Je viens juste de revoir "Gattaca", ce chef d'oeuvre de Andrew Niccol, probablement le meilleur film des années 90. Et comme la première fois, ce film me laisse sans voix, par la grâce remarquable de son déroulé impeccable, de ses images léchées et de sa musique inoubliable. Quelle merveille.


"Gattaca" nous propose un monde orwellien, où le racisme des couleurs a été remplacé par le racisme des gènes. Etre ou ne pas être muni des gènes de l'élite, voilà qui détermine votre avenir et votre status social. A la moindre présomption de gènes défectueux, vous êtes classé In-Valide, bon à nettoyer les chiottes, même si vous connaissez votre astro-physique sur le bout des doigts. Mais voilà, Vincent, jeune homme féru d'astronomie, ne veut pas de cette vie misérable à laquelle le relègue un cœur jugé défaillant. Il veut partir dans l'espace, et pour cela il "emprunte" l'identité et l'ADN d'un membre déchu de l'élite.


Andrew Niccol fabrique un extraordinaire mélange polar/ SF pour nous livrer un très beau message sur l'égalité des chances, la valeur de chacun, les risques de l'eugénisme et surtout sur la puissance de nos rêves. Après un générique étonnant, à la musique envoûtante (superbe score de Michael Nyman, le compositeur de Greenaway), on retrouve Ethan Hawke, alors qu'il prépare son départ pour Titan, une lune de Saturne. Un flash-back superbement monté nous montrera la fabrication de l'imposture qui catapultera ce sans-grade dans les rangs de l'élite destinée aux vol spatiaux. Alors qu'il danse sur le fil du rasoir, un meurtre est commis...


Tout fonctionne à merveille dans ce film, les décors abstraits, légèrement teintés années 50, le formalisme des relations, la froide beauté de Thurman, la classe folle de Jude Law, le détective à la Columbo, il n'y a pas une fausse note dans le jeu des acteurs, ni dans l'engrenage des péripéties.
Les acteurs sont véritablement portés par des dialogues minimalistes mais très lourds de sens, qui tissent les symboles et les enjeux dans l'histoire banale mais angoissante d'une enquête policière. Ethan Hawke est excellent dans le rôle principal (très bien épaulé par Law, Thurman, Koteas, ou Alan Arkin) et le bildungsroman de son personnage est superbement amené. Il est vrai que j'adore les films avec voix off...
Niccol arrive à faire vivre un réel suspens entrecoupé de moments d'émotion, de réflexion (le côté "1984" du film est une touche légère mais certaine) et presque de poésie. Faire le parallèle entre la confrontation/ compétition entre deux frères génétiquement opposés et la rencontre / collaboration entre deux hommes de statuts social différents est une idée forte et porteuse de ce film. Un des aboutissements du film est d'ailleurs de faire entrer cette émotion dans les interstices d'une cinématographie presque glaciale.
Bon, tout a été dit sur film donc je n'insiste pas. Ne passez pas à côté de Gattaca, un film aussi beau qu' intelligent.

nostromo
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le 14 juil. 2015

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nostromo

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