Première constatation : il n’y a pas de quoi rire. Ce n’est pas une question de ne pas être prêt à rire sur un tel sujet, c’est que le drame n’est jamais traité avec légèreté, et que les gags expriment une phobie du catholique si gerbante que j’avais envie de frapper le réalisateur. Quel courage, taper sur les cathos en laissant tranquille les autres religions qui ont elles aussi leur lot de casserole tout en ayant une influence bien plus grande (comparez les poids des lobbies religieux entre eux pour en avoir le cœur net) ! Quelle magnifique démonstration de lucidité athée ! Quel humanisme que de montrer des chrétiens islamophobes qui tirent sur des images de Ben Ladden et qui s’entre-tuent par accident ! On pourrait en rire, si ces dénonciations aussi ahurissantes n’étaient pas prétextes à autant de cathophobie. En s’ouvrant sur un clip de charité dans lequel deux prêtres annoncent que l’Eglise va vivre en vampire sur le dos de ses fidèles, le film donnait direct le ton. En montrant un prêtre parler de l’émancipation de la femme dans un club de strip tease, on voit quel niveau on a atteint. Oui, évidemment qu’il y a une part de vrais dans ces clichés, mais cette dénonciation élude toute subtilité et surtout montre bien à quel niveau de mépris on est descendu. Quand la trame dramatique s’enclenche, que le suicide a lieu et les aveux du fils sont faits, plus aucun crédit n’est accordé aux hommes d’église, qui se retrouvent alors traités comme les pires déchets de l’humanité. Le discours de l’évêque pendant lequel il balance que le gamin était une petite tante tentatrice et que cette incartade avec le prêtre cache un mal familial beaucoup plus grand, c’est monstrueux et criminel. Non seulement le film n’accorde même pas à l’Eglise les authentiques raisons de ses fautes (la discréditation de son image et de sa réputation notamment, la honte aussi), mais il pervertit l’institution sans chercher un seul instant à faire rire ni à apporter des éléments tangibles, qui ont un sens. Comme si l’Eglise vivait de la culpabilité du monde (parce que c’est un peu ça ta vision, Vincent, les fidèles cathos sont des cons qui se sont faits embobinés et le personnel d’église des vampires ou des fanatiques religieux, tous impliqués dans des manigances criminelles à différents niveaux). Et là, la mère éplorée trouve une liste de prêtres à risque, et décide d’aller tous les dézinguer avec le flingue du père et le fusil de son gosse suicidé. C’est le pot-aux-roses. On a même des gags pendant la séquence, une justification du genre « mais c’était qu’une seule fois ! » ou « c’était juste un gamin ! ». Ha ha. Et elle les exécute. Merveilleux, admirable ! Pourquoi ne fait-on pas aussi cela sur les professeurs, seconde profession à être accusée de pédophilie ? Ah, mais parce qu’il y a des athées ! Parce que beaucoup d’accusations sont des bobards inventés par les élèves ! Ah, mais cela ne s’applique pas avec les religieux ! Avec des suceurs de crucifix, aucune raison de prendre des gants ! Ils ont fait l’inquisition et les bûchers ! Ils doivent payer maintenant. Surtout que certains fanatiques dangereux s’arment ! A ce stade de l’histoire, la démonstration même de l’inanité de ce film est limpide, même pas besoin de développer. Quand on traite la religion avec un tel mépris, on ne sera pas surpris de voir des recrudescences de violences et des discriminations religieuses.

Mais alors, pourquoi avoir rajouté un point à ce film. Essentiellement pour certains détails de sa première partie, notamment sur les débats à thématique religieuse, où d’intéressantes questions sont posées par des auditeurs plus ou moins agressifs, et où les réponses, malgré les maladresses, vont dans un sens plutôt constructif. Pareil pour la gifle et le rappel de la tolérance religieuse à l’égal des « arabes ». Mais même sur ce terrain, le film joue de fourberie en le rendant de plus en plus contradictoire (car personne n’a les mêmes valeurs, ou les défends de la même manière, avec les mêmes arguments). On se retrouve alors avec un prêtre qui dit « dieu, c’est la question qui a oublié sa réponse. Et aussi la réponse qui n’a plus besoin de question. » Oui, on voit très bien ce que ça veut dire, mais le sortir dans un pareil moment, c’est montrer la spiritualité comme de la vacuité et du mysticisme pour abrutis consanguins. C’est de toute façon probable que le script n’envisage rien d’autre pour la religion. En tout cas, ça n’aura pas été ici qu’on aura rigolé de la pédophilie ni qu’on aura progressé sur le sujet.
Voracinéphile
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le 30 nov. 2014

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