Jacen - Trip in Asia

Beijing Stories (2016) - Underground Fragrance / 75 min.
Réalisateur : Song Pengfei
Acteurs principaux : Ying Ze, Luo Wenjie, Zhao Fuyu, Li Xiaohul, Lin Xiaochu
Mots-clefs : Chine - Société - Urbain

Le pitch :
Beijing. 23 millions d’habitants et une croissance urbaine démesurée. Sans cesse des quartiers sont détruits et reconstruits pour la nouvelle classe moyenne. Pour gagner sa vie, Yong Le récupère des meubles usagés dans les maisons abandonnées. Xiao Yun, elle, danse dans un bar. Tous deux habitent la « ville souterraine » et rêvent d’en sortir. Jin, lui, a sa maison. Il rêve pourtant d’ailleurs. Son quartier va être détruit. Il a accepté de partir mais il doit d’abord vendre sa maison à un prix décent. Trois rêves, trois destins, trois histoires de la Chine actuelle.

Premières impressions :
"Beijing Stories" est à peine sorti dans les salles obscures que déjà il semble voué à être déprogrammé et j'avais à cœur de vous faire partager mon avis sur cette superbe découverte afin de vous laisser une petite chance de le voir. C'est qu'en ces temps de blockbusters, il est compliqué pour un film asiatique de se faire une place, surtout lorsqu'il s'agit du premier film d'un jeune réalisateur inconnu et pourtant bourré de talent.

A 33 ans, Song Pengfei nous propose un film magnifique, un témoignage de la Beijing actuelle, dont la croissance se fait sur le dos de petites gens. Pourtant, il n'est pas question pour le réalisateur de tomber dans le misérabilisme. C'est que le film est tiré en partie de son histoire familiale et que les personnages sont inspirés de connaissances rencontrés dans les sous-sols de Beijing.

De ses études de cinéma en France, Song Pengfei a retenu la simplicité. Ses personnages parlent peu. De son goût pour le cinéma japonais, il a tiré le beau et le contemplatif. Cette sensation est soutenue par une photographie aux couleurs magnifiques. Alors que le film tourne régulièrement dans des sous-sols délabrés, le réalisateur ne cherche pas à nous étouffer. L'image reste toujours splendide. Song Pengfei arrive à créer le beau dans la misère, sans la rendre moins intolérable.

Il faut également saluer le jeu des acteurs, tout en intériorisation. On ressent que dans cette Chine là, il n'y a pas de place pour se plaindre. Les émotions se comprennent dans la gestuelle subtile. Et pourtant, Le jeu est très naturel. Seule la musique, superbe, vient jouer les artifices pour accentuer la nostalgie. Grâce à cette réalisation sobre et à ce jeu tout en pudeur, "Beijing Stories" flirte parfois avec le documentaire.

Song Pengfei l'affirme en interview. Son cinéma est engagé et critique vivement les sacrifices demandés. Cependant, son regard est lucide. Le plan de fin nous montre une foule consumériste qui avance avec frénésie, tandis que l'un des héros est adossé à une balustrade. Il finira par emboiter le pas à la foule.

Ô bien sûr, "Beijing Stories" ne conviendra pas à tout le monde. Son rythme est lent et ses histoires de vies sont trop peu romanesques. Cependant, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde. Si vous avez le goût à l'émotion et que le parcours de parfaits inconnus ne vous laisse pas de marbre, alors courrez voir ce film tant qu'il est encore en salle. Vous en ressortirez touchés et plus conscients de la Chine actuelle.