Avec l'augmentation progressive de réalisatrices dans le divertissement grand public, il est possible d'observer une claire distinction entre les visions masculines et féminines du monde des super-héros (et donc du monde en général), particulièrement chez DC.


D'un côté, les hommes se prennent généralement vraiment très au sérieux. Ils portent le poids du monde sur leurs épaules, et ils sont les seuls à pouvoir changer le cours des choses lorsque l'univers s'effondre, ce qui est toujours inévitable dans leurs films. Ils évoluent dans des environnement sombres et aux lumières tamisées et menaçantes, et surtout, ils cherchent désespérément à s'enchaîner à leurs responsabilités et y voient un fardeau ou une obligation que leur naissance leur a imposée et à laquelle ils ne peuvent échapper. On se demande parfois pourquoi ils se battent à part par obligation, tant ils semblent "hors du monde" et sans lien qui les y retiennent réellement.


D'un autre côté, les femmes cherchent généralement la libération, l'émancipation, la joie, et à créer des connexions. Elles savent que seules, elles ne peuvent aller au bout d'elles-mêmes, et elles ne craignent pas de demander de l'aide ou du soutien. Elles évoluent dans des décors bien plus colorés et variés, et leur puissance n'est pas un poids mais une part d'elles-mêmes, et jamais constitutive de toute leur identité.


Je préfère de loin cette dernière approche, car les préoccupations de quelques dieux sans joie ni vie et qu'on cherche à nous faire passer pour des êtres vivants ne m'ont jamais véritablement parlée.


Dans "Birds of Prey", on plonge dans le fun décomplexé, et je pense que c'est la première fois que j'ai véritablement souri et ri devant un film DC. Certes, on ne trouve rien de révolutionnaire dans le fond, la forme et le déroulement, mais le film propose un vrai propos au-delà de son festival de scènes d'action, très certainement grâce à son combo Cathy Yan à la réalisation et Christina Hodson au scénario, qui viennent apporter une sensibilité différente et bienvenue à un style qui tournait en rond depuis trop longtemps.


Les scènes d'action non seulement nombreuses mais surtout variées. Des plans fixes pour bien saisir la décomposition du mouvement, une violence bienvenue dans les coups qui nous rendent crédibles les affrontements, des styles différents pour chaque combattant.e... Un vrai plaisir de tous les instants. En même temps, ce n'est guère étonnant quand on a comme assistant réalisateur Chad Stahlski, qui s'occupe de la saga John Wick, une des meilleurs séries d'action de tous les temps. Néanmoins, on sent aussi parfaitement le regard féminin, qui évite tout plan tendancieux et gênant sur les formes des héroïnes, et rien qu'à ce niveau "Birds of Prey" montre la différence entre réalisateur et réalisatrice dans beaucoup de cas.


Au niveau de son propos, rien de révolutionnaire non plus en soi, mais les thèmes développés sont malheureusement toujours largement d'actualité. Ainsi, chaque femme dans le film cherche à se libérer d'une ombre qui les empêchent de s'élever et d'atteindre leur plein potentiel.
Harley Quinn cherche son identité au-delà de "petite amie du Joker". Black Canary souhaite se libérer du joug de son patron et à accepter son héritage. Huntress a besoin d'un nouveau but dans la vie après avoir accompli sa vengeance. La détective Montoya doit se libérer de l'ombre dans laquelle ses supérieurs cherchent à l'enfermer. Et Cassandra ch/erche un lieu où elle pourrait être acceptée et aimée.
Toutes se croisent et se complètent, et le film est remarquablement solide d'un point de vue narratif et thématique. Ces femmes usent de la violence pour briser leurs chaînes, mais ce n'est pas afin de perpétuer de nouveau le cycle de la violence, mais d'y mettre au contraire un terme. Le but n'est pas la force pour la force, mais la puissance pour ne pas se retrouver sous le joug d'une autre personne et vraiment prendre sa vie en main.
Au-delà de son côté fun et vivant, il y a plein de choses intéressantes à observer dans ce film, et qui peut vraiment mener à des discussions sur la nécessité d'une variété de regard sur le monde afin d'agrandir nos horizons et nos perspectives, et développer nos sensibilités au contact de l'art, afin de les répercuter dans la réalité.


Certes, le film est parfois un peu lent et on peut avoir l'impression d'être un peu noyé.e sous les informations et les scènes d'exposition, mais c'est généralement intéressant et important pour comprendre les personnages, donc on suit le tout avec plaisir.
Il s'agit également clairement d'une introduction à cette franchise, et j'espère sincèrement une suite qui saura capitaliser sur ce que ce "Birds of Prey" aura construit.


Au final ,"Birds of Prey" représente la quintessence du film "fun", dont on ressort avec un sourire sur les lèvres et des images plein la tête. Contre toute attente, j'ai passé un excellent moment en compagnie de ces femmes et j'espère avoir la chance d'assister au fil des ans à toujours plus d'expériences de ce genre dans des styles différents.

Therru_babayaga
7
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le 16 févr. 2020

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Therru_babayaga

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