Baby Driver joue de sa petite musique toujours allumée pour, justement, allumer le feu dès qu'il le peut. Pas avare en solutions déjantées, en séquences illuminées de toutes parts, il peut aussi faire figure de modèle, de parfait petit manuel d'instructions pour tables de montage et le compagnon idéal de l'équipe technique lorsqu'il est question de faire ressentir au spectateur la musique comme, non pas un appui, mais un élément du récit à part entière.
Le scénario n'est pas original, de toutes manières ceux tout au fond s'en foutent, et ne permet malheureusement pas à ses personnages d'exister au-delà de leur modèle imposé : Buddy, Bats et Darling campent respectivement le rôle du bad boy mal rasé, du sadique de la street et de la bimbo dangereuse comme la poudre. Kevin Spacey, le riche patron bouffi, organise et Baby, et bien, il conduit en prenant soin d'avoir toujours du bon son. Son personnage fétichiste du son n'apportera rien d'autres si ce n'est quelques sourires comme cette séquence de car-jacking amusante où Baby tente par exemple de trouver une bonne radio avant de décaler. Un peu de suspense aussi lorsque l'équipe met la main sur ses dizaines de cassettes. Autrement, il est homme-objet, fade, bien planqué derrière ses lunettes lui donnant de faux airs de NWR, à l'instar de ses coéquipiers qu'on appellera jamais par leur véritable nom.
Baby Driver a de sérieux arguments techniques et épouse les virages avec puissance mais, derrière ses nombreuses façades pour cacher la pauvreté du scénario (avec toutes les ficelles attendues d'un film de braquages), ne parvient pas à tenir en haleine jusqu'au bout. L'art du gadget va jusqu'à substituer le beat d'un morceau avec le son de tirs d'armes automatiques ou de surligner les émotions des personnages non pas par des échanges verbaux intéressants mais par un morceau.
Film jukebox sans doute, Baby Driver partage avec ses cousins à roues motrices l'art de la frime mais n'a pas autant de testostérone débile que Fast&Furious (on l'en remercie), pas autant de gueules et de bras cassés que chez Guy Ritchie mais distille le même enthousiasme référentiel que Tarantino sans en avoir pourtant le bagout. C'est un énième film d'Edgar Wright, un énième exercice de style amusant pour pas grand chose au final, le film délaissant les virages sinueux du début pour finalement tracer tout droit jusque dans son final mignon tout plein, décevant, faisant tomber cette entreprise pas toujours aimable fondée sur l’adrénaline et le style dans la bluette romantique.