L’un des films (si ce n’est pas LE film) les plus attendus de l’année. Le blockbuster autour duquel il y a eu depuis plusieurs mois un engouement si énormissime que l’on n’arrêtait pas d’en entendre parler. Sans compter une promotion faramineuse durant laquelle nous avions eu droit à moult affiches, bandes-annonces, interviews et buzz sur le net pour attiser la curiosité aussi bien des fans que du grand public en général. En même temps, avec un film qui doit (enfin) lancer la franchise de Justice League et qui réunit en plus de 2h30 Batman et Superman à l’écran, cela n’a pas de prix ! Et pourtant, je faisais parti de ceux qui ne le sentaient pas. De ceux qui se souvenaient de l’arnaque qu’avait été Man of Steel (bien que je le défende sur certains points) et qui appréhendent un projet fait dans la précipitation pour marcher sur les plates bandes de Marvel/Disney. Sur les dernières secondes avant le visionnage, je voulais encore croire que je pouvais me tromper ! C’était peine perdue…


Qu’on l’attendait ou pas, Batman v Superman ne plaira pas à tout le monde, c’est certain. Pour la simple et bonne raison que Zack Snyder et son équipe se sont montrés incroyablement couillus pour nous livrer ce film, qui s’éloigne au combien des longs-métrages Marvel devenus les standards du super-hero movie dans l’inconscient collectif. À savoir des blockbusters au scénario classique qui ne pensent qu’à divertir via de l’action à gogo et un humour assumé. Avec Batman v Superman, vous aurez plutôt droit à, comme pour Man of Steel, une ambiance beaucoup plus sombre et pessimiste ainsi que plus de psychologie de la part des personnages contre une scène d’action (sans exagération) placée à la toute fin du film pour conclure en beauté. Couillus donc car le grand public ne s’attend pas à ce genre de choix qui, pourtant, s’avère bien plus intéressant qu’un schéma scénaristique qui ne cesse de se répéter de projets en projets. En cela, je donne un bon point à Batman v Superman pour ce parti pris casse-gueule. D’autant plus que si le film fait cela, c’est pour mieux s’intéresser à ses personnages, leur offrant une dimension que nous ne connaissions pas : un Superman torturé par ses actions et le regard que porte le public à son égard, un Batman bouffé par la perte de proches et de son idéal au point de n’être plus qu’un justicier masqué violent et sans espoir. Sans oublier les nombreuses thématiques introduites ici et là (racisme, religion, terrorisme…) qui poursuivent avec intelligence les faits vus dans Man of Steel pour donner encore plus d’ampleur à l’ensemble, et vous obtenez une intrigue tellement riche qu’elle en devient passionnante. Bien plus qu’un film estampillé Marvel !


Mais comme pour Man of Steel, tout cela a bien du mal à passer. D’une part parce que les fans d’action n’en auront pas forcément pour leur argent, étant donné qu’il faut attendre une bonne heure et demie pour qu’il se passe réellement quelque chose (hormis une scène d’ouverture dantesque), devant pour le coup subir tout un enchaînement de dialogues sous forme de métaphores avant que cela pète sous leurs yeux. De l’autre parce que l’ensemble se montre finalement assez bancal. Car si les thématiques et les intentions sont bien là, on se retrouve une nouvelle fois avec une trame qui appuie tellement sur ses sujets que cela en devient lourdingue à force de se répéter continuellement. Si le début du film nous captive, il peine à tenir notre attention à force de traîner autant la patte et nous perdre. Et ce n’est pas les quelques séquences de visions/cauchemars, les ajouts à la Justice League (dont une Wonder Woman inutile) et des références invisibles aux yeux du spectateur lambda, semblant plus meubler qu’autre chose, qui vont arranger quoi que ce soit.


Et c’est dommage d’éprouver de l’ennui devant un tel film car ce dernier avait tellement de matière à revendre. Non seulement ses thématiques mais également un casting de très grande qualité qui propose bon nombre de surprises : un Ben Affleck qui en impose en Batman, un Jesse Eisenberg démentiel en Lex Luthor, un Jeremy Irons sympathique en Alfred et une Gal Gadot crédible en Wonder Woman. Une photographie qui en jette, proposant des plans de toute beauté, même si pour certains, les thématiques et le symbolisme qui s’en dégage sont encore une fois trop appuyés. Une bande son certes pas mémorable mais qui accompagne le film comme il se doit. Un character design bien pensé pour ne pas ringardiser les personnages (le plus gros défi étant le look de Wonder Woman). Et quelques séquences d’actions qui envoient du pâté, comme l’introduction à Métropolis ou bien la scène où Batman s’attaque à tout un lot de criminels façon Arkham Asylum et Arkham City. Oui, il est dommage de commencer à s’ennuyer alors que le film avait toutes les cartes en mains pour être le divertissement de qualité qu’il aurait pu être !


Et tout cela pour quoi ? Pour arriver au combat entre Batman et Superman ! Le duel que tout le monde attendait… et qui se trouve être un véritable coup d’épée dans l’eau : aucune puissance visuelle (si ce n’est l’image et le cadre qui rappelle le duel final dans Matrix Revolutions), aucun impact, aucun panache… rien, si ce n’est quelques idées vite fait expédiées. Pour enchaîner aussitôt après par des facilités scénaristiques abusées (l'alliance entre Batman et Superman se fait trop rapidement) et un combat final avec Doomsday qui rappelle fortement celui entre Hulk et l’Abomination dans le film de Louis Leterrier (en mieux, j’en conviens) qui pue le numérique à plein nez (et pas toujours de bonne qualité, comme dans le reste du long-métrage) et qui n’a même pas le spectaculaire de la dernière heure de Man of Steel. Un comble alors que de la part d’un film qui s’avançait sur le fait d’en mettre plein la vue, notamment avec l’affrontement entre ses deux têtes d’affiche, il y a de quoi être déçu par le résultat final !


Même si je ne sentais pas du tout ce blockbuster, je me surprends à être déçu par ce que j’ai vu, tant je commençais à plonger dans l’intrigue aux vues de ses qualités et de son culot. Mais à force de trop tirer sur la corde et de ne plus savoir quoi raconter pour finir sur une action parce qu’il fallait de l’action, le long-métrage ne parvient jamais à impressionner ni à s’imposer comme le blockbuster du moment. Cela m’enlève tout espoir concernant les futurs films de la franchise Justice League. En tout cas, si l’on devait retenir une bonne chose de Batman v Superman et de l’univers mis en place par DC Comics/Warner, c’est cette envie de livrer quelque chose de bien plus sombre et travaillé que les autres films du genre. Et ça, nous ne pouvons que les féliciter pour ce culot, malheureusement encore mal exploité.

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le 28 mars 2016

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