Des nichons numériques restent des nichons !

Blade Runner 2049 c'est tout ce que je déteste, une suite à un film qui n'attend pas de suite, c'est jaune, mais bien bien bien bien jaune... et comme le dit le grand penseur moderne Karl Lagerfeld : "le jaune c'est moche", la musique est omniprésente et pas réellement discrète, c'est super long... Mais j'ai vraiment pris mon pied devant le film et je pense que c'est parce que c'est fait avec amour par quelqu'un qui ne se fait pas mettre de bâtons dans les roues, qui a sa vision complémentaire au film de Ridley Scott.


Le film ne tombe pas dans le piège de la redite, le premier parlait de l'humanité des répliquants, là le sujet a déjà été traité, donc pourquoi Villeneuve reproposerait-il la même chose ? Il aborde donc Blade Runner avec une approche beaucoup plus sensorielle, c'est vraiment un film à voir au cinéma, parce que visuellement c'est très beau, mais surtout pour le travail sur le son qui fait vraiment vibrer la salle. On est dans les sonorités très graves, lourdes et lancinantes, savamment dosées qui viennent habiter ces ruines que l'on voit à l'écran. Rien qu'à la musique on sent l'état de décrépitude du monde. Mais c'est surtout la manière avec laquelle la musique arrive, en même temps qu'une nouvelle séquence, semblant englober tout l'univers qui meurt peu à peu.


J'ai vraiment été conquis par cette approche alors que d'habitude je suis plutôt partisan du film sans musique ou avec éventuellement un morceau de Mozart (et si c'est intradiégétique c'est mieux), mais pas plus...


Bref, à ce niveau c'est une réussite totale.


Surtout que ça colle vraiment avec la mise en scène du film, qui elle aussi très lente, on a le temps de voir les espaces, de sentir la ville, beaucoup plus que dans le premier. Même dans les scènes d'action, on est très loin d'un film film surdécoupé, au contraire l'intensité d'un tir de pistolet se fait avec le son, on sent la puissance de l'arme et que ça ne rigole pas... la caméra n'a pas besoin de bouger dans tous les sens...


Et si le film peut se permettre ça c'est grâce à sa durée... C'est beaucoup trop long, mais grâce à cette durée le film peut prendre le temps de faire exister son univers à travers ces scènes lancinantes, nihilistes où au dehors tout n'est plus que pub ou désolation... Et franchement limite j'aurai pu voir un film tout entier de voyage en voiture, sans intrigue ni rien...


En parlant de l'intrigue, elle est correcte sans être folle, un beau petit retournement de situation sur la fin qui aurait pu être amené de manière plus subtile, mais bon... mais ce n'est pas réellement elle qui importe, ce qui importe c'est le parcours du personnage de Ryan Gosling dont on sait dès le départ qu'il est un répliquant. Et là je me pose la question du choix de Gosling comme acteur, parce que je trouve que les mecs ténébreux qui ne disent rien, notamment ici, ça ne lui va pas. Il est trop propre sur lui (alors bon quitte à s'acheter un répliquant autant qu'il soit beau...), un peu comme Ford dans le premier.


En parlant de Ford, le film a l'intelligence de ne pas trancher explicitement sur la fin du premier... ce qui est une bonne chose et permet au premier de garder toute sa "saveur".


Le film part donc d'un Gosling sans personnalité, ou que l'on croit sans personnalité (on casse un peu les burnes avec l'âme au début du film, les humains ont des âmes, les répliquants n'en ont pas... qu'on nous dit... sauf que lorsque l'on dit ça on ne dit rien étant donné que l'existence de l'âme n'est pas prouvée et je n'y crois pas et je pense que le film aurait été plus subtil si on ne venait pas nous parler de ça) et qui va petit à petit se découvrir.


Le film ne traite pas la question de l'humanité des répliquants qu'elle semble considérer comme acquise pour le spectateur étant donné l'intrigue du film, malgré le discours binaire sur l'âme dont on sait très bien qu'il ne tient pas... La question est plus de ce que l'on peut faire une fois que l'on s'est rendu compte qu'on est vivant. Et le film se permet plus d'explorer la relation entre une intelligence artificielle et Gosling. Car le fait qu'un monstre de Frankenstein créé de toute pièce en labo puisse avoir une "âme" (comme ils disent) ça fait longtemps que la question est explorée, notamment dans le premier film, là pour changer on va s'intéresser à une relation virtuelle entre quelqu'un qui n'existe pas, qui n'est qu'un programme informatique. Le film va marcher sur les plates-bandes de Her. Il le fait encore une fois très bien puisque jamais le film ne va remettre en question l'humanité de cette IA ce qui va donc créer de réels paradoxes à cause des limitations techniques du fait de ne pas avoir de corps, mais ça va surtout permettre des scènes très belles, je pense notamment à cette scène où l'IA demande à Gosling de la fragiliser et où elle dit qu'elle sera comme une vraie femme.


Les répliquants, les IA, tous n'ont qu'une volonté, devenir humain, faire comme eux, être comme eux. Même leur mortalité semble être bonne pour eux.


Le bémol viendrait de la fin, moins marquante que celle du premier et surtout beaucoup plus attendue, quand on voit la scène arriver on sait exactement à quel moment ça va couper pour qu'on ait le générique et j'avoue que ça m'a déçu. J'ai passé un excellent moment un peu gâché par la fin. Pas qu'elle soit pas bien, mais le film n'est pas banal et là ça contraste...


Bref c'était vraiment très bien, très beau, puissant, avec une pointe d'humour bien que très long et que l'on reste sur sa faim.

Moizi
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le 11 oct. 2017

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Moizi

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