoire à jamais.

toma_uberwenig
9
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le 2 mai 2011

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toma Uberwenig

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