La mariée était Belle, l'époux était confus, leur union fut un échec

Disclamer : Cette critique risque de contenir des spoils, désolé par avance.


Mamoru Hosoda... Mamoru putain de Hosoda... Mamoru est de retour les amis et ça c'est toujours un petit événement. Voilà 15 ans que ce bon Mamoru s'est fait une belle place au panthéon des réalisateur de cinéma d'animation japonais. "Le nouveau Miyazaki" comme la presse l'a déjà surnommé plusieurs fois - Bon, je l'ai sûrement déjà lâché une fois ou deux aussi donc je vais pas jeter la pierre - nous propose ici son 6e long-métrage d'animation tiré d'une histoire originale.
Fidèle à son thème de prédilection que l'on pourrait appeler "le fantastique au quotidien", Mamoru Hosoda entreprend ici de raconter à sa sauce le conte "La Belle et la Bête" en le saupoudrant d'une grosse dose de mondes virtuels.


OZU


Imaginez plus de 5 milliards d'individus connectés à un gigantesque monde virtuel. Sorte de programme hybride entre Instagram et Second Life, ce monde appelé U (prononcé à l'anglaise You) n'est qu'une version bigger better de OZ, le gigantesque réseau déjà présent dans Summer Wars, cependant malgré sa grandeur les activités ont l'air d'être bien plus limités dans ce grand U. Outil de découverte et de partage, U est basé sur un petit appareil, à placer dans les oreilles, qui décèle et montre au monde le potentiel de la personne qui le porte. Et le potentiel de Bell c'est de chanter, de chanter avec son coeur et de toucher l'âme des gens. Bell devient rapidement un phénomène de société et son identité réelle cachée est un mystère géant pour cette toile 3.0. Mais si le monde se déchire à savoir qui peut se cacher derrière cet avatar tout rose, nous spectateur faisons rapidement la connaissance de Suzu, jeune fille timide et renfermée qui se sert de U pour exprimer sa passion qu'est le chant.


Patatras, l'histoire commence (et les spoils aussi donc).


Une fois la scène d'exposition posée où le film en profite pour en mettre plein les yeux et plein les oreilles au spectateur fasciné, l'histoire commence déjà à être fragile sur ses appuis quand un long flash-back vient nous raconter la jeunesse de Suzu, une jeunesse pleine de joie et de musique jusqu'à ce que sa mère ne meurt emportée par un courant d'eau alors qu'elle voulait sauver une petite fille. Suzu va alors se renfermer et commencer à ignorer son père et délaisser ses amis mais pas totalement non plus. La petite Suzu est prise de regret et porte sur elle la culpabilité que les gens ont mis sur sa mère qui a osé se sacrifier pour sauver une enfant. Et ça que j'ai prononcé mon premier "Pourquoi ?" dans mon masque et malheureusement pas le dernier. La narration du film est un enchaînement de séquences qui n'ont que peu de logique et laissent vraiment perplexe sur l'histoire racontée.


Une bête de Dragon.


Alors que Bell gagne en popularité et en followers, celle-ci s'en va donc donner un concert gigantesque pour des centaines de millions de personnes. Ce show grandiose aurait pu être un jour comme un autre pour la fille, jusqu'à ce qu'un Dragon, poursuivi par les super-justiciers du web viennent mettre la pagaille au cours d'une gigantesque bagarre dans la salle de concert. Voilà comment Bell(e) va rencontrer la Bête. Ce personnage mystérieux deviendra alors la nouvelle cible du web (et de Suzu) qui cherchera à découvrir son identité.


Pourquoi ?


A ce stade du film, plusieurs "Pourquoi ?" avaient déjà franchi le pas de mon palais mais mon cerveau lui continuait, sereinement de penser que cette bouillie narrative finirait par trouver sens dans un final grandiose alors que mes yeux continuaient d'être choyés comme rarement. Malheureusement pour mon cerveau, la suite des aventures va s'avérer être un festival d'incohérences et de trous narratifs et de séquences sans explications. Des lieux trouvés miraculeusement, des personnages qui peuvent changer les règles du film quand bon leur chante, mais ces règles peuvent se changer elles-mêmes d'un coup de baguette magique. De conte de féé on passe rapidement à festival de coïncidences qui montrent rapidement la faiblesse du récit. Pire, on a rapidement la sensation que l'histoire racontée dans le monde réelle et l'histoire racontée dans U sont totalement dissociées et ne se répondent même pas, comme si on regardait deux films différents et qu'on zapperait de l'un à l'autre.


Un superbe paquet cadeau pour une boîte vide


En sortant de la salle après avoir eu un final qui résout toutes les intrigues en 5 minutes à grand renfort de "Ta gueule c'est magique" et d'une morale sortie elle aussi des tréfonds du Dark Web, la principale sensation reste celle d'un énorme gachis, d'un formidable potentiel qui n'a pas eu le temps ou les moyens de s'exprimer. Oui, le film est visuellement magnifique et certaines scène vont vous décoller la rétine. Oui la musique est entraînante et fascinante et m'a accompagné tout le long de l'écriture de cette critique. Mais aussi beau soit cet emballage, je ne peux pardonner le vide scénaristique alors que le scénario s'appuie sur un conte célèbre et une thématique qu'il a déjà abordé.


Difficile pour moi de conclure cette critique, j'ai toujours autant d'affect pour le réalisateur des Enfants Loups, mais force est de constater que Belle n'est que l'aboutissement de son errance narrative depuis Le Garçon et la Bête. Je pensais qu'en revenant en terrain un peu connu il en profiterait pour raconter quelque chose d'inattendu mais à vouloir raconter trop de chose, Mamoru Hosoda ne raconte rien et reste dans le superficiel.

StartJo
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le 1 sept. 2021

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StartJo

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