Tim Burton nous fait les gros yeux

La filmographie de Tim Burton a le mérite d'être originale à défaut d'être totalement exemplaire. Jusque dans les années 2000, il était surtout vu comme "un sale gosse d'Hollywood" qui privilège plus sa vision artistique que ce que pouvais rapporter son film à ceux qui l'ont engagé, le cas le plus frappant sont les deux épisodes de Batman, si dans le premier il arrive à faire malgré les contraintes des producteurs SON film, le deuxième où il a plus de liberté n'est plus un film de Super-héros mais un film de monstres où la frontière du bien et du mal est très ténue voir inexistante, Burton s'approprie Batman et le transcende. L'autre blockbuster qu'il pirate c'est la "Planète des singes" Burton est clairement du côté des singes, il suffit de voir comme les personnages humains sont fades, il y a le héros de service, la blonde de service, le black de service et l'ado de service certes comme dans beaucoup de productions du même genre mais là c'est tellement appuyé et ils n'ont aucune utilité dans l'histoire qu'il ne peut s'agir que d'un clin d'œil ironique de Tim Burton au spectateur, par rapport aux primates, et le combat entre le maître et son élève qui dans d'autres productions serait une des scènes les plus importante du film est réduites à une poignée de secondes par Tim Burton, bref "La planète des singes" version Burton est peut-être son dernier film de "sale gosse" un film qu'il saborde volontairement pour une faire une œuvre plus personnelle qu'il n y paraît, le film devait être un des blockbuster de 2001 mais les critiques et le public furent mitigees et on a du attendre 4 ans et "Big Fish" pour que Burton redevienne bankable.

Après cette longue digression passons à "Big eyes", si j'ai beaucoup aimé "Dark shaddows" qui retrouvait l'humour noir et l'irrévérence de films comme "Sleepy Hollow" ou "Sweeney Todd" j'ai trouvé que l'émotion et la poésie habituelle n'était pas assez présentes et que ça sonnait un peu moins naturellement que dans les films précités. Avec "Big eyes", Tim Burton s'essaie à nouveau à conter la vie d'un artiste 21 ans après l'excellent "Ed Wood" . Déjà on est plus dans une superproduction hollywoodienne comme l'étaient ses derniers projets, à croire que Tim Burton a voulu prendre du recul et "refaire "Ed Wood"" un film plus modeste et plus personnel, il avoue dans le making of que pendant son enfance les Big eyes était à la mode et toute sa famille avait des posters de ces œuvres et quand on voit les dessins de Burton, l'influence est bien là.

Walter Keane, peintre raté mais dote d'un charisme et d'une éloquence qui font de lui un bon vendeur, il vend un tableau de sa femme Margaret, mais déçu que ce ne soit pas un de ses tableaux qui trouve preneur, il boit beaucoup et provoque une bagarre avec le gérant du bar branché où il expose, Walter est pris en photo en train d'assommer le patron avec un des tableau de sa femme, le buzz est lancé et Walter trouve plus commode de s'attribuer l'oeuvre de sa femme, le succès venant, le couple ne peut plus faire marche arrière sous peine d'être accusé d'escroquerie, à Walter la gloire à Margaret le travail dans l'ombre.

Je ne savais pas quoi attendre de ce nouveau film de Tim Burton, une chose est sûr : les avis sont mitigés, tant de la part de la critique que du public, comme toujours. C'est aussi le premier projet depuis 10 ans où Johnny Depp et Helena Bonham Carter sont absents du casting, à la place on a droit à Amy Adams et Christoph Waltz, excusez du peu. Alors que dire du film, j'ai beaucoup aimé!!!
Le personnage de Margaret Keane est complexe c'est une femme qui n'hésite pas quitter son premier mari alors que l'époque marginalise ce genre d'initiative et un mauvais mari sera mieux écoute du juge que la bonne épouse. Le personnage de Margaret est typiquement un personnage burtonien, elle n'est pas à sa place dans la société qui la rejette notamment dans la scène où les expose ses propre toiles, celle que son mari lui autorise de signer de son propre nom, qui ne sont même pas regardées par les clients de la galerie, ceux-ci préférant les Big eyes, mieux vendus par Walter, on pense aussi à Edward aux main d'argent quand Margeret peint ses tableaux isolée de tout le monde, quasi recluse, ça m'a fait penser au jardin d'Edward caché par le sinistres château.
Christoph Waltz lui me ferait plutôt penser à Ed Wood du film éponyme, surtout au début quand Walter Keane essaie de vendre ses toiles, mais aussi au Joker de Nicholson, l'acteur en fait des tonnes, mais n'en fait jamais trop et c'est jubilatoire de le voir jouer, notamment la scène du tribunal là où l'acteur est surtout fort c'est que si Walter n'a aucun scrupule, il reste un personnage humain, ce n'est pas le méchant basique et durant quelque scène on peut voir la fragilité du personnage et là où Waltz est génial c'est qu'il est capable dans la même scène de faire passer plusieurs sentiments, ça me rappelle sa prestation dans "inglorious baterds".

Le fait qu'on ne retrouve pas l'astmosphere habituelle de Tim Burton est différemment perçu par les critiques, soit on trouve le film impersonnel, il aurait pu être réalisé par n'importe qui ou justement ça fait pour d'autre une qualité du film Tim Burton essayant d'expérimenter de nouvelles idées de mise en scène, en tout cas ce film pose une réflexion sur la peinture, comme "Ed Wood" posait une reflexion sur le cinéma, et dresse le portrait d'une artiste dont les tableaux font parties d'elle et d'un homme qui transformera ces œuvres d'art en business.