Avant toute chose, je tiens à préciser que je ne suis pas allé voir la première adaptation de Louis Clichy et Alexandre Astier, et que je ne suis pas un inconditionnel de l'univers de la série culte Kaamelott. D'aussi loin que je me souvienne, j'étais un fervent admirateur des bande-dessinées de Goscinny et Uderzo quand j'étais enfant, une admiration m'avait logiquement conduit à m'enquiller les nombreeeeeuuuuuses adaptations cinématographiques qui avaient vu le jour, avec une affection plus prononcée pour celles parues dans les années 70. Pour autant, c'est avec un œil un peu neuf que je me replongeais dans cet univers, d'autant plus que je restais sur une note plus que mitigée avec Astérix chez les Vikings. Je suis donc allé voir le dernier né des aventures du célèbre gaulois sans la moindre idée reçue, sans la moindre appréhension, bref, dans l'inconnue la plus totale et prêt à apprécier le film pour ce qu'il avait à m'offrir, pour ses qualités "filmiques" plus que pour ses morceaux de nostalgie.


D'entrée de jeu, Le Secret de la Potion Magique m'a immanquablement rappelé Le Coup du Menhir, lequel s'était déjà grandement basé sur les albums Le Combat des Chefs et Le Devin. Par le fait qu'un accident survenu à Panoramix soit l'élément déclencheur du récit tout d'abord. Dans Le Combat des Chefs, il se prenait un coup de menhir et perdait la mémoire, plongeant tout un village dans la peur et le désarroi, dans Le Secret de la Potion Magique, il tombe d'un arbre et se foule la cheville, signe annonciateur d'un mauvais présage. Il ne s'agit pas là de la seule référence évidente, ainsi le personnage de Sulfurix fera inévitablement penser à Prolix, par son allure, sa gestuelle, et son caractère inquiétant, et plusieurs scènes et personnages feront directement écho à ces albums. Sauf que d'un point de départ similaire, le film s'articule à sa façon et suit un chemin différent, car ce malheureux incident, plutôt que d'affecter Panoramix physiquement, lui fait plutôt prendre conscience de la fugacité de son existence et de la nécessité de transmettre son savoir à un futur successeur, pour le bien du village et de ses occupants. C'est ainsi qu'accompagné de nos larrons habituels, Panoramix se met en route d'un disciple à travers la Gaule, une route qui sera évidemment semée d'embûches et qui verra quelques joyeuses scènes de castagne et des situations drolatiques bien senties, bref, du Astérix dans le texte.


Je ne raconterai évidemment pas toute l'histoire, mais on sent qu'Astier et son équipe sont de vrais fans des bande-dessinées tant ils respectent de façon méticuleuse le matériau sur lequel ils se basent et qu'ils tentent malgré tout de moderniser à doses assez bien distillées. Je dois cependant avouer que j'ai des réserves assez persistantes sur quelques plans, principalement le scénario et le développement de certains personnages. Sur le plan de rythme, le film est tout sauf longuet, à vrai dire les une heure trente sont passées assez vite et on ne peut pas dire qu'il ne se passe pas grand chose dans le film, le problème étant qu'il ne prend justement pas suffisamment son temps pour exploiter les protagonistes qu'il introduit ou les idées qu'il amorce en amont. De quoi parle Le Secret de la Potion Magique en premier lieu ? De cette quête de succession et de la nécessité de passer le relais aux générations futures ? Du fait fait que notre genre ne conditionne pas ce que nous sommes et que les femmes sont tout autant capables que les hommes ? De César (joli caméo au passage) qui entreprend une nouvelle fois la destruction du village gaulois ? Le film est sans doute très bien intentionné à ce niveau, mais s'emberlificote un peu trop à force de vouloir aller un peu partout, il y a un manque de focus selon moi qui peut potentiellement nuire au suivi de certains spectateurs, ce qui fût mon cas. Et mon problème, c'est que j'ai eu l'impression qu'il soulevait pas mal de thèmes, mais qu'il n'en développait aucun.


Constat similaire en ce qui concerne les personnages, principalement à cause d'un manque d'exposition. J'ai par exemple trouvé que Pictine était assez vite reléguée au second plan, pourtant le film semble lui donner une certaine importance vu qu'elle apparaît dans la plupart des plans et que c'est même d'elle que viendra la résolution. Le souci étant que de son introduction jusqu'à la fin du long-métrage, elle est là sans être là, elle accompagne plus qu'elle n'agit ou même ne donne son avis, comme si sa présence répondait surtout à un besoin de trouver un modèle identificatoire pour nos petites têtes blondes, ce qui est dommage car j'aime bien les personnages d'enfants en général. Teleferix souffre également d'un manque de caractérisation et de mise en lumière selon moi. J'ai eu l'impression qu'il subissait plus les événements qu'autre chose et son incapacité décisionnelle ne l'a pas spécialement rendu attachant à mes yeux. Principal antagoniste de l'histoire, Sulfurix a des motivations bien trop vagues pour pleinement convaincre, même si comme dit précédemment, je trouve qu'il en impose assez par sa longue silhouette, sa maîtrise de la magie, et son design. Je sais que c'est un film d'animation et qu'il a surtout vocation à être un spectacle pour petits et grands, ce qu'il fait bien, mais je ne peux m'empêcher de penser qu'il y avait matière à raconter quelque chose d'un peu plus fort ou engageant, et les personnages participent aussi à ça.


Ce faisant, et histoire de nuancer un peu ce premier constat, il y a aussi un certain nombre de choses qui m'ont plu. L'animation pour commencer, est dans le haut du panier des productions 3D actuelles. Si la CGI n'aura jamais le potentiel créatif de l'animation traditionnelle, je trouve que le rendu proche des bande-dessinées, la fluidité et le naturel des mouvements, et l'utilisation des couleurs sont un témoignage de la réussite technique et artistique du film. Et cette prouesse se répercute forcément de manière positive sur la mise en scène, avec des passages qui arrivent à poser des ambiances tantôt insouciantes et bucoliques, tantôt sombres et inquiétantes. Et en parlant de créativité dans la mise en scène, il convient aussi de parler de l'ultime combat, aussi drôle qu'étonnamment exaltant. En ce qui concerne l'humour, s'il y a encore des références un peu faciles, des blagues enfantines ou des vannes qui ne feront pas rire tout le monde (les fans de Kaamelott apprécieront), le film n'est jamais lourd à ce niveau, et la bonne humeur est au rendez-vous. C'est également le premier long-métrage d'animation Astérix que je voyais sans Roger Carel, et si je dois avouer que les premières minutes ont été assez étranges, je me suis assez vite habitué et Christian Clavier campe un Astérix "animé" ma foi bien convaincant. L'occasion aussi de saluer la performance des autres acteurs, pour la plupart tous habitués à l'exercice du doublage de films ou de séries animés, avec entre autres Bernard Alane et Gérard Hernandez.


Au final, Astérix : Le Secret de la Potion Magique est un film d'animation plus qu'honnête, qui s'il n'invente rien et garde des côtés très (trop ?) gentillets, reste un divertissement suffisamment solide pour vous permettre de passer une agréable séance, que vous soyez fans du petit gaulois ou non. Je regretterai juste qu'il n'arrive pas véritablement à s'extirper de cette image de dessin animé calibré pour plaire à un large et jeune public, avec les qualités et les poncifs inhérents aux productions du genre.

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le 25 nov. 2018

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