Qui disait qu'on ne pouvait pas réussir une trilogie ?
La trilogie des Before n'est pas seulement atypique par sa forme (trois films indés qui racontent l'évolution d'un même couple sur 20 ans, un essai à ma connaisance inédit), elle l'est aussi dans sa qualité, qui se bonifie d'épisode en épisode.
En 1994, Richard Linklater filmait la rencontre de Céline et Jessie pour Before Sunrise. Une rencontre fortuite dans un train pour Vienne où ce couple improbable va vivre une nuit d'amour avant de retrouver leurs vies. 10 ans plus tard, on retrouvait ces 2 personnages dans Before Sunset : Céline allait à la rencontre de Jesse dans une librairie parisienne où ce dernier présentait son roman, librement inspiré de leur rencontre. Après des heures à déambuler dans la ville pour réassembler leur histoire Jesse manquait son avion...
A nouveau près de 10 ans après, que reste t'il de leur couple ?
Dans l'introduction de ce Before Midnight, on constate d'abord que le couple a transformé l'essai. Ils sont bel et bien ensemble, en vacances en Grèce avec leur progéniture chez des amis écrivains. Le tableau est idyllique, voire un peu trop : on est sur le fil de la caricature bobo entre une femme obsédée par l'état du monde cultivant ses tomates et un homme occupé à parler littérature avec ses potes au soleil... Mais cette introduction n'est heureusement qu'un trompe l'oeil, et lorsque les 2 personnages vont enfin se retrouver à nouveau en tête à tête, les choses sérieuses commencent.
On sait tous à quel point il est difficile de réussir une trilogie. Non seulement chaque volet doit s'imbriquer avec logique à son prédécesseur, mais ils doit aussi posséder son identité propre sans trahir la cohérence de l'ensemble. Celle ci semble bateau sur le papier (1. rencontre 2. retrouvailles 3. déchirures) mais son efficacité est redoutable.
En cloisonnant les différents stades d'une relation amoureuse le trio Linklater/Delpy/Hawke, qui a écrit les scénarios des 3 films, parvient à créer une chronique romantique où chaque volet possède son histoire et son charme propre sans trahir ses protagonistes. C'est une vraie réussite qui ne s'arrête pas là : les dialogues où plutôt les joutes verbales, Julie Delpy qui incorpore toujours plus d'éléments biographiques (ceux qui ont vu les deux 2 Days... savent de quoi je parle) sans que ça devienne une astuce trop visible, la réalisation et le jeu des acteurs tellement naturels qu'on se demande parfois ce qui ne relève pas de la fiction.
Personne n'y sauve le monde, on y parle (vraiment) beaucoup, mais on est devant un véritable objet cinématographique avec un cœur où tout est à sa place.