Rythmé par une BO composée par Miles Davis himself et un scénario lent mais d’une richesse étonnante, le film de Louis Malle souffre malheureusement de trop de défauts pour être mémorable. On a parfois l’impression de se retrouver en plein milieu d’un Hitchcock des mauvais jours, sans la tension ni la gravité escomptés.
Le début du film offre pourtant une ouverture très prometteuse, et la possibilité d’instaurer un sentiment paranoïaque captivant, mais à la place il fait le choix de présenter en filigrane trop d’intrigues secondaires qui, si elles sont indispensables à la route que le réalisateur veut prendre, fait perdre cependant son sens au pitch du métrage. La gestion de l’espace détonne beaucoup, donnant la part belle à un extérieur vaste faisant passer l’action de deux jeunes gens chapardeurs au premier plan au détriment de Julien Tavernier (et même de son amante) qui peine à assumer son statut de personnage principal. On ne ressent ni sa panique ni la moindre angoisse, la lumière ne donne aucune substance à l’obscurité censée l’entourer (même pour un film en noir et blanc on peut faire nettement mieux), et le cadrage englobe trop d’espace et ne développe pas assez de promiscuité pour toute potentielle claustrophobie anxiogène.
L’intrigue parallèle de Louis et Véronique quant à elle manque de naturel et transpire l’artificialité. Du côté des jeunes gens comme des touristes allemands les réactions sont particulièrement peu crédibles, et ni la brève course-poursuite ni l’assassinat ne sont filmés de manière très cohérente. A l’instar de la musique, malgré sa très bonne facture (Miles Davis oblige), qui donne peu de relief à l’ensemble du métrage, car assez décalée par rapport à l’intrigue qu’elle sert.
Même si Lino Ventura joue à merveille (ce qui est dommage pour le peu de scène dans lesquelles il apparaît) et si le reste de réalisation ne manque pas de qualités, Ascenseur pour l’échafaud demeure une pièce relativement mineure dans le monde du film noir français du milieu du siècle.