
Le charme des frères Coen est d'avoir une infinie affection pour leurs personnages et leur pays. Leur pays, ils l'auront traversé, tout comme ils auront traversé les genres et les époques. Grâce au cinéma, c'est une véritable radiographie de l'Amérique qui est faite. Une Amérique où les plus adorables loosers n'ont de cesse d'essayer de trouver leur place. La question de l'identité est prépondérante dans leur oeuvre.
Ici, c'est particulièrement clair : il y a un jeu sur les noms : Hi et Ed (des diminutifs), le nom d'emprunt du propriétaire de "Unpainted Arizona" et les noms des cinq bébés. Serait-il difficile de naître aux USA ? En témoigne la douloureuse scène "d'accouchement" où les deux frères sortent littéralement de terre en s'échappant de prison. Oui, il est difficile de trouver ses marques sur ce territoire où chacun peut être un autre. Il ne faut pas se tromper de destinée. Policier ou voleur ? Et quand on ne peut être parent, quand on ne peut donner naissance, a-t-on le droit de "trafiquer", de tricher ? Peut-on voler un bébé et fonder une famille, comme si de rien n'était ?
Les frères Coen sont indéniablement de grands cinéastes car ils soignent tous les aspects de leur film. Le scénario est finement écrit, chaque personnage possède ses particularités de langage. Le casting est parfaitement composé (Nicolas Cage est dans une excellente forme capillaire). Et que dire du rythme de la mise en scène, du soin apporté à la composition du cadre ainsi qu'au montage ! L'ensemble fait d'Arizona Junior un film tout à fait maîtrisé, burlesque au possible où tout le monde semble avoir pris un plaisir fou.