Fidèle à lui-même, le Studio Ghibli nous offre, encore une fois, une merveille de l'animation. Il aura fallu près de 40 ans à Miyazaki et à son collaborateur Isao Takahata pour concrétiser sa réalisation. S'inspirant du premier tome de « Les Chapardeurs » de Mary Norton, Miyazaki a écrit le scénario du long métrage et a confié sa réalisation à Hiromasa Yonebayashi, jusqu'alors animateur du studio.
C'est aujourd'hui le plus jeune à avoir réalisé un film au sein du studio. Salué par Miyazaki lui-même et par 8 millions de spectateurs au Japon, Arrietty et son réalisateur apportent un souffle nouveau à la famille Ghibli et nous promettent encore de nombreux films magiques.
Moins moralisateur que ses prédécesseurs, Arrietty n'est pas sans rappeler « Mon voisin Totoro » et son côté écologique. Un scénario qui peut paraître simple aux premiers abords, mais qui se révèle porteurs de nombreux messages écologiques et enfantins. Ainsi, de nombreux thèmes apparaissent ainsi au fil de l'histoire.
On découvre, des yeux de la petite Arrietty, le monde des chapardeurs. C'est un monde en totale harmonie avec la nature, porté par des dessins soignés et colorés. Les feuilles et fleurs décorent magnifiquement les murs de la petite maison et l'univers chapardeur est empli de petits objets sans grand intérêt qui trouvent ici une bien belle utilité. C'est un havre de paix et de sérénité au cœur d'une maison humaine si peu naturelle. La musique joyeuse et entrainante, de la bretonne Cécile Corbel, est parfaitement bien adaptée à cet univers si particulier qui s'offre à nos yeux.
Arrietty va avoir 14 ans et il est temps pour elle de découvrir le monde des humains. Tout est si grand, si vaste et si étrange. Une atmosphère lourde accompagne cette découverte car on notera l'absence de musique à ce moment. Seuls les bruits (de l'horloge, du réfrigérateur...) plus lugubres les uns que les autres résonnent dans nos oreilles. Une manière très intelligente de la part du studio Ghibli de nous présenter le passage par lequel on est tous passé un jour : la découverte du monde des adultes. Arrietty est accompagné de son père qui connait cet univers mystérieux et la guide. Comme chaque enfant que nous étions, guidé par nos parents pour apprendre à survivre et se débrouiller dans ce nouveau monde.
Le deuxième message, que nous offre ce film d'animation, est un thème très cher au Studio Ghibli. C'est la dénonciation de la destruction de la nature et de ses espèces en péril. L'enfant malade, Shô, croit dans une scène tout savoir grâce à ses livres et présente les chapardeurs, d'une manière fataliste, comme une espèce qui est amenée à disparaître. Mais Arrietty lui rétorque que ce n'est pas le destin qui les détruit mais les actes égoïstes des humains, qui ne se préoccupent nullement du respect de la nature. Elle finit par déclarer que l'on peut survivre, quelle que soit sa situation, si l'on se bat pour y arriver. Message classique, mais poignant car il est porté par un être si petit qu'on le croirait faible et incapable, mais qui se révèle posséder une grande force de conviction. En effet,les chapardeurs doivent bel et bien survivre dans ce monde envahi par les humains.
Ainsi, chaque infime objet est d'une grande utilité : les boucles d'oreille servent de harpon, les timbres servent de tableau, les clous font office d'escalier et le sucre ou les mouchoirs, qui nous paraissent anodins, leur sont vital.
Des touches d'humour très japonaises ponctuent timidement le film. L'animation du chat qui est coincé par la grille est tout bonnement magistrale. J'ai aussi apprécié la scène du corbeau qui se coince lui aussi dans la moustiquaire du premier étage et qui se prend un coup de pantoufle de la bonne en plein dans le bec. C'est de l'humour simple, presque enfantin, assez caractéristique de la pudeur nippone.
En ce qui concerne le visuel, on ne peut qu'applaudir les magnifiques dessins du Studio. L'univers Miyazaki est décidément infiniment riche et varié. On note la différence des dessins entre les scènes du monde des chapardeurs et celles du monde des humains. Le monde des chapardeurs est détaillé à souhait, chaque petit détail fait l'objet d'une finition poussée et d'une coloration sans pareille. Les dessins du monde des humains sont quant à eux flous, sombres et froids, ce qui confirme l'idée d'un univers inconnu pour Arrietty.
J'ai littéralement été charmé par la scène de la maison de poupée que découvre le petit garçon. C'est, pour moi, la plus belle scène du film. Tout y est : la beauté extrême du dessin, la musique émotive au possible et l'ambiance de conte de fée ! Une scène magnifique.
Les musiques du film ont été réalisées par la harpiste et chanteuse celtique Cécile Corbel. Une française amatrice des films Ghibli. Pour l'anecdote, Cécile avait envoyé un cd, sans grand espoir, au quartier général Ghibli, avec un petit mot de soutien et d'encouragement. Le hasard a voulu que ce même cd se retrouve sur le bureau du producteur des films Ghibli, Toshio Suzuki, qui est immédiatement tombé sous le charme de la musique celtique de la française. Elle fut donc invitée à élaborer les musiques d'Arrietty.
Je trouve que ces mélodies celtes s'accordent parfaitement à l'univers chapardeur, mais un peu trop de mélodies chantées à mon goût.
Les personnages sont moins complexes que dans les autres films du Studio Ghibli. On cerne assez facilement « la méchante et le gentil ». A l'image de Chihiro, seule la petite Arrietty est vraiment marquée par son aventure avec le garçon humain. D'abord excitée par la découverte d'un nouveau monde, elle se rend bien vite compte que ce dernier n'est pas aussi rose qu'elle le croyait. Mais elle va découvrir que tout n'y est pas noir non plus. Elle va faire des choix, qui auront des répercutions sur son entourage, des choix qu'elle assumera tant bien que mal. On note bien l'écart psychologique d'Arrietty entre le début et la fin du film. Au début, Arrietty est une enfant qui n'a jamais quitté son cocon familial. A la fin, on la sent adulte. Elle a découvert ce monde d'humains (et donc pas extension d'adultes) et s'est forgée un caractère pour affronter tous ses dangers.
La visage du garçon Shô me fait étrangement penser à Ashitaka de Princesse Mononoké. Serait-ce là un clin d'œil ? Ce garçon quitte la ville pour se reposer dans cette maison reculée. Il est malade, ne croit pas en la réussite de son opération du cœur, ses parents divorcent et l'oublient, et il se laisse mourir à petit feu. Mais la rencontre avec Arrietty va lui donner à nouveau le courage de vivre et de se battre. Un autre personnage atypique, Spiller. C'est le sauvage simplet attachant et drôle, le charpardeur type qui doit survivre dans la nature.
Pour ma part, Arrietty, le petit monde des chapardeurs est une aventure humaine extraordinaire et une belle réussite qui se hisse, sans difficulté, aux côté de ses prédécesseurs.
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le 16 avr. 2014

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