Dans sa manière de présenter New York avec un réalisme brut, Bad Lieutenant comporte de nombreux points communs avec Mean Streets. A l’instar du long-métrage de Martin Scorsese, le film de Ferrara se déroule principalement dans trois lieux charnières pour le héros : son domicile, l’église et surtout la rue.
Poisseuse, cette dernière est le lieu de perdition du flic, qui y multiplie les abus de pouvoir. Constamment défoncé, le personnage donne au film son rythme lancinant. Alternant entre alcool, héroïne et crack, le lieutenant qui n’est jamais nommé tient debout grâce aux substances qu’il ingère et cette impression s’accentue à mesure que le récit progresse. Alors que sa vie de famille ouvrait le long-métrage, elle est peu à peu délaissée par Ferrara et son personnage, qui lui préfèrent les squats et l’église vandalisée par les deux hommes au moment du viol.
Le flic semble vagabonder d’un endroit à un autre à la manière de Johnny Boy, la petite frappe incarnée par Robert De Niro dans Mean Streets. Comme lui, il est endetté et à la recherche d’une échappatoire qu’il ne trouvera jamais. Le ripou semble en effet condamné à errer dans les rues de New York, prisonnier d’une ville qu’il n’a cessé de souiller. En cela, l’éclairage rougeâtre de certaines séquences et les gros plans sur le visage empli de détresse d’Harvey Keitel amplifient la sensation d’enfermement dans la Grosse Pomme. Comme Johnny Boy, le lieutenant provoquera par ailleurs lui-même sa perte en insultant ouvertement son créancier dans un bar, seule opportunité de pouvoir enfin sortir d’une manière ou d’une autre de son quotidien misérable.
Retrouvez l'intégralité de la critique sur CinéSérie.com