"Je jure devant Dieu que je ne me laisserai pas abattre !"

Voilà, c’est fait, je l’ai vu, ce film qui est considéré comme l’un des meilleurs de tous les temps, et le plus gros succès de l’histoire du cinéma, « Autant en emporte le vent », et j’ai beaucoup aimé.
Je dois avouer que j’ignorais tout de ce film, excepté qu’il a suscité une petite polémique il y a peu de temps en raison de son traitement du sujet de l’esclavagisme, mais je ne connaissais rien de l’histoire et je méconnaissais même le cadre temporel et spatial.


Il s’agit donc d’une romance, aussi compliquée soit elle, vécue avant, pendant, et après la guerre de sécession d’Amérique. Le film ne s’intéresse pas aux hommes partis en guerres, mais aux femmes restées à la maison, notamment en la personne de Scarlett O’Hara, une petite bourgeoise rebelle et capricieuse, vivant à la campagne. Si au premier abord, la jeune femme nous parait détestable en raison de ses nombreux défauts d’enfants et son attitude d’allumeuse, on s’aperçoit au travers les événements tragiques qu’elle vit l’ampleur de sa force et de son courage. Une nature profonde qui n’échappe pas à Rhett Butler, un faux gentleman qui s’est préservé de la Guerre, et qui tombe amoureux de la belle. Scarlett malheureusement donne de l’espoir à un amour impossible, et voue une adoration pour le mari de sa cousine.


Quand j’ai raconté l’histoire à mon ami le lendemain, il m’a dit : « Oui, en fait, c’est une histoire de bonne femme… », d’une certaine manière il a raison, mais en réalité le film est bien plus profond que cela, car il bénéficie d’un rapport poussé entre les personnages qui sont très bien définis, parfaitement vivant et humain, dans leurs failles comme dans leurs ambitions. Aussi l’intrigue aborde beaucoup de thèmes, et il se passe énormément d’événements dans cette histoire, et chaque aspect est soigné, rien n’est laissé au hasard.


Une bonne histoire ne fonctionne pas sans de bons personnages. Ici les protagonistes sont vraiment intéressants, car ils ne répondent pas vraiment aux stéréotypes hollywoodiens, à commencer par cette connasse d’héroïne qu’on a davantage envie de détester qu’admirer, pareillement pour Rhett un séducteur invétéré qui va chez les putes et qui joue avec les sentiments des femmes. Deux personnages centraux surprenant, mais terriblement intéressant. Et le jeu des acteurs est admirable. Vivien Leigh et Clark Gable sont étonnants. Cette pauvre Vivien Leigh a dû avoir l’impression de tourner une bonne partie de sa vie pour ce film tellement il est long (4h), par ailleurs elle participe à quasiment toutes les scènes, ça a dû être un véritable calvaire pour elle, et pourtant à l’écran, tout semble facile pour elle. Elle est exceptionnelle. Olivia de Havilland, qui joue Melanie Hamilton, la cousine de Scarlett, est remarquable. Elle brille, tout simplement.


Les ambiances et les décors sont très variés. La musique en revanche n’est pas inoubliable.


Si dans l’ensemble j’ai passé un bon moment, je dois dire que j’ai été étonné par certaines séquences, mais je n’irais pas jusqu’à soutenir la polémique de l’accusation de racisme de l’œuvre. En revanche, j’ai été très surpris par les petites voix stupides dont les noirs sont affligés. Comme le ton de l’œuvre n'est clairement pas sur un registre comique, on se demande quel est le but d’une telle entreprise ? En effet, certains noirs, je pense notamment à la gamine qui doit accoucher Melanie, sont juste stupides, menteurs, et surtout sans aucune profondeur, comme si finalement ces personnages ne méritaient pas l’effort de quelques soins. Heureusement, Mamma, échappe à ce sort, malgré un accent très connoté, mais pas de quoi crier à l'indécence. Certains noirs sont décrits de manière abominable, ce qui tendrait à justifier la façon de penser du réalisateur. Toutefois, le fait que le terme « nègre » soit employé, et la présence des esclaves dans le film me paraissent justifiés et même inévitables. L’histoire se déroulant autour de la guerre de Sécession, dans un souci de réalisme il était préférable de montrer la réalité telle qu’elle était. Si cette réalité avait été absente du film, nous aurions aujourd’hui crié au mensonge et à l’hypocrisie. Pour ma part, je trouve que « La Naissance d’une Nation » est un exemple plus parlant de film raciste, et qu’il est malhonnête de faire ce procès à « Autant en emporte le vent », car ce dernier ne travestit pas les faits, il les montre tel qu’ils étaient, avec des personnages qui soutiennent l’abolition de l’esclavagisme et d’autres non, ce qui en soit était la manière de penser des blancs de l’époque, aussi abjecte soit-elle.


Ce qui m’a le plus ennuyé ce n’est pas le traitement du sujet de l’esclavagisme, mais la complaisance à l’égard des agressions sexuelles faites envers les femmes, comme si finalement le film justifiait sans ambages ces comportements. Il y a une scène qui m’a interpellé, et que j’ai trouvé tout à fait déplacée, celle où Rhett attire Scarlett contre lui, il l’oblige à l’embrasser alors qu’elle le somme de le lâcher, de ne pas se coller à elle, et il l’embrasse avidement alors qu’elle se débat… Heu ! était-ce vraiment nécessaire ? C’est vrai que lorsqu’on connait l’issu de la romance on peut dédramatiser cette scène, mais à ce moment du film Scarlett déteste cet homme, donc on peut clairement définir qu’il s’agit d’une agression, et l’attitude de Rhett va encore plus loin dans l’horreur, car sa satisfaction laisse entendre qu’il s’agit là d’un comportement naturel, non pas celui d’un gentleman, mais celui d’un homme qui parfois a le droit de se laisser envahir par ses pulsions. Cette scène est à gerber.


Le spectacle dans son entièreté est très divertissant, malgré ces quelques maladresses que l’on doit davantage aux mœurs d’une époque qu’à un jugement, je l’espère. En ce qui me concerne, j’ai adoré ce film et je comprends les raisons qui ont fait de lui, l’un des plus grands films du cinéma.

Casse-Bonbon

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